Affaire Ras Bath : Libéré et muselé !

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Le conseil de défense du sulfureux animateur de la Radio  Maliba FM,  Mohamed Youssouf Bathily alias ‘Ras Bath’, était face aux médias, vendredi après-midi, dans le cadre d’une conférence de presse de clarification au lendemain de sa libération après 72 heures de détention par les services juridiques de la gendarmerie. En faisant des mises au point sur la nature du dossier, le trio d’avocats menés par Me Maliki Ibrahim a affiché une grande sérénité quant aux chances de leur client de triompher des accusations, quoiqu’il se retrouve sous le coup d’un contrôle judiciaire très contraignants que la défense s’est gardée de décliner secret de l’instruction oblige, explique-t-elle.

Selon Me Maliki Ibrahim du cabinet ’Zahara Noor’, l’animateur, au bout du délai légal de détention et des enquêtes préliminaires, s’est finalement retrouvé devant le juge d’instruction du 4è cabinet du Tribunal de la Commune IV avec qui avait l’éventail de choix suivant :  l’élargir pour insuffisance de preuves des faits retenus dans le chef d’inculpation, le détenir préventivement en le poursuivant ou le poursuivre non-détenu. Comme il est loisible de le comprendre, c’est la dernière alternative qui a été retenue par l’instruction, mais en atténuant cette faveur par une kyrielle de mesures contraignantes. Secret de l’instruction oblige, ni Me Maliki ni ses jeunes confrères Abdramane Touré et Zana Koné n’ont voulu être loquaces sur lesdites mesures, mais à l’évidence  le contrôle judiciaire va peser lourdement sur l’activité professionnelle de l’animateur de Maliba FM et son auditoire. Recoupements faits, il nous revient en effet que l’intéressé sera sevré d’antenne et même de prise de parole publique aussi longtemps qu’il sera maintenu dans les liens de la prévention. Ce n’est pas tout. Ses mouvements, de même source, seront sous strict contrôle du juge d’instruction car il ne pourra même plus franchir le seuil des frontières de sa commune de résidence (la Commune IV) sans autorisation. Même l’usage des réseaux sociaux lui est interdit, nous a-t-on confié. Une libération aux relents de condamnation au musèlement ! C’est manifestement la formule activée contre ‘’Ras Bath’’, lequel a dû même donner des gages de bonne, à en juger par un appel à l’accalmie rendu public en son nom par son conseil d’avocats.

 

Ces derniers affichent néanmoins une grande sérénité quant à la teneur des 58 chefs d’inculpation retenus contre leur client, lesquelles accusations vont de l’outrage à l’autorité publique dans l’exercice de ses fonctions à la démobilisation de l’armée, en passant par l’atteinte publique à la pudeur, entre autres infractions déclinées dans le Code pénale et de procédures pénales en ses articles 224, 147 et 148. Des charges sur lesquelles  les avocats émettent des réserves d’autant qu’elles tiennent lieu à leurs yeux d’une extension du motif initial d’ouverture de l’enquête, à savoir : des échanges de propos peu amènes par voie de presse.

Tout en se réjouissant par ailleurs des conditions respectables de sa détention, la défense de ‘’Ras Bath’’ estime, quoi qu’il en soit, que le dossier est vide sur toute la ligne. «Mohamed Youssouf Bathily a été voué aux gémonies et présenté sur les antennes nationales comme un comploteur, un apatride, mais tout cela n’est qu’une tempête dans un verre d’eau», a estimé Me Maliki Ibrahim. Et de laisser entendre que toute l’action de son client est plutôt motivée par un attachement aux intérêts patriotiques bien compris.

En définitive, les accusations ayant trait à la démobilisation de l’armée comme celles en rapport avec la pudeur sont balayées d’un revers de main par la défense, qui les a assimilées à des contre-vérités fantaisistes. Quant aux présomptions de torts et offenses faits à des individus, la défense se dit étonnée que lesdites récriminations puissent figurer parmi les chefs d’accusation retenus contre ‘Ras Bath’ alors même qu’aucune plainte n’émane des nombreuses personnes victimes énumérées par l’acte d’accusation.

En attendant un éventuel dénouement au prétoire, on peut retenir de l’affaire ‘Ras Bath’ qu’elle emprunte un cheminement qui commence à faire jurisprudence dans le traitement des infractions commises par voie de presse : le contournement de la loi sur le délit de presse au profit de l’infraction de droit commun. Animateur à Radio Maliba FM, ‘Ras Bath’ aurait sans doute prêché dans le désert sans canal médiatique et sans la caution du premier responsable de la radio complètement ignoré dans l’action judiciaire déclenchée par les autorités. Comme il est loisible de le constater, l’intention de dissocier les faits du délit de presse est manifeste et le procédé est d’autant plus subtile qu’elle débouche sur un isolement de  l’individu du reste de la corporation et porte un coup à la liberté d’expression en épargnant celle de la presse.

Ce n’est pas la première fois que l’autorité judiciaire a recours à une telle manœuvre. La sulfureuse affaire de ‘’Maitresse du président’’ avait été en son temps instruite sur la base des mêmes infractions de droit commun et en se réservant d’appliquer la loi sur la presse qui offre plus de marges et d’avantage à la profession.

A KEITA

 

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