Avant-projet de constitution : Prime à l’objectivité dans la correction des insuffisances

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Quelles sont, selon vous, les grandes innovations contenues dans l’avant-projet de constitution ? Quelles sont les faiblesses à corriger avant la soumission au référendum ? Que pensez-vous du débat souvent houleux sur la question de la langue officielle ? Ce sont les questions posées par la rédaction de Le Matin à des intellectuels maliens de divers domaines afin d’enrichir le débat et contribuer à améliorer l’avant-projet de Constitution remis au président de la Transition, Colonel Assimi Goïta, le 11 octobre 2022. Nous vous proposons ici les différentes réactions.

CHEICK BOUCADRY TRAORE, PRESIDENT CARE : «la Constitution doit être un esprit clair qui nous unis à travers des institutions stables et une pratique citoyenne»

Cheick Boucadry Traoré,

Nous vous remercions de l’opportunité qui nous est donnée de prendre position sur le texte de loi proposé par le gouvernement. Nous sommes toujours heureux de partager avec vos lecteurs nos réflexions du moment. Comme nous l’avons souligné auparavant, il ne semble guère contestable que la Constitution de 1992 est atteinte de péremption, tant il est vrai qu’elle-même et les institutions qu’elle épaule peinent à s’adapter aux exigences actuelles de la démocratie qu’elles sont supposées garantir. Pour notre compte, la seule innovation serait venue de l’adaptation et l’harmonisation de cette constitution avec nos valeurs socioculturelles.

Nous croyons fermement que c’est à travers cette harmonisation qui ne saurait se faire sans être liée aux composantes de nos valeurs socioculturelles et à notre identité que nos citoyens captureraient l’esprit de la loi fondamentale. Elle permettrait alors au pays de se doter d’institutions durables et un renouvellement démocratique de pratiques d’intervention sociale. Malheureusement, les auteurs ont pris un chemin très différent de ce qui pouvait être une vraie innovation dans l’élaboration du texte de cet avant-projet de Constitution.

Les auteurs de l’avant-projet de Constitution du Mali nous ont présenté un projet de texte qui divise et délibérément discrimine certains segments de notre population. Or, la Constitution doit être un esprit clair qui nous unis à travers des institutions stables et une pratique citoyenne. Ce qui doit être commun ne doit point nous désunir.

Aucune Loi ne doit hypothéquer l’avenir que les dignes filles et fils du pays ne peuvent manquer d’élaborer pour la mère patrie. Exclure la diaspora de toute action civique est une hérésie pour nous. Aussi, la non-clarification du concept de la laïcité parmi tant d’autres lacunes et omissions dans le texte de loi ne peut qu’entraîner davantage des malentendus et des conflits dans notre société. Pour plus de clarification, il serait judicieux de donner un contenu réel et concret au principe ou même définir la conception du mot laïcité : une laïcité qui protège l’État contre l’influence potentiellement de nos croyances ou protège plutôt nos croyances contre l’emprise autoritaire de l’État ?

Bien que le texte de loi soit imparfait, nous pensons qu’une fois qu’on reconnaît cela, on dissipe l’arrogance du passé et de certains auteurs actuels puis on apporte les modifications garantissant l’aspiration de l’ensemble du peuple malien à travers ses valeurs et ses croyances.

Choisir une langue parmi tant d’autres dans une société melting-pot comme le Mali n’est pas une chose facile. C’est pourquoi le texte de loi devrait faire le sujet d’une sérieuse «dantigè ni baro» (concertation et conversation) avec le peuple malien bien avant son élaboration, mais aussi après sa mise au point. Tout au long de l’histoire, les gouvernants du Mali indépendant ont très peu consulté nos populations avant de prendre des décisions concernant leur vie et celle de la nation. Il est temps que cela cesse. Notre suggestion serait de faire attention et d’user de beaucoup de discernement avant de nous engager dans nos choix. Nous ne devons pas oublier que nos choix d’aujourd’hui auront inévitablement des conséquences sur notre futur.

