Forces armées maliennes : La vaillante souillée

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Aujourd’hui 24ème du classement 2016 des puissances militaires africaines selon le site américain spécialisé dans l’armement Global Fire Power, les forces armées du Mali sont loin d’être à leur vraie place. Il est désormais clair que la guerre moderne est devenue une chose extrêmement complexe, particulièrement au cours de ce dernier siècle. Ce ne sont plus les batailles gagnées qui font gagner les guerres, mais la complexe interdépendance entre des victoires militaires, des pressions économiques, des manœuvres logistiques, des renseignements sur l’ennemi, des prises de position politiques… c’est-à-dire des douzaines de facteurs. Nos hommes sont-ils dans ces cas de figure ?

Née des cendres de l’armée coloniale en 1962, l’armée malienne de par la nature des hommes qui la compose était l’une des plus vaillantes et les plus craintes d’Afrique. Aussi bien sous la 1ère que sous la 2ème république, elle a fait ses preuves dans la défense de la patrie et de l’intégration sur le continent. D’une manière générale, l’héroïsme de notre dernier rempart n’est pas seulement dû à l’équipement, mais au courage et à la détermination des descendants de Tieba, Babemba, Soundjata, Biton, Soumangourou, firhoun et autres qui là compose. Le temps n’a certainement pas d’impact sur leur détermination, seul la trahison peut leur faire trébucher. C’est à cela qu’on assiste de nos jours. De l’intérieure comme de l’extérieur, ils ont pris un sérieux coup dans le dos. Que les uns et les autres se détrompent, elle n’abdiquera pas avec le soutien du peuple dont elle fait la fierté.
Lorsqu’on veut qu’une armée soit victorieuse, il faut lui inspirer une si grande confiance afin qu’elle soit persuadée que rien ne va l’empêcher de vaincre, disait Machiavel. De nos jours, c’est de cette confiance du peuple dans ces moments difficiles dont nos vaillants soldats ont besoin pour parapher leur mission difficile, mais pas impossible. Car, la plus destructrice de toutes les armes n’est pas la lance ou le canon qui peuvent blesser le corps et détruire la muraille. La plus terrible est la parole qui ruine une vie sans laisser de traces de sang, et dont les blessures ne cicatrisent jamais. Soyons donc maître de notre langue en ces moments critiques pour notre armée, pour ne pas être esclave de nos paroles. A la lecture du parcours récent de notre armée, il ressort qu’elle a été souillée à trois niveaux : la démocratie, les autorités actuelles et la communauté internationale.

Le tort de la démocratie

A peine arrivé au pouvoir, le président Alpha Oumar Konaré avec son concept de l’armée de développement a commencé à désintégrer notre force de frappe. Histoire de réorienter la quasi-totalité de notre budget alloué à la défense vers des secteurs profitables aux cadres de son parti. Comme si cela ne suffisait pas, en plus de ne plus acheter d’équipement militaire, il s’est spécialisé dans la destruction des joyaux qui faisaient la fierté de notre armée sous Modibo et Moussa. Sur le registre de l’armée, la « dictature » n’est pas une période aussi triste que certains politiques tentent de nous faire croire. La politisation de l’armée est aussi un héritage douloureux de la démocratie. Oubliant que quand on abat son chien méchant, qu’on s’expose à celui des autres, le président Alpha Oumar Konaré a envoyé nos équipements à la ferraille. Pis, il a même initié des projets visant à soumettre l’acquisition de certaines armes à l’approbation de tous les états de la CEDEAO. C’est cela dont le Mali est victime aujourd’hui. Partant du fait que la déchéance volontaire de notre armée a commencé sous Alpha et s’est poursuivie sous ATT, la période démocratique ne restera dans les annales de notre vaillante. En plus, l’intégration tout azimut de certains éléments multirécidivistes des rébellions successives ont été des erreurs préjudiciables à nos forces armées et de sécurité. Une troupe exige de l’homogénéité et la solidarité. Si tout le monde n’est pas dans cette logique, il y a problème. L’ennemie de l’intérieur frappe toujours par surprise, c’est cela qui a affaibli notre armée. Ni le courage encore moins les équipements ne peuvent empêcher ce coup de poignard démoralisant dans le dos.

