Peut-on encore sauver « le soldat IBK » au Mali ?

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Des trois premières années du quinquennat du président malien Ibrahim Boubacar Keïta, dit « IBK », émerge le sentiment d’une énorme espérance trahie. Deux chiffres suffisent à eux seuls pour bien traduire la crise de gouvernance actuelle au Mali qui a succédé à l’installation en grande pompe, le 19 septembre 2013, d’IBK dans ses fonctions, en présence d’une vingtaine de chefs d’Etat, parmi lesquels le président français François Hollande et le roi Mohammed VI du Maroc.

Ancien dirigeant de la Fédération des étudiants d’Afrique noire en France (FEANF), le camarade IBK en est à son troisième premier ministre depuis 2013. S’il n’a pas encore connu le même sort que ses prédécesseurs Oumar Tatam Ly (2013-2014) et Moussa Mara (2014-2015), congédiés sans ménagement, l’actuel chef du gouvernement, Modibo Keïta, nommé en janvier 2015, s’est vu imposer pas moins de quatre remaniements ministériels en vingt mois.

Corruption à tous les étages

Le second chiffre achève de convaincre de l’ampleur de l’instabilité institutionnelle au Mali, elle-même signe d’une présidence à vue : le secrétariat général de la présidence de la République, un des postes les plus proches du chef de l’Etat, en est à son troisième titulaire avec la nomination, le 29 août, de l’ancien ministre de la défense Soumeylou Boubèye Maïga.

En cette deuxième partie de quinquennat, la gouvernance économique n’a guère été plus brillante que le volet politique. En effet, il ne se passe quasiment plus un trimestre sans son lot de scandales de corruption ou de surfacturation. On n’en retiendra que deux des plus emblématiques. Il s’agit d’abord de l’acquisition, en avril, au profit des forces de défense et de sécurité de 42 véhicules tout-terrain pour un coût global de 2,3 milliards de francs CFA (3,45 millions d’euros), soit plus de 50 millions de francs CFA (76 000 euros) l’unité.

Mais le gouvernement malien est resté de marbre face aux critiques virulentes de l’opposition et à ses exigences de transparence sur les conditions de passation de ce marché public.

L’autre grande affaire controversée de cette moitié de quinquennat porte sur les conditions de la révision, au mois d’août, à Bâle, en Suisse, de l’avion présidentiel, le Boeing 737 acheté pour près de 30 millions d’euros en 2013 à travers un montage financier associant la société ad hoc Mali BBJ Limited ainsi que des hommes d’affaires et des sociétés écrans installées entre la France, Hongkong et les Antilles britanniques.

Enfin, pour ne rien arranger à l’image du régime, le nom du président malien revient régulièrement dans l’enquête ouverte en 2014 en France contre l’homme d’affaires français Michel Tomi, propriétaire du casino Fortune’s Club à Bamako, la capitale malienne.

Fuite en avant

Elu sur la promesse, notamment, de restaurer l’honneur du Mali bafoué par les djihadistes et la rébellion armée, IBK est à la peine dans le règlement de la crise que connaît le nord de son pays. L’espoir suscité par la signature, en février 2015, de l’accord d’Alger s’est volatilisé. Minés par des querelles internes, les groupes armés membres de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) n’ont pas accompli leur part du chemin pour permettre la mise en œuvre effective de l’accord de paix. Bamako, de son côté, n’a pas fait mieux en entretenant des relations ambiguës avec le groupe d’autodéfense touareg Imghad et alliés (GATIA).

Résultat, à Kidal, près de la frontière algérienne, les ingrédients d’une guerre civile se mettent progressivement en place, sous le regard attentiste du pouvoir malien réduit à en appeler à la retenue des belligérants.

Au centre du Mali, la situation est tout aussi explosive depuis l’annonce officielle, en janvier 2015, de la création par Amadou Koufa du Front de libération du Macina (FLM) se réclamant de l’ethnie peule. Le FLM avait revendiqué, entre autres, l’attaque en janvier de cette même année de la ville de Nampala et l’incursion, le 2 septembre 2016, dans la localité de Boni.