A cause de la colonisation et des politiques d’assimilation, le français reste lié à un passé douloureux pour nous. Pour autant, sachons que nos législateurs ont choisi cette langue au lendemain de l’indépendance par nécessité. C’était la langue pour satisfaire les exigences administratives, mais aussi pour communiquer, comprendre et se faire comprendre par le reste du monde. Notre histoire millénaire est sans doute glorieuse et l’image de notre pays est certes culturelle. Cependant, à notre humble avis, il serait plus sage de faire plutôt un ajout de nos langues nationales au français comme officielles dans un premier temps au lieu d’un changement radical de langue officielle. Mais encore, considérant la globalisation et nos stratégies de développement économique, il est important de pouvoir s’ouvrir davantage au reste du monde. Seule une langue «monde» peut permettre cela.

MORIBA DABO, JOURNALISTE D’INVESTIGATION : «Sévir contre le nomadisme politique sera une grande victoire de la démocratie au Mali»

Moriba Dabo, journaliste d’investigation

Pour ma part, nous avons quelques innovations contenues dans cet avant-projet de constitution. Par exemple, le fait de sévir contre le nomadisme politique est une grande victoire de la démocratie au Mali. Seulement, je doute fort de son application stricte. Une autre innovation, ce serait le fait de remettre les procureurs dans leurs souliers parce que, au Mali, nous assistons aux règlements de comptes de nos procureurs bornés par le pouvoir qui distribuent des mandats de dépôt à tout bout de champ sans enquête ni fondement. Cela n’est-il pas grave au 21e siècle ?

Ainsi, par rapport à l’article 192, je dirais plutôt que tout coup d’Etat ou putsch est un crime imprescriptible et jamais amnistiable contre le peuple malien. Sinon qu’en pensent les auteurs du coup d’État du 18 août 2020 ?

Les faiblesses de cet avant-projet, il y en a beaucoup. Il renforce considérablement les pouvoirs du futur président qui sera élu en 2024 à la tête du Mali en proie à une crise sans précédent. Ça peut être aussi une manière pour les militaires de s’accaparer du pouvoir afin de gouverner sans obstacle, aucun. J’estime que le président a beaucoup de pouvoir. En effet, j’apprécie beaucoup l’impossibilité de toucher à la limitation du nombre de mandats présidentiels à deux pendant que nos grands voisins violent la constitution de leurs pays au nez et à la barbe de la communauté internationale qui se fait prier pour condamner.

Pour clore, le débat sur la question de la langue officielle relève d’un populisme et un orgueil très profond des nouvelles autorités. Sinon faut-il signaler que le Mali est l’un des premiers pays d’Afrique à mettre en valeur sa langue officielle à travers le N’Ko !  Dans tous les cas, pour moi le choix de nos langues nationales en langues officielles est ridicule pendant que nous n’avons même pas accès à une éducation décente dans nos écoles publiques. C’est pourquoi il faut tout faire pour nous épargner d’autres problèmes dans notre système éducatif qui attend une refonte totale depuis des années.

MOUSSA SEY DIALLO, LEADER POLITIQUE : «Une réelle volonté de rechercher l’équilibre des forces»

Moussa Sey Diallo

Parcourir l’avant-projet, de ce qui pourrait être la Constitution prochaine de la République du Mali, permet de sentir que les désirs contextuels des populations ont été entendus. Aussi, on y perçoit une réelle volonté en ce qui concerne la recherche de l’équilibre des forces. Mais surtout, dès l’entame de la lecture, on est saisi par l’affirmation de la souveraineté du peuple du Mali, de sa fierté, de sa reconnaissance aux bienfaiteurs de la nation. Également, de son attachement à l’unité nationale, à la laïcité comme gage de tolérance et garant du vivre-ensemble. De son respect au droit de l’Homme. De sa fidélité à la démocratie et de sa grande ouverture vis à vis des autres.

En continuant la lecture, on constate que les rédacteurs du projet, dans leur démarche, n’ont pas voulu s’éloigner de l’ancienne constitution, mais en même temps, on entrevoit des changements significatifs.  Ainsi, le président de la République reste la clé de voûte du système. Mais, cette fois, il est exposé à la destitution. Ce qui met une épée de Damoclès au-dessus de sa tête. Cependant, nous trouvons que les motifs de la mise en œuvre d’une si importante action ne doit pas être dans un ordre trop général car cela pourrait permettre de multiples interprétations doctrinaires, apportant plus d’instabilité. Nous pensons qu’il faut être plus précis et plus concis en ce qui a trait à la destitution d’un mauvais président.