Le Ministre de la défense et le président de la commission défense sur la sellette

De nos jours, notre armée souffre de la nouvelle race de responsable civile qui là gouverne. Il s’agit du Ministre de la défense, Thieman Hubert Coulibaly et du président de la commission défense à l’assemblée nationale, Karim Keita, fils du président de la république. Pour des raisons injustifiées, le fiston national et son ami tiennent notre armée en otage. Quelle expérience ont-ils pour gérer une armée dans un pays en crise ? S’il faut s’en tenir à leur CV, rien ne justifie leur présence à ces niveaux. Spécialisé dans les critiques stériles, le fils spirituel du président de la république bombardé à la défense fait montre d’une incompétence déconcertante. Quand on lui parle d’équipement militaire, il nous parle de statut. Statut oui, mais pour en bénéficier il faut d’abord être vivant. Aujourd’hui, le peuple réclame des mesures fortes pour empêcher la perte de nos soldats. Contrairement au ministre Coulibaly, entre le statut et les équipements, les soldats au front préfèreraient le second qui peut sauver leur vie. Le premier discrédit jeté à notre armée vient des autorités. Prendre toutes les critiques comme de la méchanceté relève de la malhonnête politique. Monsieur le Ministre, après Cheick Modibo Diarra et Boubèye, à qui le tour ? S’il vous plait, ne mettez pas votre carence sur le dos des autres !  En plus des militaires, le peuple est d’accord avec Boubeye concernant le changement de mode opératoire. Même les piètres soldats savent que l’attentisme est dangereux pour une armée. Le fait de dire de partir à l’assaut des terroristes n’est pas un crime, comparativement à votre incompétence, Monsieur le Ministre. Si comparaison était raison, vous n’auriez pas fait un mois à la défense à la place de Bâ Daou.

En ce qui concerne Karim Keita, président de la commission défense à l’assemblée nationale, son intrusion sur l’arène militaire parait révoltante. Sans aucune notion dans le domaine, il a été bombardé président de cette commission pour des raisons politiques et économiques, selon certaines indiscrétions. Politiquement, son père et son parti misaient sur les dividendes politiques qu’il fallait récolter sur les succès militaires qu’il avait promis lors de la campagne présidentielle. Malheureusement, s’était sans compter sur les forces occultes qui ont d’autres intérêts dans le septentrion de notre pays. Sans les dividendes politiques largement compromises par l’échec de l’assaut sur Kidal et l’obstination de la France, il restait le seul aspect économique de cette promotion démesurée. Le scandale de corruption du siècle autour de l’achat d’équipements militaires est passé par là. L’implication de certains proches du boss est révélatrice de la préméditation de ce holdup déjoué par la presse et la communauté internationale à travers le FMI et la Banque Mondiale. Depuis, le nom de Karim apparait dans le dossier d’achat des avions de combat pour notre armée. Quand le contrôleur devient exécuteur, qui va contrôler ? Ignorant son rôle de contrôleur de l’action gouvernementale, l’élu de la commune II joue dangereusement sur le terrain de l’exécutif avec la complicité de son ami Ministre de la Défense. Au-delà des propos après l’interpellation des ministres et ses visites sporadiques dans les casernes, son impact est nul sur l’amélioration des conditions de notre armée. Les frais de sa visite abusive aux salons de l’aéronautique dans le monde en lieu et place du ministre de la défense, auraient pu servir à évacuer le soldat blessé. Comme quoi, une armée ce n’est pas que des hommes et des armes, c’est aussi une vision et une compétence politique avérées. Choses qui font énormément défaut au Mali actuel.

« Appelée » au chevet de notre pays attaqué par les jihadistes, la France qui n’en demandait pas autant a décidé de profiter de l’occasion pour parachever ses ambitions coloniales stoppées par l’indépendance du Mali en 1960. Le temps de s’accaparer des ressources du nord de notre pays, la France n’a pas intérêt à avoir une armée forte sur ses traces. L’implantation du MNLA et la récupération de Ançardine à Kidal fait partie de ce plan visant à tenir le regard de l’armée malienne loin de ses agissements. Pour cela, tout est fait pour empêcher notre armée de se reconstruire. Le blocage de l’achat de nos moyens aériens avant, pendant et après l’occupation procède de cette intention malveillante d’un ami dont nos ancêtres ont sorti des griffes d’Hitler au prix de leur vie. Aussi bien auprès du Tchad que de l’Ukraine, la France aurait bloqué plusieurs tentatives d’acquisition d’hélicos de combat de notre pays. Comment un pays dit ami peut se comporter ainsi ? Nos autorités sont les seules à ne pas comprendre que la France n’a pas d’ami, mais des intérêts ? La phrase choc d’Alain Juppé vantant les succès militaires de ses protégés à Aguel Hoc met à nu les desseins inavoués de la France. A arme égale, le soldat français n’est plus valable que le nôtre. Issue des mêmes écoles de guerre qu’eux, il n’est pas rare que nos officiers les dament le pion dans leur propre pays. Les moyens aériens dont la France nous prive est l’âme de la guerre moderne. Sans couverture aérienne, l’armée française n’aurait pas pu résister un seul instant aux assauts des jihadistes. Ce ne sont pas les forces de la Minusma qui nous diront le contraire. C’est pourquoi nous devons être fiers de Didier et ses hommes.
Lamine Diallo

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2 COMMENTAIRES

  1. Karim et son père.tieman et son père doivent être condamnés pour détournement de fonds publics

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