Communiqué conjoint MALI-UE : Ce qui n’a pas été dit !

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Accord de réadmission des maliens : OUI, IBK a été piégé
Le ministre Abdoulaye Diop et Bert Konders

Une rencontre entre le ministre des Affaires étrangères, de l’Intégration africaine et de la Coopération internationale, Abdoulaye Diop et son homologue néerlandais, Bert Koenders avait été sanctionnée, en décembre dernier, par un communiqué conjoint signé par les deux parties. Les domaines prioritaires sur lesquels celles-ci envisagent de renforcer leur collaboration sont la création d’emploi pour les jeunes dans les régions de départ et d’origine des migrants; le renforcement des systèmes cohérents et robustes de registres d’état civil, ainsi que la délivrance des cartes d’identité et passeports sécurisés et l’utilisation des passeports biométriques; la gestion des frontières et un meilleur contrôle du territoire; la protection des migrants en transit au Mali et la lutte contre la traite de êtres humains et les ¨passeurs¨; l’accompagnement des retours d’Europe des personnes en situation irrégulière.

Cette dernière partie (l’accompagnement des retours d’Europe des personnes en situation irrégulière) a ébranlé la République pendant plus de trois semaines. Le document est assimilé, à tort ou à raison, par les Maliens de l’intérieur et de la diaspora, à un accord de réadmission.

Toutes les procédures d’explications (démentis officiels, interpellation à l’Assemblée nationale, missions ministérielles à l’extérieur…) ont échoué.

Pour les autorités maliennes, un communiqué conjoint n’a aucune valeur juridique. Les Maliens de tous bords n’y croient pas. Dr Salifou Fomba, Professeur de droit international à l’Université de Bamako nous apporte les éclairages nécessaires. Un communiqué conjoint a-t-il une valeur juridique au regard du droit international ? Réponse !

Le 11 décembre 2016, un communiqué commun ou conjoint a sanctionné la visite de Mr Bert KOENDERS Ministre des Affaires Etrangères des Pays-Bas. Il agissait au nom de Madame Federica MOGHERINI, Haute Représentante de l’UE pour les Affaires Etrangères et la Politique de Sécurité et Vice-présidente de la Commission Européenne. Cette visite s’inscrivait dans le cadre du dialogue de haut niveau entre le Mali et l’UE sur les questions de migration. Ce communiqué conjoint a conduit certains médias à donner dans la polémique en affirmant que le Mali a signé en catimini avec l’UE un accord de réadmission des Maliens en situation irrégulière en Europe. Cette affirmation a conduit le Ministère des Affaires Etrangères à y apporter un démenti formel. C’est ainsi que, le 12 décembre 2016, le Ministre en charge de la Diplomatie Malienne a clairement affirmé, entre autres, qu’ « un communiqué conjoint n’a pas la valeur juridique d’un accord en droit international ».

Cette affirmation appelle quelques remarques, à savoir :

1-Qu’on peut la tenir pour vraie lorsqu’on reste dans la logique primaire de la distinction doctrinale classique entre d’une part les traités, conventions ou accords, et d’autre part les actes dits concertés non conventionnels caractérisés par l’absence de valeur juridique obligatoire en principe, dont les communiqués conjoints font justement partie ;

2-Que, cette affirmation est quelque peu catégorique et a besoin d’être nuancée ;

3-Qu’il ne faut pas oublier que le droit international est un droit largement non codifié, qui comporte à la fois des certitudes et des zones d’ombre et par conséquent charrie beaucoup de problèmes d’interprétation;

4-Que, dans un système juridique décentralisé, lacunaire et sans législateur, un rôle central revient logiquement et de droit au juge international, qui est chargé de dire le droit international positif ;

5-Que, dès lors, il est important de connaitre la position de la Cour Internationale de Justice pour savoir si elle confirme ou infirme celle du Ministère des Affaires Etrangères.

Il faut savoir que la position du principal organe judiciaire des Nations Unies est claire sur la question de la valeur juridique du communiqué conjoint ; étant attendu qu’on peut toujours la critiquer ou l’interpréter autrement. Elle s’articule autour des points suivants :

1/il n’existe pas « de  règles de droit international interdisant qu’un communiqué conjoint constitue un accord international » – Voir l’arrêt de la Cour Internationale de Justice  du 19 Décembre 1978 dans l’affaire du plateau continental de la Mer Egée opposant la Grèce et la Turquie, Recueil 1978, paragraphe 39.