Dans le projet, en plus d’un minimum, un plafond a été désigné concernant les candidats à la présidence. Ce qui n’est pas mauvais pour un pays comme le Mali où le président doit être réellement impliqué. Mais, nous restons persuadés que cette disposition va être combattue malheureusement, même par ceux qui parviendront au pouvoir. Le président de la République ne doit plus avoir la double nationalité ! Ici, les rédacteurs ont certainement regardé les responsabilités du président sur la souveraineté du pays, garant de la constitution, premier magistrat, et chef suprême des forces armées et de sécurité. Il ne doit pas du tout être dans un conflit de conscience.

Dans les propositions, le président peut mettre fin à la mission du Premier ministre en plus de l’avoir nommé. Cela change beaucoup de choses. Le Premier ministre, dans la nouvelle configuration, devient le surveillant général du président. Il met fin à sa mission, ce qui n’est pas le cas dans la constitution présente. Le PM ne peut plus être soumis à la motion de censure parce que la politique de la nation étant désormais déterminée par le président de la République lui-même. Le PM présente juste le Plan d’action du gouvernement qui n’a pas besoin de vote. Il est fait seulement l’objet de débat à ce sujet. Le PM cesse donc d’être un filtre pour le président.

Le parlement est devenu bicaméral avec le Haut conseil national qui s’ajoute à l’Assemblée nationale. Il sera le sénat malianisé. Les collectivités, les légitimités traditionnelles et la diaspora vont le composer. Il va jouer dorénavant le rôle de l’équilibre dans le système politique. Tenir l’exécutif, le contrôler et si nécessaire l’enlever. Sa petite faiblesse se trouve être dans la possibilité de destitution de ses présidents de chambre, après deux ans d’exercice. Cela peut être une faille pour les ambitions politiques pour fragiliser l’institution. Avons-nous vraiment besoin d’ouvrir cette boîte de pandores ?

Par ailleurs, la désignation des membres qui ne sont pas des collectivités, doit se faire à travers des choix au sein des faîtières, coutumières, religieuses et de la diaspora. Sinon, les faire désigner par le président lui donnera assez d’obligés dans le parlement. Ce qui pourrait affaiblir ce dernier. En le faisant par les faîtières, cela va permettre de débarrasser le pays de certains hauts conseils et arrêter les visites de nos officielles dans les vestibules du pouvoir parce que leurs combats seront portés par le Haut conseil national où se trouveront leurs représentants.

Ce projet peut aider la démocratie malienne à faire un bon petit pas. Mais, c’est une œuvre humaine, elle a ses insuffisances, pourtant elle peut marquer un progrès. Il est vrai, il n’a pas voulu mettre clairement l’opposition en exergue. Aussi, nous n’avons pas vu la protection de la liberté des médias et le français n’a pas pu être qu’une langue de travail. Cela doit être corrigé. Par contre, il a gardé le verrou de l’article 118 de la constitution actuelle. La désobéissance civile et l’imprescriptibilité du coup d’État sont également maintenues. La diaspora a été suffisamment impliquée et la question de la transhumance politique a été surtout tranchée sans ambiguïté. Ces choses sont vraiment des avancées qui comptent.

Cependant, pour que ce bon petit pas de la démocratie malienne soit une réalité, le pouvoir doit communiquer énormément. Et il doit accepter de faire des amendements, sans trop dénaturer ce qui est déjà là. Pour moi, un régime semi-présidentiel ou semi-parlementaire à la française est préférable au régime présidentiel à équilibre parlementariste proposé par les rédacteurs. Et cela d’autant plus que la cohabitation n’y est pas possible… Le président à le pouvoir de mettre fin à la mission du PM et celui de le nommer quelle que soit la réalité du parlement. Une grande différence par rapport à l’actuelle.

Nous pensons qu’il peut être essayé, surtout que l’autre a étalé son incapacité à nous stabiliser actuellement.

