Crime crapuleux à Sogoniko: Pourquoi a-t-on tué la prostituée Wassa Kanté ?

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    Ce n’est ni un monstre ni un tronc d’arbre oublié par erreur au fond de la chambre par un bûcheron, dont il s’agit, mais plutôt du corps sans vie d’un être humain enseveli dans un matelas, les mains solidement ligotées dans le dos, les pieds attachés, la tête enfouie dans un vieux sac de riz avec autour du cou une bande en étoffe. La découverte macabre a été faite dans le magasin N°4 sis à la rue 221 face à Youma Couture à Sogoniko dans la journée du dimanche, 16 juillet dernier. Pourquoi l’a-t-on tuée ? Qui en est l’auteur ?
    Deux jours durant, dans cette partie de la Commune VI du district de Bamako, une odeur nauséabonde polluait de plus en plus l’atmosphère de nature à gêner la respiration des locataires de l’entourage. L’odeur devenant alors insoutenable, un anonyme se rend au commissariat de police du 7e arrondissement, dans la matinée du dimanche, 16 juillet dernier pour informer l’officier de police de permanence, l’inspecteur de police Seydou Diakité. Celui-ci saisit immédiatement son chef hiérarchique le commissaire divisionnaire de police Abdoulaye Keita dit Léa, qui à son tour, informe le procureur de la République près le Tribunal de la Commune VI et le maire pour la conduite à tenir. Après avis de son procureur, le divisionnaire de police Keita ordonne à l’inspecteur de police Seydou Diakité de se rendre sur les lieux pour les besoins du constat. Ce dernier se fait accompagner par une équipe de policiers, du médecin légiste du centre de santé de référence de la Commune VI, Mountaga Touré et des agents de la protection civile de Sogoniko, composés du sergent-chef Salif Keita, Boubacar A. Traoré, Modibo Kane Diawara, Issa Diaby et Seydou Ouologuem, pour la circonstance.
     
    L’horreur !
    A 11 heures, les policiers et des curieux massés dans la rue 221 à Sogoniko ont assisté à l’incroyable quand l’équipe de la protection civile a défoncé la chambre suspecte. A l’intérieur, le spectacle était on ne peut plus désolant. Un matelas enroulé autour d’un corps humain en état de putréfaction avancée, solidement ligoté, était abandonné à côté des effets d’habillement épars partout dans la chambre. C’est dans cette odeur à la limite irrespirable que la police va procéder à son traditionnel constat au cours duquel elle découvre quelques documents administratifs appartenant à un des occupants des lieux. Les ratures faites au bic sur une copie d’extrait d’acte de naissance retrouvée dans les affaires des occupants de ladite chambre, suscitent plus d’intérêt chez les policiers. Sur ce document, on pouvait constater : « province du Boulgou changé en Sourou », « Département de Garango en Tougan », « Commune de Garango en Tougan », le « Tribunal populaire du département de Garango en Tougan » déclare le nommé Zéba Seydou changé en Bako Christophe demeurant à Sanogo en Diouroun, né en 1987 changé en 1981 de Zéba Hamadou changé en Bako Francis et de Guimpo Damako en Kankouane ». « Fait le 29 mars 1987 en 1982 signé B. Frédéric Nignom, Inspecteur de police. » Les policiers saisissent cet important document pour les besoins de l’enquête. Ce fut le tour au médecin légiste de passer à son diagnostic médical. Selon lui, l’assassinat de la victime remonterait à trois ou quatre jours auparavant. Tout ce rituel terminé, l’équipe funèbre de la mairie de la Commune VI a transporté le corps de la pauvre femme pour sa dernière demeure. Sur place, les policiers apprennent que la maison dans laquelle le corps de la jeune femme a été découvert serait habitée par un jeune Burkinabé du nom de Mohamed. Il exercerait le métier de guide des Blancs et de coxeur de clients pour les cars à la gare routière de Sogoniko. Les documents administratifs seraient également sa propriété. Avec ces informations, de sérieux soupçons commencent à peser sur ce jeune homme dont plusieurs lèvres le suspectent d’être l’auteur principal de l’assassinat de la victime, répondant au nom de Wassa Kanté, une prostituée très connue sur la rive droite du fleuve Niger et domiciliée au Badialan en Commune III du district de Bamako.
     
