Projets routiers “prioritaires” du Mali : Montages financiers grotesques, douteux et scabreux

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Le président de la République a initié des projets routiers visant à désenclaver plusieurs localités du pays. L’intention est louable car les populations et l’activité économique souffrent, en toutes saisons, du mauvais état des voies de communication. Toutefois cette opération de désenclavement a été l’occasion de montages financiers douteux et scabreux avec comme résultat une énorme évaporation financière au détriment du contribuable malien. Le Parti pour la Renaissance Nationale (PARENA), qui était en conférence de presse le week-end dernier, répond à la question par l’affirmative ! Encore des surfacturations ? Lisez plutôt ce qui suit.

 

Cinq projets de route et un pont (celui de Kamankolé à Kayes) constituent les PPP (projets prioritaires du président) qui sont gérés par une coordinatrice des projets prioritaires sous l’autorité du Directeur national des routes (DNR)

Les PPP ont deux caractéristiques principales :

  • ils sont financés par le budget national ;
  • les marchés ont été attribués à la suite de “consultations restreintes” qui ont ouvert la voie à d’énormes surfacturations et à des détournements de deniers publics.

Interrogés, plusieurs spécialistes travaillant dans le secteur des routes ont répondu que le coût maximum du kilomètre de bitume au Mali ne saurait excéder 250 millions de francs CFA quelle que soient  la qualité et l’épaisseur du goudron. Or le kilomètre de goudron pour la seule route qui va relier le Bankoni à Nonsombougou coûtera au contribuable malien plus de 495 millions de francs CFA.

Les projets prioritaires et leurs coûts

  • Deuxième pont de Kayes : long de 532,65 mètres, avec une largeur 26 mètres. Le coût des travaux est 36 milliards 588 millions FCFA. En outre, 16,7 kms de voies d’accès seront réalisés à environ 19 milliards de francs CFA
  • Route Bankoni-Nonsombougou : 56 kilomètres à 27 milliards 730 millions de francs CFA;
  • Route Kangaba-Frontière guinéenne : 52 kilomètres à 19 milliards 437 millions francs CFA ;
  • Route Kayes-Sadiola : 90 Kilomètres à 42 milliards 478 millions de francs CFA;
  • Route Yanfolila-Kalana : 52 kms à 18 milliards 829 millions francs CFA;
  • Route Baraouéli-Tamani : 30, 6 kilomètres à 7 milliards 223 millions.

Ces montants sont beaucoup plus élevés que les enveloppes inscrites au budget d’État 2017 au titre des infrastructures routières. Jugez-en:

  • Le pont de Kayes: 48 milliards FCFA au lieu des 55,5 conclus avec les entreprises ;
  • Bankoni-Nonsombougou : 17 milliards contre 27, 7 concédés à l’entreprise ;
  • Kangaba-Fr Guinéenne : 13,5 contre 19,5 milliards négociés avec l’entreprise ;
  • Yanfolila-Kalana : 13 milliards d’inscription budgétaire contre 18,8 convenus avec l’entreprise ;
  • Baraouéli-Tamani : 5 milliards inscrits au budget contre 7,2 conclus avec l’entreprise chargée des travaux.

Les dépassements se passent de commentaires : 29, 5 milliards de francs CFA !

Opacité des procédures de passation

La passation des marchés des PPP s’est faite sur fond d’entente entre les donneurs d’ordre et les bénéficiaires pour alimenter une caisse noire destinée à financer les prochaines campagnes électorales. On a procédé à des “consultations restreintes” qui n’étaient, en fait, que des grés à gré déguisés. Selon plusieurs sources, il a été imposé aux entreprises des ristournes d’au moins 15% des montants des marchés. Ainsi les entreprises se sont engagées à “cotiser” des sommes colossales: entre 1 et 5 milliards de francs CFA.

Plusieurs exemples d’infrastructures confortent les soupçons de surfacturations.

✔️ le  2eme pont de Kayes avec 532m de long et 26m de large coutera 36 milliards de FCFA au contribuable. Le pont le plus long jamais construit au Mali est celui de Sotuba ; il est long de 1616m sur 24m et a couté 30 milliards ; 6 milliard de moins que le pont de Kayes qui fait moins du tiers de sa longueur.  Par ailleurs, les voies d’accès au pont de Kayes battent tous les records de coût. Le kilomètre de voie d’accès  sera facturé à plus d’1 milliard de FCFA.

✔️la corruption coûte cher au peuple malien ; pour preuve, les projets routiers financés par les partenaires financiers du Mali – et soumis à une passation de marché régulière – coûtent nettement moins chers. Par exemple,  la route Zantiébougou-Kolondiéba-Frontière Côte d’Ivoire lancé en Novembre 2016 par le président IBK coûtera 70 milliards pour 145 Km de routes et voies bitumées, 100 Km de pistes rurales, un poste de contrôle avec scanner, l’installation des pèses-essieu, la réalisation ou réhabilitation d’écoles et centres de santé, aux abords du corridor, et la construction d’un marché à bétail à la frontière Mali-Côte d’ivoire.

Conclusion

Le PARENA, comme tous les Maliens, est favorable à la construction de ponts et au bitumage des routes pour réduire les souffrances du peuple en facilitant la circulation des personnes et des biens. Mais les conditions dans lesquelles les présents projets présidentiels sont réalisés relèvent tout simplement de l’indécence. Des populations parmi les plus pauvres au monde sont dépouillées de façon éhontée de leurs maigres ressources publiques.

Le PARENA invite le chef de l’État à ne pas couvrir de son autorité ces dilapidations grossières des deniers publics. Ces marchés doivent être revus et les travaux payés à leur juste coût. Il est possible de réaliser ces routes à moindre coût sans saignée des faibles ressources du Mali.

En ce mois béni du Ramadan, mois de partage et de solidarité, le PARENA invite le Gouvernement à avoir de la compassion pour le peuple malien en mettant fin aux surfacturations grossières qui sont constitutives de crime contre le peuple.

Il exhorte l’Assemblée Nationale à diligenter une enquête parlementaire pour faire toute la lumière sur les conditions de financement des PPP.

Enfin, il exige la démission immédiate de tous les responsables impliqués dans le montage des dossiers et la passation des marchés des PPP.

Rassemblés par Salif Diallo

 

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3 COMMENTAIRES

  1. PPP (Partenariat Public Privé) est le nouveau moyen déguisé par les chefs d’État africains pour se faire de l’argent. Je l’avais dit ici même que ces marchés sont hyperfactures pour préparer la caisse noire de la campagne de IBK. VIVEMENT une enquête parlementaire.

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