Comme en mai 2014 après la déroute de Kidal, IBK a réagi aux deux derniers revers militaires en limogeant les ministres de la défense, le colonel Ba NDaou, puis son successeur, Tiéman Hubert Coulibaly.

1300 morts en trois ans

Selon un décompte établi par le Parti pour la renaissance nationale (PARENA, opposition) de Tiébilé Dramé, près de 1300 personnes (civils et militaires) ont été tuées en trois années au Mali du fait de la rébellion et du terrorisme. Alors que ses adversaires politiques redoutent l’effondrement du pays sous l’effet conjugué de la mauvaise gouvernance, de la rébellion et du terrorisme, IBK, lui, reste convaincu qu’il n’y a aucun péril en la demeure. Il était d’ailleurs tranquillement assis au premier rang, mardi 27 septembre, à Libreville lors de l’investiture de son homologue gabonais Ali Bongo Ondimba. C’est cette assurance que tout va bien au Mali comme dans « le meilleur des mondes » qui rend le « sauvetage du soldat IBK » beaucoup plus problématique que celui « du soldat Ryan », réussi avec brio en 1998 dans le long-métrage de Steven Spielberg.

En tout cas, il reste à l’ancien leader de la FEANF deux années pour redresser la barre ou laisser le Mali continuer sa descente aux enfers.

Par Seidik Abba (chroniqueur Le Monde Afrique)

LE MONDE

Commentaires via Facebook :

4 COMMENTAIRES

  1. Bonjour,
    Merci à tous/toutes pour vos contributions.

    J’ai appelé toutes les parties prenantes (CMA, PLATEFORME/GATIA et ÉTAT MALIEN) et tous les acteurs (MÉDIATION,ONU/MINUSMA, PARTENAIRES, CITOYENS, PARTIS POLITIQUES, …) à prendre leurs responsabilités et à s’engager clairement (en étant crédibles et en jouant sur cette crédibilité), sérieusement et sans complaisance pour une mise en œuvre diligente et rapide de l’accord de paix.

    On n’obtiendra une paix durable en toute quiétude que lorsque chacun(e) prendra et assumera ses responsabilités.

    ENGAGEONS-NOUS, TOUTES LES PARTIES PRENANTES ET TOUS LES ACTEURS, CLAIREMENT EN ÉTANT CRÉDIBLES, SÉRIEUSEMENT ET SANS COMPLAISANCE POUR UNE MISE EN ŒUVRE DILIGENTE ET RAPIDE DE L’ACCORD DE PAIX AFIN DE GARANTIR UNE SÉCURITÉ ET UNE PAIX DURABLES DANS UN MALI UN ET INDIVISIBLE.

    Cultivons la confiance à travers des relations claires et crédibles entre toutes les parties prenantes et entre tous les acteurs.

    Bien cordialement
    Dr ANASSER AG RHISSA
    Expert TIC, Gouvernance et Sécurité
    TEL 00223 95 58 48 97

  2. LEKESSE il ya quelques instants
    IL Y A DE CES HOMMES DONT LE COMPORTEMENT TERNIT L’IMAGE D’UNE NATION
    D’UN PEUPLE
    D’UN PAYS…IBK A TERNI L’IMAGE DU MALI

    QUELLE INDÉCENCE
    J’AI DÉJÀ ÉCRIT SUR LE FORUM QUE IBK NE CONNAIT PAS LE MALI
    OU QU’ IL NA PAS CHERCHÉ À CONNAITRE LE MALI.

    IBK SE MOQUE ÉPERDUMENT DES MALIENS ET DU MALI.
    IBK ENFERMÉ DANS SON MONDE IMAGINAIRE
    ENFERMÉ DANS SON DÉNI TOTAL

    LES ÉTRANGERS EN L’OCCURRENCE LES MEMBRES DE LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE SAVENT QUE LE MALI SOUFFRE ET QUE LES MALIENS SUBISSENT AUJOURD’HUI LES PLUS GRANDES DIFFICULTÉS DEPUIS L’INDÉPENDANCE.

    QUELLE FOUTAISE
    QUELLE INSOLENCE

    UN HOMME RUINÉ ET AFFAIBLI PAR LA MALADIE
    TRÈS MALADE AVANT D’ÊTRE ÉLU
    UN HOMME HÉLAS DÉCONNECTÉ DE LA RÉALITÉ.

