Accusé de fraude sur l’identité : un ivoirien de père malien condamné à six mois de prison ferme par le tribunal de Sinfra

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    Le tribunal de Sinfra, en son audience de ce mercredi 17 octobre 2007 a condamné M. Dicko Fousseni à 6 mois de prison ferme et 10.000 francs CFA a-t-on appris de sources proches du Rassemblement des républicains (RDR) de Sinfra. Il est reproché au jeune homme d’avoir fraudé sur la nationalité Ivoirienne.

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    M.Dicko Fousseni a été interpellé le lundi 15 par des agents du commissariat de police de Sinfra et déféré au parquet le mardi, affirme notre source qui précise que cela s’est fait sur « une dénonciation calomnieuse des jeunes patriotes » de la ville. Le procès, contrairement aux habitudes locales a été programmé le mercredi 17, faisant planer des doutes sur les vraies motivations de la brusque célérité du tribunal.

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    A la barre, Dicko Fousseni (45 ans) interrogé reconnait la nationalité malienne de son père, Séré Dicko (originaire de Kayes) établi en Côte d’Ivoire depuis 1952. Après Boundiali au Nord Sénoufo de la Côte d’Ivoire où il a épousé une Ivoirienne, Traoré Tako, il est descendu à Mbengué non loin du Mali sur la route nationale puis à Sinfra où il gère un commerce de pagnes et marchandises diverses et une plantation. Depuis deux ans, Séré Dicko garde le lit, suite à une crise d’hypertension sévère qui l’a presque paralysé. Et c’es son fils qui gère tant bien que mal ses affaires en déclin depuis le début de la crise ivoirienne.

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    Sinfra, 78 km de Yamoussoukro en allant vers l’Ouest, est la capitale du département portant le même nom, dans la région de la Marahoué (Bouaflé) peuplée essentiellement de Gouro, un peuple d’ordinaire pacifique qui vit de la culture du riz et de la banane plantain.        Plusieurs étrangers, venus de toute la CEDEAO, surtout du Burkina Faso et du Mali ont toujours cohabité avec leurs hôtes. Le plus célèbre d’entre eux est sans aucun doute El Hadj Sékou Baradji qui y a fondé une véritable dynastie respectée de tous. Ces étrangers se sont donnés à l’agriculture (café – cacao) et autres cultures vivrières, mais aussi au commerce et au transport. Comme les Dioulas Ivoiriens, ils sont en général musulmans et habitent «Dioulabougou», le quartier où l’on trouve le marché. Nombre des familles dioulas de Sinfra ont qui une mère, qui une grand-mère Gouro.

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    Cette cohabitation pacifique prendra son premier coup dur avec l’Ivoirité, un concept créé par l’ex-président Bédié, alors en lutte contre Alassane Dramane Ouattara. Aux dernières élections, constatant que le RDR avait raflé les trois principales communes de la région de la Marahoué, le Front populaire Ivoirien a fait sienne les principes de Henri Konan Bédié, même s’il ne lui a pas donné de nom. A Sinfra et Oumé, les intimidations et violences ont empêché plusieurs Ivoiriens autres que Gouro a participer aux élections des Conseils généraux.

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    Le tribunal a « oublié » la nationalité de la mère de l’accusé

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    Dicko Fousseni est analphabète. Et c’est grâce à un interprète qu’il essaiera de se faire comprendre par le tribunal rempli de militants du Front populaire ivoirien et du RDR, son parti dont plusieurs membres squattaient les abords du palais de justice. Il explique au Président qu’il lui a suffi, comme la loi le lui autorise, de présenter, outre son extrait de naissance, une photocopie de la carte nationale d’identité de sa génitrice en plus de l’original du sien pour que le Tribunal de Bouaflé lui octroie un certificat de nationalité. C’était en 2005. Malheu-reusement avec des erreurs que Fousseni, illettré n’a pas descellées. En effet, sur ledit document, dans la rubrique « pièces fournies », il est mentionné « CNI du père, Séré Dicko numéro 95097550010, le même que l’on trouve sur la Carte Nationale d’Identité de Fousseni. Cette erreur du Tribunal de Bouaflé fera créer des doutes chez le procureur Nafissatou Bintou Counta de Sinfra qui, oubliant superbement la nationalité de la mère de l’accusé, requiert contre lui quatre mois de prison ferme. Le Président de la cour Affoum Honoré lui infligera deux mois de plus en plus de l’amende.

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    Le réveil de l’ivoirité?

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    L’histoire de Fousseni est celle de millions d’Ivoiriens métissés. Elle remet aussi au goût du jour le concept de l’ivoirité qui a mis le feu au pays d’Houphouët Boigny depuis décembre 1999. Le pouvoir Fpi a créé des « Brigades de lutte contre la fraude » dans les audiences foraines qui, d’ailleurs, n’ont pas encore commencé à Sinfra. Il s’agit, pour des jeunes gens endoctrinés par les idéologues du Front populaire ivoirien du Président Laurent Gbagbo de « veiller à la crédibilité des audiences foraines », comme le déclare si bien M. Zoro Réné, un responsable de ces brigades cité par un confrère de la place.

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    Ces jeunes, recrutés au sein de la galaxie patriotique se transforment en auxiliaires de la police et de la gendarmerie pour déterminer la nationalité de leurs voisins. ET ils ont souvent suivis par les forces de l’ordre et la justice, comme c’est le cas avec l’affaire présente. Dans le cas de Dicko Fousseni, le Tribunal de Sinfra n’a même pas daigné entendre la mère de l’accusé sur sa nationalité. C’est qu’à Sinfra, nul n’ignore l’engagement pour le Rassemblement des républicains (RDR), parti de l’ex-premier ministre Alassane Dramane Ouattara. Et cela, ajouté à son nom « dioula » et à l’origine de son père, suffit pour déclarer qu’il ne peut être que Malien. Même au mépris de la loi fondamentale qui stipule qu’est Ivoirien celui qui est né d’un parent Ivoirien.

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    Kouadio K. Albert (notre Correspondant àYakro)

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