Fête du Cinquantenaire du Mali à Nara : Une page de notre histoire réécrite dans la ville d’origine de feu Modibo Kéita

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L’Institut de Formation des Maîtres (IFM) de Nara a abrité, le jeudi 8 juillet,  l’une des rencontres les plus mémorables du cinquantenaire. Sans mépris ni haine, sans règlement de compte ni prise de position partisane, des conférenciers, par l’entremise de l’Aferna- Zeyna,  a réécri une partie de l’histoire du Mali, à travers la vie de feu le président Modibo Keïta, originaire de Guiré. L’évènement était placé sous la haute présidence du ministre de la Promotion de la femme, de l’enfant et de la famille, Mme Maïga Sina Damba, non moins membre du groupe Zeyna, accompagné du préfet Souleymane Coulibaly. 

 Cette journée organisée en hommage au premier président du Mali indépendant, feu Modibo Keïta, a été l’occasion pour Amadou Traoré, connu sous l’appellation d’Amadou Djikoroni, compagnon de feu Modibo Kéita et ministre du premier gouvernement, de magnifier le passé glorieux  d’un grand homme, en parlant du premier chef d’Etat du Mali, notamment sur sa vie carcérale, pour inspirer les générations futures. 

L’objectif recherché par cette commémoration, aux dires de la présidente de l’association, Mme Touré Habi Sy, est d’informer l’opinion nationale et la diaspora sur les origines du premier président du Mali et d’éveiller, par la suite, cet élan de patriotisme dont toutes les communautés ont besoin,  pour impulser le développement endogène, tant prôné par le concept de la décentralisation et la déconcentration.

 Un génocide de 97 millions de personnes

 Le président de l’Amemok (Association pour la mémoire de Modibo Keita) Moussa Keita, neveu du feu président, a fait retracée la généalogie. Il a laissé entendre que leur champ de bataille est de valoriser les idées du père de l’indépendance.

Il a aussi rappelé que Modibo Keita est originaire de Guiré, un village soninké situé à 105 km de Nara, en 1915, d’une grande famille polygame dont le père, Daba Keita, avait quatre épouses. Modibo, fils de Hatouma Camara, est le 7e d’une fratrie de 15 enfants, dont 10 garçons et 5 filles. Il a été maire de Bamako en 1956, ensuite député à l’Assemblée nationale puis secrétaire d’Etat en France.

Le conférencier, Amadou Traoré, a indiqué que Nara est la source du pouvoir, du savoir, de la bravoure et de la richesse humaine. Selon lui, Modibo Keita fait partie des premiers élèves qui ont fréquenté l’école William Ponty, au Sénégal. Il a axé son intervention sur la pénétration française  au Soudan, qui a engendré un génocide de 97 millions de personnes. A l’époque, la capitale du Mali était Kankan. Bâti sur une superficie de 1.512.000 km2, ce territoire s’est réduit, aujourd’hui, à 1.240.000 km2.

Il a expliqué que, grâce au combat du duo Mamadou Konaté – Modibo Keita, le Mali a accédé, en 1960, à l’Indépendance. Ainsi, l’objectif de Modibo Keita était de donner une vie équitable à tous, ce qui explique l’éducation de qualité à l’époque,  la mise en place des milices dirigées par Moussa Traoré. Il a aussi expliqué les prérogatives dont bénéficiait  Fily Dabo Sissoko, au même titre que les ministres.

Fily Dabo, il est rentré à l’intérieur du pays avec Hamadoun Dicko.Tout deux du PSP, pour faire révolter les commerçants contre le pouvoir, avant de faire cap devant le consulat de France, à Bamako, pour y manifester.

C’est ainsi qu’ils furent arrêtés, jugés devant le public par des assesseurs venus de toutes les régions. Condamnés, ils ont été envoyés dans une maison de repos. L’Etat ayant appris la nouvelle de la toute première rébellion tamachèque, se préparait à donner l’ordre de les transférer dans la ville de Kidal.

L’escorte, ia été intercepté par les rebelles et les deux tués avec les gardes. Il a aussi rappelé que c’est sous la première République, avec Modibo Keita, que beaucoup de grandes usines ont été créées, notamment la Sonatam, la Somiex, l’Utema, la Comatex,  la Socotex. M. Traoré estime que, sous Modibo, le Mali avait la plus grosse fotte aérienne, avec 17 avions dont un Boeing 727. Côté infrastructures, rappelons que c’est lui qui a construit le stade Omnisport de Médine, qui porte son nom aujourd’hui, sans compter l’ENSUP et tant d’autres réalisations.