    Le mobile du crime
    Au commissariat de police du 7e arrondissement, sous la conduite du commissaire divisionnaire de police Abdoulaye Keita dit Léa, l’inspecteur de police de classe exceptionnelle Mamadou Diakité dit Debos ouvre une enquête. Il se fera épauler par la foudre du Kénédougou, l’adjudant-chef de police Tinzié Sanogo de la brigade de recherche et de ses éléments pour percer le mystère du ou des tueurs de la demoiselle Wassa Kanté. Ils procèdent par l’arrestation des deux compagnons du suspect numéro un qui se fait appeler tantôt Mohamed, tantôt Bako Christophe etc. Il s’agit de Ousmane Douno, de nationalité guinéenne et du Malien Ibrahim Haïdara. Un certain Samba Diarra, revendeur de café, voisin immédiat du suspect, est également arrêté dans le cadre de l’enquête. L’ancienne copine de Mohamed, la demoiselle Djénébou Konaté, de nationalité sénégalaise a été interpellée de même que Moussa Théra, le propriétaire du cabaret à partir d’où la victime a été embarquée par ses tueurs. Dans la journée du dimanche, 23 juillet dernier, un autre membre de la bande du Burkinabé tombe dans le filet de l’inspecteur de police de classe exceptionnelle Bébos. Ouvrant alors son enquête, le policier découvre qu’il y a de cela quelque temps, la gare routière de Sogoniko, le jeune Burkinabé Mohamed en sa qualité de guide, aurait volé plus de deux millions de FCFA sur un de ses clients que Wassa Kanté a découvert au moment des faits. On ignore si la prostituée a demandé oui ou non au voleur sa part dans le gâteau. Mais, ce qui est clair, dans la nuit du jeudi, 13 au vendredi, 14 juillet dernier, Mohamed invite la demoiselle Wassa Kanté au cabaret de Moussa Théra, perdu dans un coin, derrière la gare routière de Sogoniko. Car, se dit-il, il faut faire taire « cette indiscrète de prostituée en la liquidant physiquement pour se protéger contre toute dénonciation pouvant conduire à son arrestation par la police où il est connu dans les archives pour ses activités délictueuses. Il lui fait avaler plus de six bouteilles de bière au cabaret de Théra. Sachant que sa proie était ivre morte, Mohamed la fait embarquer à bord d’un taxi en compagnie d’un de ses compagnons en direction de son domicile à Sogoniko. C’était aux environs de 2 heures du matin, selon des témoignages recueillis dans l’entourage du cabaret. Au même moment, il faut le préciser, le revendeur de café Samba Diarra se trouvait encore à son point de vente, face à la maison de Mohamed. Les deux hommes entrent dans la chambre avec la demoiselle Kanté qui, d’après certaines informations, était en grossesse d’une semaine. Comme on pouvait le penser, ils entretiennent des relations sexuelles avec la prostituée jusqu’à satiété pour abuser de sa confiance. Ensuite, arrive l’épreuve la plus infernale pour la pauvre Wassa Kanté. Ses bourreaux l’étranglent à l’aide d’un mouchoir de tête, attachent ses mains et ses pieds jusqu’à ce que mort s’en suive. Après leur forfait, ils ensevelissent le corps de leur victime dans un matelas avant de vider la maison. Tôt le matin, ils reviennent avec un pousse-pousse en main pour enlever le colis encombrant, simulant un déménagement. Malheureusement, ils n’en peuvent pas, car le colis était tellement insolite qu’il pouvait faire éveiller la curiosité d’un policier ou un simple passant. Ils abandonnent ainsi le corps de la pauvre pour s’évaporer dans la nature. Depuis, le jeune Burkinabé est devenu invisible à la gare routière de Sogoniko, son fief et dans le reste du district de Bamako. Quant à Wassa Kanté, ce n’est que dans la journée du 16 juillet que son corps a été retrouvé en état de putréfaction avancée dans le domicile de ses clients. La malheureuse a été reconnue grâce à son front chauve et à la tresse qu’elle avait faite il y a de cela trois jours seulement.
     
    Sur la piste du tueur burkinabé
    Sous la conduite du commissaire divisionnaire de police Abdoulaye Keita dit Léa, l’inspecteur de police de classe exceptionnelle Mamadou Diakité dit Bedos, épaulé par la foudre du Kénédougou, l’adjudant-chef de police Tinzié Sanogo et ses éléments de la brigade de recherche, déclenchent l’offensive. L’enquêteur principal Mamadou Diakité dit Bedos procède d’abord à l’interrogatoire des personnes interpellées. Toutes celles-ci jurent la main sur le cœur qu’ils ne sont au courant de rien dans cette affaire hautement criminelle. Le Guinéen Ousmane Douno affirme qu’il est effectivement un des collègues de chambre du jeune Burkinabé Mohamed. Six à huit personnes dorment ensemble dans la même chambre, mais jamais deux. Ils sont des Burkinabé, des Guinéens, des Ivoiriens et des Sénégalais, poursuit-il. S’agissant de l’assassinat de la prostituée, il déclare n’être au courant de rien, car, cela faisait quelques jours qu’il ne passait pas la nuit avec ses collègues pour des raisons qu’il se refuse à révéler. Le Malien du groupe, Ibrahim Haïdara et le revendeur de café, Samba Diarra se rétractent eux aussi comme le précédent. Quant à l’ancienne copine de Mohamed, celle-ci, déclare qu’elle s’est séparée du suspect, il y a plus de six mois. Son copain l’aurait abandonné au profit d’une autre fille. Où se planque alors Mohamed ? La police pousse ses investigations. Actuellement, le tueur d’homme ne serait pas à Bamako. Il se trouverait à Diéma dans la région de Kayes chez un de ses proches où il se fait appeler Modibo Nadjo. Comme quoi, le caïd est dans le point de mire de ses poursuivants. Affaire à suivre.

    O. BOUARE

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