Être infirmière en temps de crise de COVID : Le choix assumé de Sacko Mariam Keïta

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Intégrer le corps médical était un rêve qu’elle a nourri durant  toute enfance.  A l’obtention de son diplôme d’infirmière à Ecole secondaire de la Santé de N’Tomikorobougou (actuelle INFS), elle le réalise et l’exercera pendant 32 ans, dans le même Centre de santé. En pleine crise sanitaire, Sacko Mariam Keïta continue de diriger une unité au Centre de santé communautaire de Banconi (Asacoba), qui n’a pas marqué de pause depuis l’apparition du Covid au Mali.

 

Mme Sacko Mariam Kéita en pleine activité au Cscom de Banconi

 

Seule infirmière dans sa famille, Sacko Mariam Keïta ne se voit pas laisser sa blouse blanche. Bien que la porte en ce temps de crise l’expose aussi à des risques de contamination en longueur de journée.

« Au début de la pandémie, mes enfants avaient eu peur parce que je venais travailler avec la communauté. Mon premier fils même m’avait dit d’arrêter le travail un moment. Qu’avez-vous répondu ? Si tout le personnel de santé doit arrêter de travailler parce qu’il y a une pandémie, qui va soigner les gens ? Petit à petit, ils ont repris confiance. Ça va maintenant », répond-elle.

 

Mariam Keïta intègre, à la suite d’un concours, le Centre de santé communautaire de Banconi (Asacoba) début mars 1989. Nouvellement créée par une association de santé communautaire du même quartier, la jeune diplômée devient alors la première infirmière et rejoint une équipe de trois personnes, un médecin et un gardien.  « J’ai commencé en tant qu’infirmière d’Etat. Mais, le médecin avait besoin d’aide. Je l’aidais pour la consultation », dit-elle. Elle raconte les premières années de sa vie de jeune infirmière où elle recevait un salaire mensuel de 15 000 F CFA. Travailler comme infirmière dans un Centre de santé communautaire, selon Mariam, demandait plus de disponibilités, mais également de patiences. « En ce moment, il n’y avait pas de travail. Les CSCom c’est comme une société à part qui dépend de la communauté. Tout est géré par elle. Les dépenses de fonctionnement et nos salaires sont payés à partir des tickets payés par les patients. La communauté me donnait le salaire d’une aide-soignante au début. Au bout de six mois, on me donnait 30 000 F CFA. De 89 à 92, on a fait une augmentation à 72 000 F CFA », se souvient-elle.

D’une maison en allocation, où le centre a commencé ses consultations à un Centre de santé communautaire à Vocation, après 32 ans de service, Mme Sacko se dit fière de faire partie de cette famille, qui, forme chaque année des centaines de stagiaires. « Asacoba c’est comme une école. On revoit chaque année, plus de 100 stagiaires dans le cadre de leur formation. C’est une fierté même si on ne peut pas se comparer à nos promotionnaires des Centres de santé publique sur le traitement salarial ».

Une autre raison l’attache aussi à ce centre, même si pour le moment aucun de ses quatre enfants ne veut embrasser le métier de maman. « Chaque  fois que je sors pour la ville, pour le marché, il y a une ou deux personnes qui m’appellent aw ka Dogotoroso muso, notre infirmière et me présentent à leurs amis. Pour moi, cela vaut plus que de l’or. Seul le travail bien fait peut nous apporter ça. J’ai opté pour soigner les gens. Je ne ferai que ça », se glorifie-t-elle. En laissant fièrement sur ses lèvres un sourire volant, elle poursuit, « j’ai eu la chance d’avoir un mari compréhensif qui m’aide depuis toujours dans ce travail ».

Avec ses expériences acquises, Mme Sacko Mariam Keïta dirige à ce jour le Programme élargi de vaccination (Pev) du CSCom-U de Banconi. Un service n’a pas connu d’arrêt de travail depuis l’apparition de la pandémie au Mali, en mi-mars. Pour limiter les risques de contamination, l’infirmière s’est imposée une routine.  « A la descente, je me rechange en laissant toutes ses affaires au bureau. La chaussure que je porte aussi pour venir au bureau, je l’enlève dans la cour. Nous avons mis un seau contenant de l’eau de javel à la porte. Je les désinfecte et je relave mes mains avant de rentrer à la maison », explique-t-elle. Qui dit s’assurer aussi du respect des règles de prévention par son mari et ses quatre enfants ainsi bien que ses employés de la maison.

Mme Fofana Aîchata Konaté et Mme Diarra Mouneïssa Koné, des collègues avec qui elle travaille depuis plus de 20 ans, voient en Mariam « une personne courageuse, dynamique et passionnée par son amour, qui n’hésite pas de venir au secours des enfants malades ou malnutris, des personnes démunies ».

A Presque deux pas de la retraite, Mme Sacko Mariam Keïta comme d’autres infirmières d’Etat des Centres de santé communautés espèrent bénéficier des mêmes droits qu’accorde l’Etat à leurs promotionnaires des Centres de santé publique.

Kadiatou Mouyi Doumbia

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