Le conférencier a indiqué que Modibo Keita a été arrêté le 19 novembre 1968 par Moussa Traoré, Kissima Doukara et Tiékoro Bagayogo, sur la route de Koulikoro, en provenance de Mopti d’où il est venu par bateau pour emprunter la voiture jusqu’à Bamako.

 Il a mentionné que Modibo savait, auparavant, qu’on allait l’arrêter, "tellement serein, il a voulu venir pour éviter  le bain de sang".  Ainsi commença son calvaire dans une maisonnette  à Kidal où il ne pouvait pas se tenir débout.  Beaucoup de ses compagnons, collègues et parents, furent arrêtés pour la circonstance.

 Modibo Keita a été empoisonné

 Dans cette prison, il a connu des tortures atroces. Transféré à Bamako, il était toujours bien portant, jusqu’au jour où Docteur Faran Samaké lui a rendu visite. Selon ses dires, Modibo Keita a été empoisonné sur ordonnance de Dr Faran, faite par sergent Boua Dabo, devant le sergent Soungalo Samaké, qui a fini par écrire un livre sur cette mort. "Cette mort a été décidée par le président Moussa Traoré, Tiékoro Bagayogo et son oncle  Dr Faran Samaké du service psychiatrique du Point G " a-t-il dit.

Quelques heures après l’annonce du décès de Modibo Keita, le 16 mai 1977, Dr Faran Samaké s’est donné la mort par empoisonnement, en demandant à son épouse de lui injecter une piqûre qu’il a lui-même préparée. Pour clore son intervention, Amadou Djikoroni a  affirmé, à l’intention de tous les Maliens, que "la démocratie ne consiste pas à laisser tout le monde, faire ce qu’il veut".

A l’occasion, ont fait des témoignages éloquents sur l’illustre disparu, Ben Chérif Diabaté, président du réseau des communicateurs traditionnels,  Bah Moussa Traoré, membre de l’AMEMOK, Ibrahim Siby, ancien ministre des Transports natif de Nara, Mme Alwata Ichata Sahi de l’OPF, Mariam Diakité, fille adoptive de Modibo Keita, le chef de village de Mourdiah, M’Bouyé Coulibaly, pour ne citer que ceux-là. Leur objectif, informer la jeunesse sur Modibo Kéita, ses idées et ses œuvres.

A Guiré dans la journée du vendredi, la délégation a été accueillie dans une ambiance festive. C’est dans cette zone, précisément à Sogolon, en 1896, que la première école a été ouverte et Daba Keita en est l’un des premiers élèves. Le maire de la localité en a profité pour mentionner les insuffisances d’infrastructures scolaires, la non couverture de la zone en réseau téléphonique, et par la télévision.

 Le manque  de CSCOM, ainsi que la crise alimentaire sont une réalité frappante. La population, estimée à 12.950 habitants, est composée de Soninkés, peulhs, Maures et Bambaras qui vivent exclusivement de pêche, d’agriculture et de commerce. La migration y est très développée. Le président de l’Association des ressortissants du cercle de Nara (ADECNA) Gabouné Keita, a rappelé l’esprit de développement du cercle que vise l’Aferna- Zeyna. A cet effet, il leur tire le chapeau.  Une visite de courtoisie a été rendue au chef de village, Mamoudou Marreba Keita, cousin du feu président.

La ministre de la Promotion de la femme, native de Nara, s’est réjouie de cette célébration, à l’orée du Cinquantenaire de l’indépendance du Mali.  Elle s’est dite fière de constater que les femmes avaient une place de choix dans les prises de décisions, comme en témoignent des femmes de renom telles que Sira Diop, Haoua Keita, Ina Sissoko et tant d’autres.

Elle a rappelé que cette journée commémorative répond à une attente de la population: "Nara a donné au Mali son premier président, à cet effet, elle ne pouvait pas rester en marge du Cinquantenaire ".

Cette idée est formidable car c’est un rappel de mémoire des idéaux du président Modibo Keita. Pour terminer, elle dira que la jeunesse doit prendre conscience de son rôle dans le développement du cercle de Nara.

Rappelons que l’Aferna ou groupe Zéïna, est une association apolitique  non confessionnelle et à but non lucratif, qui a pour objet d’œuvrer à l’amélioration des conditions socio économiques et culturelles des ressortissants et sympathisants du cercle de Nara en général et des femmes en particulier.

Fatoumata Mah Thiam KONE

*Envoyée spéciale à Nara

 

 

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