    IL NE RESTE QU’ A PRENDRE NOS RESPONSABILITÉS EN TANT QUE NATION FACE À CETTE MOMIE..INSENSIBLE AUX PROBLÈMES ACTUELS.

    UN HOMME GELÉ PAR LES SÉDATIFS LES ANTI DOULEURS..ADMINISTRÉS PAR LES INFIRMIERS FRANÇAIS MAROCAINS ET TURCS

  3. IBK est un soldat et le peuple se doit de rester à son chevet pour l’assister et l’aider pour tout ce qu’il est entrain d’œuvrer pour sauver le Mali.

  4. Le Mali doit Continuer la collaboration avec les États Unis, Éclaircir sa position par rapport au GATIA et Arrêter la relation avec le GATIA, si elle existe, pour plus de crédibilité

    Bonjour,

    La déclaration de l’ambassadeur des États Unis va dans le sens de l’accord de paix mais il doit veiller à l’équilibre entre parties prenantes au risque de créer une incompréhension et une insatisfaction généralisées, il est judicieux :

    – de ne pas faire porter tout le tort au Gouvernement Malien qui n’est qu’une partie prenante à l’accord de paix qui exige un compromis sur tous les sujets entre les parties prenantes et

    – d’adopter une attitude à équidistance entre les parties prenantes, en particulier entre les groupes armés Maliens non terroristes.

    Félicitations pour le soutien des États Unis au processus de mise en œuvre de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation au Mali issu du processus d’Alger.

    En effet, l’Ambassadeur des États Unis au Mali, au nom du Gouvernement des États-Unis, a réaffirmé son plein soutien au processus de mise en œuvre de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation au Mali issu du processus d’Alger et a appelé toutes les parties à respecter scrupuleusement leurs engagements et les assure de leur détermination à appuyer leurs efforts dans ce sens.

    Les États Unis sont dans le même cas que l’État Malien, ce dernier, en plus d’être partie prenante, doit aussi veiller, dans ses prises de position ou dans ses agissements, à l’équilibre entre la CMA et la Plateforme sauf si un de ces regroupements ou au moins un de ses membres a commis des dérives avec des conséquences négatives sur la mise en œuvre de l’accord de paix ou sur la sécurité des populations ou du pays.

    Juste par la présence de GAMOU dans l’armée Malienne et chef de la communauté Imghad constituant à majorité le GATIA, le soupçon du lien de l’État Malien avec le GATIA peut être fait.

    C’est ainsi que l’État Malien doit faire attention à deux attaques :

    – celle de ceux qui l’accusent, comme les États Unis, ou pourront l’accuser d’être en relation avec le GATIA : il doit, donc, éclaircir sa position par rapport au GATIA (arrêter la relation avec le GATIA, si elle existe, pour plus de crédibilité), et

    – celle de ceux qui pourront l’accuser de ne pas bien jouer son rôle de garant de la mise en œuvre de l’accord de paix ou que les fruits de cet accord ne soient pas visibles sur la résilience des populations Maliennes, des régions, des communes et du pays, face à l’insécurité et à la prise en charge de leurs problèmes.

    Ce n’est pas parce qu’un acteur, ici les États Unis, faisant partie, d’ailleurs, de la médiation internationale, a pris une position sans complaisance (à eux de justifier leur position si le Mali en fait la demande) par rapport à une partie prenante (cas de l’État Malien) qu’il faille arrêter toute collaboration avec lui : d’autres acteurs diront ou insinueront la même chose compte-tenu de la position de GAMOU (dans l’armée Malienne et en liaison avec sa communauté Imghad créatrice du GATIA).

    Dommage que les États Unis n’aient pas pris de position par rapport à la CMA.

    Actuellement, il ne s’agit plus de savoir qui supporte ou pas l’accord de paix mais comment s’unir, indépendamment des bords politiques, autour de la mise en œuvre de cet accord pour résoudre les problèmes du Mali.

    Bien cordialement
    Dr ANASSER AG RHISSA
    Expert TIC, Gouvernance et sécurité

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