TIÉGOUM BOUBÈYE MAÏGA, CHRONIQUEUR POLITIQUE : «Un système hybride avec la volonté non assumée de faire du président de la République un Dieu sur terre»

Par rapport à l’avant-projet de Constitution, les innovations sont assez nombreuses et concernent les trois pouvoirs même si leur opportunité est discutable. Première innovation, c’est la possibilité de destituer le président de la République (PR). Le fait d’engager la responsabilité du président devant les députés est nouveau parce que le président de la République était jusque-là presque un intouchable. Peut-être que les rédacteurs de l’avant projet pensent que ça devrait limiter les risques de coups d’État.

Or, on peut être dans une situation où le président de la République ne dispose pas de majorité au parlement. Pour un Oui ou pour un Non la tentation de lui régler son compte en le destituant pourrait être grande. Surtout que le président de la République n’a plus de prérogatives concernant la dissolution de l’Assemblée nationale. Des élus contre lesquels il ne peut rien mais qui ont la possibilité de le renvoyer. En face, on a le fait que le parlement ne peut plus renverser le gouvernement. L’avènement du bicaméralisme est également une innovation. Les deux chambres devraient travailler efficacement ensemble et se neutraliser pour empêcher les abus de l’une ou l’autre. On peut aussi se réjouir du fait que la transhumance politique est désormais interdite.

Au niveau du pouvoir judiciaire, c’est une innovation majeure que de permettre au citoyen de saisir le Conseil supérieur de la magistrature et la Cour constitutionnelle. Il y a une innovation qui constitue une fausse bonne solution au contentieux électoral. En effet, en cas de litiges, la Cour constitutionnelle convoque de nouvelles élections. Quand on connaît le nombre de contestations et la mauvaise foi des perdants, on va se retrouver dans une situation pire qu’avant. Autrement, on va se retrouver avec le remède qui tue le malade. Je n’ose même pas imaginer le nombre d’élections qui naîtront du contentieux électoral. Le pays n’a pas d’argent pour l’organisation d’élections à répétition et le pays sera ingouvernable. Il y aura comme une sorte de chienlit.

Sur la base de ce que j’entends, l’avant projet de la Constitution comporte également beaucoup de tares.

Les syndicats de la Justice sont vent debout contre ce qu’ils appellent un recul démocratique. Les rédacteurs auraient pu être courageux et sortir du Conseil supérieur de la magistrature le président de la République et le ministre de la Justice. Mon constat est aussi que le texte est très mal agencé et crée des problèmes là où il devrait apporter des solutions. Quand on prend le préambule, par exemple, il est inutilement long au point qu’on perd son sens réel.

Je pense que les rédacteurs devront proposer un régime clair, soit présidentiel, soit parlementaire, soit semi présidentiel. Ce qui est dans l’avant projet est un système hybride avec la volonté non assumée de faire du président un Dieu sur terre. La présence d’un Premier ministre dans ce système est inutile parce que le président nomme les ministres, il met fin à leurs fonctions, l’initiative de la loi lui appartient désormais. A mon avis, c’est un peu saugrenu de mettre dans une constitution le nombre de ministres. Tout comme il faut faire des choix clairs concernant le mode de scrutin pour les élections législatives. Il faut donc revenir aux fondamentaux.

Au niveau du législatif, l’innovation du bicaméralisme peut heurter l’opinion qui a une mauvaise image des politiques. Et puis par ces temps de difficultés financières, les populations pourraient difficilement comprendre la création d’une deuxième chambre qui va générer de nouvelles dépenses. Au niveau du pouvoir judiciaire, les syndicats sont vent debout contre les reculs constatés concernant les acquis démocratiques. Sans compter que, avec le niveau d’occupation du territoire, ça serait difficile de faire le référendum. Mieux vaut que les autorités s’occupent de ce qui justifie leur présence au sommet de l’Etat, la sécurité.

C’est un faux débat sur la question de la langue officielle. Le jour où on voudrait prendre une ou deux langues officielles, on n’aura pas à changer la constitution. Cela trouvera que le pays est prêt !

MACKY CISSE, MÉDIATEUR SOCIAL/EXPERT EN GÉOPOLITIQUE : «Une affirmation claire du caractère unitaire de l’État» !

