Quand l’Ortm escamote l’histoire… IBK devient l’Homme du 22 Mars

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Ironie du sort ou coïncidence d’épisodes historiques, la date du 22 Mars comporte une double signification pour notre pays. Elle incarne à la fois le sacrifice de combattants des libertés martyrisés par le pseudo «républicain»  Moussa Traoré, puis les errements politico pouvoiristes qui allaient coûter au pays un naufrage abyssal de sa démocratie et même de son existence en tant que nation. Ainsi donc, pendant que les uns se recueillent et se confondent dans les reconnaissances aux martyrs, d’autres pourraient avoir trouvé l’occasion de célébrer le déclic d’une consécration, d’un destin présidentiel. À laquelle de ces catégories appartient le président de la République, le bienheureux IBK, qui, selon toute évidence, a enlevé un jackpot avec les événements tragiques du 22 Mars 2012 ?

 

Il n’est pas si difficile de se situer par rapport à la question pour énorme et indéchiffrable que paraisse la confusion qui entoure sa posture. En clair, l’actuel locataire de Koulouba peut se positionner sur les deux registres : sur l’un, parce qu’il a cheminé avec les acteurs de la démocratie malienne et vécu les affres des événements de 1991 : sur l’autre parce qu’il vient d’être porté au piédestal du 22 Mars 2012 par la télévision nationale, l’Ortm, qui pensait l’avoir servi en le présentant comme le véritable acteur du retour à l’ordre constitutionnelle. Pour ce faire, nos fumeux confrères de l’Ortm n’ont pas eu besoin de trop fouiller leurs archives pour y sortir les propos liminaires d’IBK en réaction au putsch, une des rares déclarations politiques ayant été autorisée à la diffusion à l’époque.

 

 

L’élément en question insiste en substance sur la condamnation du coup de force par IBK et fait étalage, non sans dose de subtilité, des grandes convictions démocratiques du prince du jour. Seulement voilà ! Pour une aptitude alchimique, c’aura vraiment été une prouesse de la part de l’Ortm. Procédant par escamotage, la chaîne nationale a délibérément passé sous silence des pans entiers d’une déclaration pourtant équivoque, qui caresse la junte dans le sens du poil par des propos plutôt très mesurés par endroit.

 

«Je comprends votre désarroi», a dit IBK, en s’adressant  par la même occasion aux mutins, en laissant s’échapper par ailleurs cette séquence qui en dit long sur ses affinités politiques et sa convergence de vue avec les putschistes : «Je vous demande de faire confiance au peuple du Mali pour que le changement que vous avez souhaité, que nous souhaitons tous, se fasse dans un cadre démocratique».

 

 

Comme on le voit, la condamnation du coup de force contre ATT est nettement relativisée dans la déclaration du président du Rpm, même si l’effort de préserver son image de démocrate le dispute au besoin de contenter le Camp Sundiata.

Les épisodes ayant suivi n’illustrent pas une tendance différente, et pour cause. Après la signature de l’Accord-cadre, son rapprochement avec les ramifications politiques de la junte s’est progressivement renforcée. Au point que l’apport de l’armée ait été prépondérante dans son électorat et qu’il ait, lui-même, commis le lapsus d’affirmer en langue bambana, entre les deux tours de la présidentielle, que «tout le monde sait combien le coup d’Etat a sorti le Mali du gouffre».

 

Ainsi, en insistant pour faire passer IBK pour l’ «Homme» du 22 Mars, l’Ortm ne cause pas seulement du tort à ceux qui se sont ouvertement battus, à leur risque et péril, pour le retour de l’ordre constitutionnel au Mali.

L’Ortm prouve du même coup que le président de la République éprouve un grand besoin de lever les équivoques et zones d’ombre qui planent encore sur la nature de ses rapports avec la junte putschiste.

