Chambre de commerce et d’industrie du Mali : Des élections malvenues

2

Pour diverses raisons, les élections consulaires de la Chambre de commerce et d’industrie du Mali (Ccim), prévues pour le 17 janvier 2021, donc en pleine pandémie de Covid-19, doivent être purement et simplement reportées, en attendant la fin de la Transition en cours au Mali. Mieux encore, la Ccim a elle –même besoin d’une Transition afin de procéder au toilettage des textes qui présentent beaucoup de lacunes et aussi pour prendre en compte les nouvelles régions récemment créées car non seulement elles ont droit à leur Chambre de commerce et d’industrie, mais la mise en œuvre de l’Accord d’Alger est synonyme de réformes profondes.

 

 

Pourquoi dans ce contexte de Transition marqué par une crise multidimensionnelle, en pensant à l’insécurité dans certaines régions du pays et à la pandémie de Covid-19, le ministère de l’Industrie et du commerce choisit-il d’organiser des élections consulaires de la Chambre de commerce et d’industrie du Mali (Ccim) le 17 janvier 2021? C’est la question qui taraude les esprits à l’heure actuelle, dans la mesure où cette décision navigue à contrecourant de la réalité du pays.

En effet, déjà, un cas de jurisprudence existe et conforte le scepticisme de ceux qui se posent des questions sur l’opportunité de l’organisation de ces élections consulaires. Il s’agit de la Transition de 2012, présidée par le Professeur Dioncounda Traoré, en son temps brandie comme prétexte pour geler l’organisation des élections consulaires de la Ccim. Mieux, il fut installé à la tête de cette chambre consulaire une Délégation spéciale, en guise de structure chargée d’y gérer la Transition et d’y impulser les réformes nécessaires.

 « Gérer » le cas des commerçants détaillants

Mais il faut reconnaître qu’en termes de promesses de toilettage des textes, la montagne a accouché d’une souris. On s’est limité à faire adopter par le gouvernement, à la hâte, un Décret taillé sur mesure pour « gérer » le cas des commerçants détaillants qu’il fallait maîtriser, parce que considérés comme trop envahissants pour imposer le candidat de leur choix au poste de président de la Ccim. Des faiseurs de roi en quelque sorte. Dans cet élan, des points importants ciblés par les réformes ont été mises en veilleuse et l’actuel Bureau sortant, présidé par Youssouf Bathily élu suite aux élections de 2015, n’a en rien amélioré cette situation.

Effectivement, avant les dernières élections, on a tout simplement retoqué des aspects liés aux élections consulaires, sans pour autant s’attaquer aux questions de fond par une relecture de la Loi n° 98-014 du 19 janvier 1998 portant création de la Chambre de Commerce et d’Industrie du Mali. C’est seulement en le faisant qu’un Décret d’application adossé sur la nouvelle loi pouvait apporter des réponses conformes aux attentes des milieux d’affaires du Mali.

Du rafistolage avec le Décret N° 2014-0641/P-RM du 21 août 2014

Mais en gardant cette loi dépassée et aux dispositions insuffisantes à maints égards, on a tenté de faire du rafistolage avec le Décret N° 2014-0641/P-RM du 21 août 2014 fixant l’organisation et les modalités de fonctionnement de la Chambre de commerce et d’industrie du Mali, en abrogeant toutes dispositions antérieures contraires, notamment celles du Décret n° 98- 228/P-RM du 06 juillet 1998 fixant l’organisation et les modalités de fonctionnement de la Chambre de Commerce et d’Industrie du Mali.

Dans la précipitation, le nouveau Décret, parlant de la composition du Bureau de la Ccim, a omis de faire mention du Trésorier dont la fonction et les prérogatives se trouvent ainsi légalement occultées. Ce Décret n’a pas aussi réglé des problèmes importants. C’est le cas de certaines activités, comme la Pharmacie. Tantôt elle est classée dans le commerce, tantôt dans l’industrie ou même dans les services, selon les régions.

Ignorer ces nouvelles régions ne contribue pas à renforcer la dynamique de construction de l’unité et de la cohésion nationales

Deux exemples d’insuffisances, parmi tant d’autres, à combler par une relecture sérieuse des textes qui permettrait de tenir compte de nouvelles activités qui n’étaient pas prises en compte auparavant et qui influencent beaucoup la structuration et la composition des trois sections citées par la Loi: commerce, industrie et services.