Cette position de la C.I.J vient ainsi carrément contredire l’affirmation sèche faite par le Ministère des Affaires Etrangères, en en relativisant la portée absolue ;

2/La question de savoir si un communiqué conjoint constitue ou non un traité, «  dépend essentiellement de la nature de l’acte ou de la transaction dont il fait état », et il faut « tenir compte avant tout des termes employés et des circonstances dans lesquelles le communiqué a été élaboré » – Voir la même source.

Ainsi, pour savoir si le communiqué conjoint Mali-UE du 11 Décembre 2016 constitue ou non un accord international, il faut analyser ce texte en y appliquant les critères proposés par la Cour internationale de justice dans sa directive, à savoir  la nature dudit texte ou la transaction dont il fait état, et, pour ce faire, recourir aux termes y employés et aux circonstances dans lesquelles le texte du communiqué a été élaboré. Telle est la méthode que l’interprète doit s’efforcer d’appliquer, un exercice qui n’est pas forcément facile, et auquel nous  n’allons pas nous livrer ici et maintenant.

Il faut savoir que cette directive de la C.I.J ne permet pas de résoudre tous les problèmes. En règle générale, les formules utilisées dans les textes des communiqués conjoints sont floues et l’interprète doit donc faire preuve d’esprit de finesse.

Dans certains cas, le doute n’est pas permis quant à la portée juridique du texte. Il en va ainsi lorsque le texte en cause précise lui-même qu’il exprime la «  volonté politique » de ses auteurs et n’est pas « un traité ou accord international » ; ou lorsqu’il précise que son respect est « volontaire et ne constitue pas une obligation sanctionnée juridiquement ».

Par ailleurs, il faut savoir que la Cour Internationale de Justice a considéré qu’un « procès-verbal » signé par les Ministres des Affaires Etrangères de Bahreïn et de Qatar et énumérant «  les engagements auxquels les parties ont consenti (…), crée ainsi pour les parties des droits et des obligations  en Droit International. Il constitue un accord international » – Voir arrêt C.I.J du 1er Juillet 1994, Rec, Page 121.

La C.I.J a adopté le même raisonnement à propos de « Déclarations », qui ont le «  statut d’accord international » dans l’affaire de la frontière terrestre et maritime entre le Cameroun et le Nigéria – Voir CIJ, arrêt du 10 Octobre 2002, Rec, Page 339, paragraphe 48, page 341, paragraphe 50 et page 429, paragraphe 263.

Par ailleurs, il faut savoir que le Tribunal International du droit de la Mer a adopté la même position que celle de la C.I.J dans son arrêt du 19 Décembre 1978, à propos d’un « procès-verbal » ou du « compte rendu d’une Commission mixte » – Voir TIDM, arrêt du 06 Août 2007, paragraphe 86,  affaire du Hoshinmaru Japon contre Russie.

Quant à la question de savoir si le Mali a conclu avec l’UE un accord secret sur la réadmission des Maliens en situation irrégulière en Europe, la réponse de principe est non, pour la simple et bonne raison que la Charte de l’ONU interdit les accords secrets. En effet, il ressort de son article 102 que :

1/tout traité ou accord international conclu par un membre des Nations Unies sera, le plus tôt possible,  enregistré au Secrétariat et publié par lui ;

2/ aucune partie à un traité ou accord international qui n’aura pas été enregistré, ne pourra invoquer ledit traité ou accord devant un organe de l’ONU.

Au-delà de la question de la nature juridique du communiqué conjoint Mali-UE, se pose plus fondamentalement la question des accords de réadmission des étrangers en situation irrégulière en Europe. Or, cette question soulève d’épineux problèmes à la fois sur le plan économique, politique, et juridique etc. Ce qui implique d’y consacrer un article de fond (à retrouver dans notre prochaine parution).

Dr Salifou Fomba

Professeur de droit international à l’Université de Bamako,

Ancien membre de la Commission du droit international de l’ONU à Genève,

Ancien membre et Rapporteur de la Commission d’enquête de l’ONU sur le génocide au Rwanda

 

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16 COMMENTAIRES

  1. Laisser nous tranquille, pour nous l’État malien n’existe pas.
    Faites un tour dans nos structures de santé, dans tous nos services.
    Vous appelez ça un État ?
    Que de la misère, un pays que les ma famille d’abord continuent d’appauvrir.
    La jeunesse désœuvrées est obligée de d’immigrer.
    C’est le sauve qui peut au mali!
    Comme cela ne suffit pas,c’est mêmes dirigeants voleurs ont signé un accord de réadmission avec UE pour mieux se remplir les poches d’euros promis.

