Cablegates ou les murmures de l’oncle Sam de Amadou Wane

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Dans la lutte contre la drogue, la Police malienne admet que ses capacités sont limitées. La Brigade des stupéfiants de la police nationale, employait en 2009 seulement 24 officiers pour tout le Mali (1ère partie)

En 2009, la presse malienne qualifia Andrea Tsakiris comme l’un des trafiquants de drogue les plus recherchés sur la planète. Un tribunal français de Rennes avait émis un mandat d’arrêt international pour le double ressortissant grec-français suite à la saisie de 3,2 tonnes de cocaïne en Guinée-Conakry. Interpol informa les autorités maliennes que Tsakiris était probablement au Mali. La Brigade d’Investigations Judiciaires (BIJ) l’arrêta moins de 48 heures plus tard.

La police malienne utilisa des techniques d’enquête relativement simples pour localiser et appréhender le dealer. Le directeur de la police nationale de l’époque, Hamidou Kansaye, déclara que Tsakiris était « prudent » dans son comportement et était clairement au Mali en tant que fugitif. Kansaye ajouta que Tsakiris a su déjouer la surveillance en évitant les hôtels et la pratique courante de compter sur un chauffeur de taxi préféré. Mais il continua d’utiliser son téléphone cellulaire. Après avoir obtenu ce numéro, la BIJ demanda à la compagnie de télécommunications d’identifier les tours cellulaires à travers la ville où les signaux du portable avaient été reçus. Cette information a permis à la BIJ de déterminer où se trouvait Tsakiris. Il fut appréhendé peu de temps après.

Tsakiris était en possession d’un passeport français au moment de son arrestation. La validité du passeport fut confirmée par les autorités françaises. Il avait aussi  en sa possession un passeport guinéen sous un autre nom. Avec la corruption, les trafiquants de drogue peuvent obtenir facilement les documents d’identité guinéens. L’arrestation de Tsakiris a eu lieu dans le contexte d’un problème de drogue auquel sont confrontées les autorités maliennes. Selon Kansaye, les saisies de drogues et les arrestations qui y sont liées ont considérablement augmenté. Il nota que les drogues saisies sur le sol malien ne sont généralement pas consommées localement, à l’exception de la marijuana. Kansaye dit que plus de la moitié des chauffeurs de taxi à Bamako consomme la marijuana. La plupart de la marijuana saisie au Mali provient du Sénégal ou de la Mauritanie, alors que la cocaïne qui traverse le pays se dirige généralement vers l’Europe.

En 2009, il y avait peu de violence liée à la drogue, peut-être parce que Bamako n’était qu’un des nombreux points de transit en Afrique de l’Ouest. Kansaye déclara que la plupart des trafiquants de drogue passant par le Mali ne sont que des mules payées de petites sommes d’argent pour transporter les drogues et servir en tant qu’intermédiaires. Les barons de la drogue qui contrôlent le trafic sont ailleurs. Le potentiel pour la violence liée à la drogue augmente chaque année en raison de l’arrivée récente du crack. Kansaye prédit que le crack pourrait prendre racine au Mali plus vite que les autres formes de drogue. Une pierre de crack coûtait 1000 FCFA en 2009. C’était la première drogue à apparaître sur le marché et accessible au malien moyen. “Tout le monde pouvait l’acheter”, disait Kansaye. Puis, le crack peut être développé localement. Selon l’ancien directeur de la Police, le taux de chômage très élevé parmi les diplômés, fait qu’il y’a beaucoup de « chimistes avec des diplômes mais pas d’emplois ».

Le manque de formation rend le travail de la BIJ inefficace. Kansaye expliqua que les officiers de la brigade de Kidal saisirent 750 kilogrammes de cocaïne. Lorsque la drogue fut ramenée à Bamako, la police découvrit que la « cocaïne » était en fait de la marijuana. La contrebande capturée avait été mal identifiée. Les officiers laissent parfois passer de la drogue simplement parce qu’ils ne peuvent pas l’identifier proprement.

Malgré le succès avec l’arrestation de Tsakiris, la Police malienne admet que ses capacités sont limitées. La Brigade des stupéfiants de la police nationale, employait en 2009 seulement 24 officiers pour tout le Mali. Pour accroître les capacités de la BIJ, il est impératif de former assez d’agents pour combattre le fléau de la drogue.

Amadou O. Wane

Collaborateur externe,

Floride, Etats-Unis

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