Macky Cissé

Le président de la Transition, colonel Assimi Goïta, a ainsi reçu le 11 octobre 2022 un avant-projet de la nouvelle Constitution, un élément clé du vaste chantier institutionnel invoqué par les autorités de la Transition. Comme l’a dit Pr. Fousseyni Samaké, président de la Commission de rédaction de la nouvelle Constitution (CRNC), ce document est «un marqueur important du processus de refondation de l’État malien» et elle «répond aux aspirations profondes» du peuple malien, exprimées lors des Assises nationales de la refondation organisées en décembre 2021. A cette occasion, j’ai personnellement fait plusieurs propositions relatives à la militarisation, l’évacuation sanitaire,  la sécurité et la souveraineté du pays…

Le texte écarte d’emblée l’hypothèse d’une fédération qui aurait conféré une forte autonomie au nord du pays, théâtre par le passé de rébellions touarègues pour l’indépendance ou pour un statut particulier. Dans l’avant-projet de Constitution, il y a une affirmation claire du caractère unitaire de l’État. Ce qui suppose qu’il n’est pas question que nous ayons un État fédéral. Dans la future Constitution, «le président de la République détermine la politique de la nation» et «le gouvernement conduit la politique de la nation déterminée par le président».

Le président nomme le Premier ministre et les ministres et met fin à leurs fonctions. «Le gouvernement est responsable devant le président» et non devant l’Assemblée nationale comme c’était toujours le cas jusqu’ici. L’initiative des lois appartient «concurremment» au président et aux membres du parlement, et non au gouvernement et à l’Assemblée nationale. «Le Parlement ou l’Assemblée ne pourra plus renverser le gouvernement et, en sens inverse, le président de la République ne pourra plus dissoudre l’Assemblée nationale». Les rédacteurs de l’avant-projet ont ajouté l’impossibilité de toucher à la limitation du nombre de mandats présidentiels à deux. Cela est important dans un contexte régional où des candidats ont brigué ou pourraient être tentés de briguer un 3e mandat en instrumentalisant la loi fondamentale de leurs pays.

Cela est choquant du point de vue de la morale comme du point de vue de la loi. C’est une violation flagrante de la Constitution, une provocation, un coup de poignard dans le dos de la démocratie. En Côte d’Ivoire par exemple, Alassane Dramane Ouattara aurait grandement servi l’Afrique s’il avait tenu sa promesse de ne pas briguer un 3e mandat. On croyait qu’il aurait laissé ce genre de mesquinerie à d’autres. Son profil universitaire et son bilan macroéconomique le prédisposaient à mieux faire. Mais, au lieu de donner le bon exemple, ce Monsieur, que l’on prenait pour un véritable homme d’État, ouvre plus largement la boîte de Pandore…

Cet avant-projet de Constitution se veut novateur dans le sens où il s’attache à définir le concept très sensible de la laïcité dans ce pays très religieux. Le nouveau texte vient «clarifier» la «conception malienne» de la notion de «République laïque».  La laïcité a pour objectif de promouvoir et de conforter le vivre-ensemble dans la société fondée sur la tolérance, le dialogue et la compréhension mutuelle, est-il écrit dans l’article 32 de l’avant-projet de Constitution. Pour l’application de ce principe, poursuit-il, «l’État garantit le respect de toutes les croyances ainsi que la liberté de conscience, de religion et le libre exercice des cultes».

On y note d’autres innovations comme l’interdiction des discriminations fondées sur la religion et l’ethnie ; la déchéance du mandat d’un élu en cas de condamnation définitive ; la question de la Cour constitutionnelle qui ne se prononcera plus en premier ressort sur les résultats des élections législative et communale ; la fin de l’immunité des ministres et des députés, surtout la responsabilité pénale du président de la République.

Comme insuffisances, nous notons la limitation du nombre des ministres à 25-29 ; la question de la discrimination positive à l’égard de nos mamans (des femmes)… Il faut élargir et reformuler certaines parties, surtout l’article 31, afin de garantir la future monnaie au cas où ! La langue doit être le soubassement des ressources d’un nouveau Mali fort où le choix du peuple sera toujours respecté… Ce pays, nous devons l’inventer (n’ayons pas peur du mot) en collant au plus près de nos réalités sociologiques et culturelles. Nous nous sommes jusqu’ici contentés de singer les institutions de nos colonisateurs. Comment se fait-il qu’une notion comme celle de «Conseil des anciens» n’ait jamais effleuré l’esprit de nos constitutionnalistes ?