  2. Il ne sert a’ rien de continuer avec vos dissertations qui ne meneront nulle part! Le droit international et la diplomatie sont ce qu’ils sont MAIS RIEN NE PEUT REMPLACER LE POIDS D’UN PAYS. Nous devons donc etre tres conscients de notre poids sur le plan international.
    Quelle strategie faut-il pour proteger les interets des maliennes et des maliens de l’exterieur? TELLE DOIT ETRE LA QUESTION!!!!!
    La question des documents des consulats maliens en Europe, peut etre un couteau a’ double tranchant.. Nous savons qu’on ne peut pas detenir un illegal en France au-dela de 45 jours. Au bout des 45 jours si on ne connait pas le pays d’origine du sans papier, on est oblige’ de le liberer!!!
    SI VOUS EXIGEZ DES PAPIERS QUI INDIQUENT CLAIREMENT QUE VOUS ETES MALIENS ET VOUS ETES DANS UNE SITUATION ILLEGALE, IL VA SANS DIRE QU’ON VA REPARTIR POUR BAMAKO.
    Je ne demande a’ personne d’aller contre les lois en vigueur, je dis seulement d’etre prudent avec ce qu’on veut!!!

  3. Le traite congolais qui a vendu les maliens à l’Europe avec son mentor de président incompétent.Vous irez en enfer en 2018

  4. on peut faire mine de nier la réalité , un accord a été validé et signé entre UE et certains pays , je ne sais exactement quel est l’approche de notre gvt entre validé et signé , en tout cas les autorités allemande ont fait connaitre leur positionnement sur la question ( les pays concernés qui refuseront de coopérer l’accueil de leurs ressortissants se verront la remise en cause de leurs aides ( journal de 20 H France 2 ) ça veut tout dire non ?

  5. De toutes les façons, il faut retenir que nos compatriotes qui sont en Europe ne sont dupent et ils ont accès à beaucoup d’informations tenues secrètes pour les nationaux restés au pays. Personne, personne, personne ne peut convaincre ces maliens de l’extérieur sur des choses sans fondement, l’information étant un droit dans les pays de leur résidence en Europe, chose contraire au comportement de nos dirigeants d’Afrique.

  6. Tout ca là c’est gros français…………. En termes terre à terre qu’est ce que ca veut dire???????????????? En plus pourquoi le gouvernement n’a rien communiqué juste après la signature de ce document pour éviter tout amalgame???????????????????

  7. TANT QUE NOUS AURONS EN TÊTE QUE C’EST AILLEURS QUE SE TROUVE LE BONHEUR ON NE FERA RIEN CHEZ NOUS.

  8. C’EST LA POLITIQUE DE GESTION DE L’IMMIGRATION ET DES MALIENS DE L’EXTÉRIEUR QUI DOIT ÊTRE REVISITÉE SANS DÉMAGOGIE

  9. MOI MON PROBLÈME N’EST PAS LÀ. ACCORD OU PAS, SIGNATURE OU PAS SIGNATURE, VALETTE OU PAS, QUE PEUT LE GOUVERNEMENT DU MALI QUAND DES RESSORTISSANTS SONT EN SITUATION IRRÉGULIÈRE ET DOIVENT REVENIR. CERTAINEMENT LE GOUVERNEMENT A MENTI. CE QUI EST GRAVE MAIS JE LE DIS ET JE LE RÉPÈTE, MÊME UN DJINÈ BLÉN À KOULOUBA NE PEUT EMPÊCHER L’EXPULSION DES IRRÉGULIERS. CHERCHONS À RÉSOUDRE LE PROBLÈME À L’INTERNE AU LIEU DE PERDRE LE TEMPS. HALI SINI OU BÈ GUÈN. ON NE PEUT RIEN

    • VERITAS, le gouvernement du Mali ne peut rien mais il y a des associations et même des citoyens Européens qui emmerdent leurs autorités et protègent les migrants. Signer pareil document facilite la tâche des autorités et complique le travail des défenseurs.

      Croyez-vous que c’est pour rien que depuis plusieurs années l’UE cherche à faire signer ce document par nos états ?

  10. 1- M le Prof, avec tout le respect que l’on vous doit, on serait ravi si vous traduisez tout ce latin dans une langue que les Maliens comprendront. Il y a eu Barkhane, il y a eu Alger et maintenant ce communiqué, ils produisent tous des effets…

    – L’accord de défense, qui stipule aussi qu’aucune autorité malienne ne peut et doit se rendre là où Barkhane opère et de surcroît sur le territoire malien!
    – L’accord d’Alger , qui stipule aussi qu’il faut une autorisation spéciale de la Minusma pour se rendre à Kidal, nous qui y sommes nés là-bas!
    – Le communiqué stipule-t-il aussi qu’il faut réadmettre un clandestin en compagnie de son ministre dans le même avion!!!

