La justice et les justiciables :rnLes magistrats font leur examen de conscience

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    « Les juges sont indépendants de tout sauf de l’argent sale ». Ce retentissant coup de gueule d’un ancien bâtonnier devenu plus tard ministre de la Justice, Garde des Sceaux du Mali, n’est pas passé inaperçu aussi bien au sein de la grande famille judiciaire que dans l’opinion publique nationale. Tout en saluant l’auteur de la célèbre phrase pour avoir affirmé haut et fort ce que beaucoup pensent bas, des observateurs au sein de l’opinion publique nationale et internationale craignaient cependant une joute entre Avocats et magistrats dont les répercussions pourraient être ressenties au niveau des décisions de justice rendues.
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    Contrairement à ce à quoi l’on pouvait s’attendre, à savoir une confrontation des deux augustes corporations, la mise en cause des juges les a plutôt galvanisés pour un examen de fond de leur responsabilité, un redressement salutaire. Conscients de toutes les conséquences des abus dans leur métier, les hommes en toge rouge ont décidé de se mettre à table. C’est du moins l’analyse qu’on peut faire du séminaire organisé le jeudi 13 décembre dernier dans la salle de presse du Centre International de Conférences de Bamako par le Syndicat libre de la magistrature.

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    rnAvec comme thème « Déontologie et éthique de la magistrature », ledit séminaire organisé par le SYLIMA (Syndicat libre de la Magistrature) invitant les Magistrats au respect de la déontologie, passe aux yeux de nombreux usagers de la justice comme un mea culpa de la part des professionnels de la justice. Une remise en question qui n’est que de la poudre aux yeux, quand on sait que les fautes judiciaires semblent atteindre leur summum dans notre pays.  En tant que principaux animateurs de la justice, les magistrats sont sur la sellette, accusés par les justiciables d’être l’incarnation d’une justice à deux vitesses. On cite volontiers en exemple leur inefficacité chronique face aux grands délinquants financiers, comme on le voit à l’issue de certains procès de détournement de fonds publics qui ont marqué ces 16 dernières années.

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    rnC’est ainsi que le procès « Crimes économiques » de l’ex-dictateur de la République du Mali, le général Moussa Traoré et de certains anciens dignitaires de son régime, peut être classé en tête de la liste des fiascos judiciaires de la démocratie malienne. Accusé d’avoir détourné beaucoup des centaines de milliards de francs CFA, la justice n’a finalement retenu que 200 millions de nos francs sur le compte de l’accusé. La différence est pour le moins choquante, et pourrait faire douter du sérieux des magistrats. Qui, en toute logique, devaient faire l’état des lieux juste après le procès crimes économiques tant par acquit de conscience que pour édifier le peuple malien, au nom duquel ils rendent justice.

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    rnLe procès de l’ancien PDG de la SOTELMA, Tiémoko Maïga a rajouté au malaise. Interpellé, et accusé pour détournement de fonds publics, celui-ci a fini par être blanchi, dédommagé à hauteur de plus de 30 millions et réintégré dans la Fonction publique. Ce n’était pas tout, son successeur, Samba Sow fut lui aussi accusé avant d’être déclaré innocent par la justice : cela fait peut-être plus sérieux. Ce fut le cas de l’ancien PDG de l’Energie du Mali, Arouna Diakité qui a lui aussi séjourné en prison avant d’être blanchi, justement par une « jurisprudence Tiémoko Maïga », au bénéfice d’un article qu’on dit désuet et même abrogé, mais sorti par le juge de la Cour suprême pour le faire bénéficier d’un non-lieu.

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    rnL’autre facette de la Justice consiste à faire la surenchère sur des affaires qui n’en valent pas la peine. Le procès de l’ancien Maire de la Commune VI du  district de Bamako, Broulaye Konaté et certaines de ses collaborateurs en est une illustration parfaite. Ces anciens responsables municipaux de la commune VI ont été interpellés pour détournement de biens publics. Faute de preuve pour étayer ce chef d’accusation, la justice a, spectaculairement, changé de fusil d’épaule pour trouver l’argument selon lequel Broulaye et ses compagnons auraient fait « faux et usage de faux dans l’opération d’attribution des 95 hectares  mis à disposition par l’Etat pour les besoins du recasement des sinistrés du quartier de Missabougou ». La petite bête que la justice cherchait coûte que coûte n’avait pas été trouvée malgré les enquêtes judiciaires minutieusement menées à cet effet. Après  d’innombrables péripéties dans l’affaire, la Cour d’Appel n’a pu retenir de bien fondé sur les accusés qui venaient inutilement de passer deux ans en prison.  A l’appel, lors des troisièmes assises de la Cour d’appel de Bamako, la montagne a une fois de plus accouché d’une souris. Ceux qui étaient accusés de détournement de milliards de nos francs sont blancs comme neige avec des possibilités de pouvoir attaquer l’Etat pour les avoir illégalement maintenus en prison pendant plus de deux ans.

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    rnL’ancien percepteur de Bankass, Mahamane Dédeou Coulibaly a lui aussi été traîné en prison pendant vingt (20) ans avant d’être relâché faute de preuve  lors de la troisième session des assises de la Cour d’Appel de Bamako. 

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    Après que les recettes jusqu’ici appliquées pour trouver un remède au mal de la justice n’ont que trop montré leur limite, l’on peut s’interroger : à quand le renouveau dans la justice malienne à un moment où le conflit syndical prend le pas sur les préoccupations ?
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    En tout cas, pour reconquérir la confiance de l’opinion publique nationale, les magistrats doivent entamer un dialogue direct avec les usagers de la justice et souffler eux-mêmes dans la même trompette malgré la diversité syndicale.

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    rnMarkatié Daou
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