Pourtant, personne n’ignore le rôle régulateur que cette couche continue d’exercer aussi bien au village qu’en ville. Mais comme on ne saurait inventer ex nihilo, nous devons en même temps nous inspirer et de notre passé et des expériences qui ont réussi ailleurs. Au niveau du préambule, je pense que les experts auraient dû faire ressortir les points saillants de la charte de Kouroukan Fouga. Dans certaines colonnes, j’ai déjà eu l’occasion d’évoquer la convention Kouroukan Fouga qui a fondé le fabuleux empire du Mali et celle de Philadelphie qui a fondé les États-Unis. Vivement, un nouveau Kouroukan Fouga ! Commençons par mettre en place les bonnes institutions et les bons chefs viendront sûrement après !

A mon avis, le Titre I doit être : L’ETAT ET LA SOUVERAINETÉ. Pourquoi ? Parce que, aujourd’hui, c’est l’existence même de l’Etat en tant qu’entité juridique qui est en jeu au Mali. Suivront les droits et devoirs du citoyen malien. Le Chapitre I doit être consacré aux devoirs et aux libertés publiques car, au Mali, les revendications sociales ont beaucoup fragilisé l’État avec la prolifération de syndicats. Il fallait donc inverser la tendance dans la nouvelle constitution.

On peut améliorer l’avant-projet en mettant plus en exergue la personne morale (État, Collectivités territoriales, les Établissements publics…). En mettant l’accent sur les personnes physiques, on risque de tomber encore dans la personnalisation du pouvoir. Du Titre III du Pouvoir exécutif et chapitre III L’administration : pourquoi ne pas dire de l’administration déconcentrée à l’administration décentralisée ? Puisque je ne vois pas un chapitre consacré aux collectivités territoriales dans le texte.

Sur le fond, je constate qu’il n’y a pas le respect du principe de séparation des pouvoirs (exécutif, législatif, judiciaire), aucun article ne le mentionne dans le texte. Tout comme les rapports entre les  pouvoirs ne sont pas interdépendants, mais liés.

MAMADOU ISMAÏLA KONATE, AVOCAT A LA COUR/ARBITRE : Un monstre à trois têtes

Mamadou Ismaïla Konaté, Avocat à la Cour, Arbitre

Les Maliens demandent plus à réduire les pouvoirs du PR qu’à les renforcer. Or, l’avant projet de constitution fait l’inverse. Il crée un monstre à 3 têtes qui exercera tous les pouvoirs en l’absence de contre-pouvoirs puisque la destitution, n’en est pas un !

(sur Twitter)

Propos recueillis par

Moussa Bolly

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3 COMMENTAIRES

  1. “Dans tous les cas, pour moi le choix de nos langues nationales en langues officielles est ridicule pendant que nous n’avons même pas accès à une éducation décente dans nos écoles publiques. C’est pourquoi il faut tout faire pour nous épargner d’autres problèmes dans notre système éducatif qui attend une refonte totale depuis des années”.

    Et voilà comment s’exprime un “intellectuel” africain. Pour lui, il faut donc laisser mourir nos langues. En outre, il oublie que justement, les problèmes de déperdition scolaire, de faible performance des élèves et de faible productivité de nos scientifiques, de nos écrivains, de nos artistes, etc. tout cela vient principalement du fait que nous sommes éduqués dans une langue étrangère à nos cultures, à nos façons de penser et à nos identités. Nous sommes en train de commettre un suicide culturel, de laisser mourir nos propres langues à petit feu au profit du français et il se trouve des gens qui disent qu’ils sont des intellectuels et qui croient que ce n’est pas bien grave, que ce n’est pas un problème, qu’il ne faut rien faire.

    Répétons-le : le droit de transmettre sa langue maternelle et sa culture à ses enfants est un droit humain inaliénable. Priver un groupe, une population de ce droit est un crime, un génocide culturel. Le devoir premier de tout gouvernement est d’assurer la reproduction physique (la sécurité physique entre autres) et la reproduction culturelle (la transmission de la langue et de la culture) de ce groupe, de cette population car sans cette reproduction culturelle, le groupe ou la population cesse d’exister en tant qu’entité distincte. En conséquence, ne pas enseigner nos langues à nos enfants équivaut à un génocide culturel, à leur disparition progressive. Il s’agit d’un problème extrêmement grave, un problème de première importance.