    2- Le ver est déjà dans le fruit, M le professeur. Il est temps d’arrêter de s’amuser avec l’existence des gens, de les berner avec des textes qu’ils ne comprendront jamais…

    3- Il ne saurait y avoir de polémique sur la nature politique ou juridique de ce communiqué conjoint, il faut simplement voir le réel, le réel est que pendant que tous ces accords ou pas accords sont entrain d’être ‘appliqués sur le terrain, paradoxalement nos autorités n’ont mieux à faire que de mentir et démentir…

    • Et pourtant le professeur a été clair quand il dit «cette position de la C.I.J vient ainsi carrément contredire l’ affirmation sèche faite par le ministère des affaires étrangères en en relativant la portée absolue »
      Cette position est :il n’existe pas «de règle de droit international interdisant qu’ un communiqué conjoint constitue un accord international .Voir l’ arrêt de la cour internationale de justice du 19 décembre 1978 dans l’ affaire du plateau continental de la mer âgée opposant la Grèce et la Turquie ,recueil 1978,paragraphe 39.
      Le professeur est on ne peut plus clair.
      Ça veut dire que si l’union européenne commence à appliquer le contenu du communiqué conjoint et que le gouvernement l’attaque à la cour internationale de justice,il ne pourra pas empêcher son application.
      LE COMMUNIQUÉ CONJOINT EST BEL ET BIEN UN ACCORD.

      • Le problème n’est pas le professeur!

        Sauf qu’il va falloir à un certain moment donné expliquer tout cela aux populations maliennes qui ne comprennent pas le Francais! Encore moins de notions de droit. Parce que c’est eux qui votent au finish et ont le droit de le savoir…pas certainement avec ce que nos autorités les présentent depuis des années… !

  11. DR FOMBA
    L’ACCORD DE DÉFENSE
    L’ACCORD D’ALGER SUR LA DISLOCATION DU MALI
    L’ACCORD SUR LE RAPATRIEMENNT DES MALIENS
    TOUS CES ACCORDS SOUS MANDÉ FOUGARIBA ONT ÉTÉ IMPOSÉ AU MALI.

    AUCUN MALIEN, N’A PARTICIPÉ À LA RÉDACTION DE L’ACCORD D’ALGER
    L’ACCORD D’ALGER N’A PAS ÉTÉ SOUMIS À L’ASSEMBLÉE NATIONALE..

    L’ASSEMBLÉE NATIONALE N’A VU L’ACCORD QUE QUAND L’OPPOSITION A CONTESTÉ SA CONSTITUTONNALITÉ…IL ÉTAIT DÉJÀ SIGNÉ PAR LE GOUVERNEMENT BIEN AVANT LES BANDITS DU MNLA

    OÙ ÉTIEZ-VOUS DR FOMBA….GRAND JURISTE EN DROIT INTERNATIONAL
    C’EST VOTRE DEVOIR ET JE PARLE DE TOUS LES FILS ET FILLES DU MALI.
    DES JURISTES EN DROIT INTERNATIONAL ET EN RELATIONS INTERNATIONALES…

    PERSONNE NE DIT MOT ALORS QUE NOTRE PAYS EST BAFOUÉ PAR UN FÊTARD, UN INCAPABLE, UN INCONSCIENT, UN IMPOSTEUR, UN USURPAPTEUR, UN MALADE, UN MÉGALOMANE, UN MAFIEUX…

    SI VOUS NE VOUS REVEILLEZ PAS, VOS ÉTUDES NE VOUS AURAIENT SERVI À RIEN…PARCE QUE C’EST LA SEULE ET UNIQUE OCCASION DE REDONNER AU MALI NOTRE PATRIE..CAR CETTE PATRIE NOUS A TOUT DONNÉ.
    UTILISEZ LES RADIOS PRIVÉES, LES TÉLÉ PRIVÉES, LES FORUM, ORGANISEZ DES CONFÉRENCES, DES DÉBATS CONTRADICTOIRES…
    FAITES TOUT CE QUE VOUS POUVEZ…..

  12. Une question au Dr Fomba. Un Ministre peut-il signer un accord international sans que cet accord soit validé par l’Assemblée Nationale ?

    • Tanfes pas set que set pauvre Jan sont_a 99:89/00 des kayesien la population le plus himilleir au Mali mais set pauvre Jan peuvent compter sur le tout puissant Allah puisque il sont en ou d’autres coins du monde pour nourrir l’air famille aussi bien que l’air contribution mangeur dans toutes l’Afrique en passant par les banques pour vous dire on_a d’autres capacité vous lais verrai 2018 au selc
      Présidentiel membre de l”association mais propre mon grand le professeur je tant prix t’ai laissé pas manipuler les monde ne dormais plus soi vigilant salut prof à bientôt

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