Sans compter que les notions de régime d’impôt utilisées par le nouveau Décret pour classifier les membres consulaires, ne reposent sur aucune base légale au vu de la loi portant création de la Ccim, laquelle ne contient de disposition pouvant soutenir cette différenciation trop personnalisée. En lieu et place, dans plusieurs pays africains, il a été introduit, au sein des sections, des sous-sections qui élisent leurs différents représentants, lesquels se retrouvent pour constituer l’Assemblée consulaire vraiment représentative de toutes les branches d’activité comprises dans les différentes sections.

En dehors de tout cela, la création de nouvelles régions est une autre réalité qui impose de poser des actes juridiques allant dans le sens de l’érection de leurs chambres consulaires, au même titre que toutes les régions qui existaient déjà.  Ignorer ces nouvelles régions ne contribue pas à renforcer la dynamique de construction de l’unité et de la cohésion nationales.

Et le foisonnement de régions pose une autre question importante : faut-il toujours garder une chambre de commerce unique au plan national, avec des démembrements qui ne sont que des délégations ? Ou au contraire, sur la base des dispositions contenues dans l’Accord d’Alger qui prônent l’autonomie des régions pour les questions de développement, faut-il créer une chambre de commerce, d’industrie et de services au niveau de chaque région et mettre en place une union nationale des chambres consulaires ?

Pourquoi pas aussi, comme le préconisent certains, profiter de cet élan de décentralisation pour procéder, au niveau de chaque région, au regroupement de la kyrielle de chambres consulaires en une chambre forte pour mieux gérer la plupart des activités d’entreprises qui sont transversales et ne sauraient souffrir d’un cloisonnement inefficace en matière de réponse aux préoccupations des opérateurs économiques ?

Mettre la Ccim au diapason de la Transition

Ces quelques remarques et axes de réflexion que nous venons de dégager prouvent à suffisance que les élections consulaires de la Chambre de commerce et d’industrie du Mali (Ccim) programmées pour le 17 janvier 2021 sont malvenues. Il convient donc de les renvoyer à une date ultérieure et de mettre la Chambre de commerce et d’industrie du Mali au diapason de la Transition, même s’il faut prolonger le mandat de l’actuel Bureau et lui assigner les tâches inhérentes aux réformes attendues, sous la supervision stricte du département de tutelle.

Amadou Bamba NIANG

Commentaires via Facebook :

2 COMMENTAIRES

  1. Encore un journaliste a la solde des occupants de la Chambre!
    Covid ou pas il n’y’a que des délégués qui votent, loin d’être un vote populaire les élections des chambres. Vous aussi vous voulez votre transition ? C’est devenu une maladie au Mali! Aucune chambre, aucun conseil, ne doit avoir son mandat prolonger pour Covid.
    Les nouvelles régions attendrons pour leur chambre, rien de pressé Ance nouveau car elle n’ont même pas l’essentiel des services qui font d’elles des régions.

  2. Comme à L” APCAM, LES ELECTIONS À LA CCIM PEUVENT BIEN SE DEROULER. ON NE DOIT PAS AVOIR DES FAUX ARGUMENTS POUR LES ANNULER. LES PRÉTEXTES COMME COVID 19 NE TIENNENT PAS POUR SE MAINTENIR À DES PISTES. MÊME LES ELECTIONS PRÉSIDENTIELLES, LÉGISLATIVES QUI REGROUPE NT DES MILLIERS DE PERSONNES SONT PROGRAMMÉES À PLUD FORTE RAISON DES ÉLECTIONS SUI NE TRGROUPENT SUE DES DIZAINES. LE TOILETTAGE DES TEXTES DOIVENT SE FAIRE AVANT CETTE ANNÉE D ÉLECTION.
    Personne ne veut laisser la louche. Les maliens sont trop avisés de pouvoir. Toujours des faux arguments pour se maintenir au haut perchoir. Les mandats sont bien fixés à des dates donc il faut respecter le délai.

Comments are closed.