    En Inde, au Japon, en Lettonie, en Algérie, en Tunisie, au Maroc, en Indonésie, en Chine, etc., partout dans le monde, DANS TOUS LES PAYS DU MONDE HORS AFRIQUE « NOIRE », ce sont les langues nationales qui sont enseignées en priorité aux enfants avant l’apprentissage d’une langue étrangère. TOUT LE MONDE ENSEIGNE D’ABORD SA LANGUE AVANT DE SONGER A ENSEIGNER LA LANGUE D’AUTRUI. Pourquoi des pays qui ont 70, 250 ou même 700 langues enseignent-elles leurs langues à leurs enfants et pas nous ?

    Enseignons donc en priorité nos langues nationales (TOUTES NOS LANGUES NATIONALES) à l’école fondamentale. Puis choisissons (ou créons) une ou des langue(s) nationale(s) comme langue(s ) officielle(s). Ensuite remplaçons l’enseignement du français comme première langue étrangère par l’enseignement de l’anglais car dans tous les pays du monde, y compris en France, y compris en Chine, y compris en Corée du Nord, c’est l’anglais qui est enseigné comme première langue internationale pour les besoins de développement scientifique et technologique et pour le commerce international.
    Le français sera une langue étrangère comme une autre au même titre que le mandarin, l’espagnol, le turc, etc. et chacun pourra l’apprendre s’il le veut comme chacun peut apprendre aujourd’hui le portugais, le russe, l’arabe, etc., au Mali s’il le veut. L’enseignement monolingue du français dans nos pays équivaut à un crime. Or, le français n’a absolument rien de spécial. C’est une langue comme n’importe quelle autre langue. Toutes les langues se valent et elles peuvent toutes être enseignées et érigées en langues officielles au même titre. Pourquoi seul le français mériterait ce statut ?

    • si la formation n’est pas bonne ce n’est pas la faute à la langue nationale mais au français qui pose problème à nos enfants. Les étudiants maliens vont en Chine et en Russie sans connaissance préalable du chinois ou russe font un an de langue et reviennent avec les diplômes. Où est le problème avec les langues qui sont déjà écrites? Deux ans à trois suffisent pour accompagner la langue nationale avec le français et l’abandonner définitivement.

  2. ” L’ ÉTAT MALIEN EST UN ÉTAT SOCIAL.” DOIT ETRE AU PRÉAMBULE DE LA NOUVELLE CONSTITUTION.
    CECI EST LE GARDE-FOU POURQUE L’ ÉTAT SORTE DE SA FORME HONTEUSE ESCLAVAGISTE POST-MODERNE.

    EN FAIT, LE MALI APRES 1991 , C’ EST Á DIRE “DÉMOCRATIQUE”, EST DEVENU UN ÉTAT FÉODAL POST-MODERNE.

    LA FÉODALITÉ DE NOTRE ÉTAT S’ AFFIRME PAR LE FAIT QU’ UN CASTE FERMÉ DE POLITICIENS, UNE CENTAINE, POSSEDENT TOUTES LES FINANCIERES ET ÉCONOMIQUES NATIONALES, Á LA HAUTEUR DE 90%.

    L’ ÉTAT MALIEN ESCLAVAGISE LA POPULATION MALIENNE, SANS LUI RETOUNER UN MINIMUM DE CONDITION DE VIE DIGNE DE L’ HUMAIN.

    DONC, AU PRÉAMBULE DE LA NOUVELLE CONSTTUTION,, IL DOIT Y AVOIR :

    —- L’ ÉTAT MALIEN EST UN ÉTAT SOCIAL. —–
    —- L’ ÉTAT MALIEN EST UN ÉTAT SOCIAL. —–
    —- L’ ÉTAT MALIEN EST UN ÉTAT SOCIAL. —–

    PAR MOI-MEME, MAITRE FÉTICHEUR Á M’PETIONNAH, COMMUNE RURALE DE SOMAW’SO, CERCLE DE BLA, RÉGION DE SÉGOU, MALI JAMANA.

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