Abdrahmane Kéïta

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5 COMMENTAIRES

  1. Très belle analyse Mr le Journaliste! Le DG de l’ORTM n’a pas le choix de toutes les façons , s’il ne le fait pas ainsi , il sera remplacé le conseil des ministres prochain. Encore une fois , la télévision publique sert juste à faire accepter les projets ou décisions du pouvoir central ! En un mot l’ORTM est une chaine de propagande!

  2. les Corses de Pasqua conseillent désormais le président malien 👿 👿 👿 👿 😥 😥 😥 😥 😥 😥 😥

  3. Lieutenants de Charles Pasqua en Corse et en Afrique, Michel Tomi et son fils Jean Baptiste, sont devenus les plus proches conseillers du président malien, Ibrahim Boubacar Keita, surnommé IBK. Elu dans la foulée de l’opération militaire française “Serval”, IBK a toujours été présenté comme…le candidat de la France. Ce n’est un secret pour personne que la diplomatie française, Laurent Fabius en tète, a soutenu la candidature d’IBK.

  4. C’est vraiment un étrange téléscopage auquel on assiste entre les réseaux les plus éculés de la Françafrique et les relais politiques de Hollande et Fabius à Bamako. Entre truculence et magouilles, les patrons de jeux et de casinos corses, traditionnellement proches de Charles Pasqua, viennent de mettre la main sur le casino de Bamako avec l’appui bienveillant de la présidence malienne, qui les consulte désormais régulièrement.

    Au cinéma les amis corses de Charles Pasqua, les Feliciaggi et les Tomi, joueraient le rôle des mauvais garçons : de lourdes paupières, des lèvres épiasses, des visages figés. Leur impassibilité est traversée parfois par une lueur d’intelligence, baptisée en Corse, “le vice du berger”, ou encore “le vice du renard”. Ce sont eux qui depuis un quart de siècle ont fait main basse sur l’industrie du jeu dans les principales capitales de l’Afrique francophone. Eux encore qui ont été mis en cause dans plusieurs procédures judiciaires pour avoir aidé Charles Pasqua à la tète du mouvement qu’il avait créé, le RPF.

    Ainsi Robert Feliciaggi, abattu voici quelques années de quelques balles sur le tarmac de l’aéroport d’Ajaccio, devait renflouer en 1999 les comptes de la patronne du PMU gabonais, Marthe Mandolini, la fille de Michel Tomi (qui refait surface à Bamako). Il s’agissait alors pour l’amie Marthe d’aider « Monsieur Charles » (Pasqua) à recevoir un prèt de sept millions et demi pour renflouer le RPF.

    Les Tomi, le retour

    Or Michel Tomi et son fils Jean Baptiste, sont en train de réussir un formidable retour au Mali. Non seulement ils ont désormais les clés du casino de Bamako, mais ils conseillent le nouveau président malien, IBK, qui les consulte à tout propos. Empereur des jeux et des casinos en Afrique, Michel Tomi, qui tutoie Pasqua, n’est pas un perdreau de l’année. Condamné dans la débâcle du casino de Bandol en 1996 à un an de prison, une peine confirmée par la Cour de cassation, cet honnête garçon avait obtenu du juge d’application d’Ajaccio un régime de semi liberté.

    Ce retour en force à Bamako des Tomi, père et fils, n’a pas manqué d’agacer fortement un certain nombre de diplomates et de coopérants occidentaux qui pensaient que l’ère de la françafrique était révolue. Vieux cheval de retour de la politique malienne, IBK, voulait-on faire croire au quai d’Orsay, était un homme neuf.

    Plus troublant, ce retour en force des corses intervient au moment où le président malien semble sombrer dans le clientélisme et le contrôle de l’argent public à son profit. Lors d’un récent conseil des ministres, il a annoncé que dans chaque ministère un homme de confiance de la présidence veillerait aux appels d’offre et aux dossiers impliquant les finances de l’Etat.

    Plus que jamais, la vie politique malienne reste un formidable ascenseur social pour le clan de la présidence. Cette démocratie d’opérette prépare des lendemains qui déchantent. Qui s’en soucie à Paris, où le Mali est passé de mode ?
    😥

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