Le Droit D’en Parler : Vols, abus de confiance, escroqueries : Faut-il se rendre justice ?

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J’ai assez parlé de la déliquescence de nos valeurs et de belles contributions ont souvent ajouté de l’eau à mon moulin. Mais faut-il se lasser d’interpeller ceux qui doivent l’être quand la confusion règne autour du rôle des repères sociaux conventionnels vers lesquels nous sommes obligés d’aller lorsque nous nous sentons injustement bafoués, humiliés, ridiculisés ? Cette semaine, je voudrais inviter chaque lecteur à réfléchir sur un cas, parmi tant d’autres, vécus au quotidien par nombre d’entre nous. Ce récit rapporté par le jeune Moussa Kalapo de la rédaction d’Avenue 223 a quelque chose d’atypique et vous comprendrez pourquoi.

Il s’agit de l’histoire d’une citoyenne malienne. Une histoire qui remonte au début du mois de juillet. Elle a sa voiture mais par un concours de circonstance, elle s’est vue obligée d’emprunter un Sotrama, un de ces mini – bus verts souvent aux mains de gens aux cœurs noirs. C’était sur l’axe Banconi -Djalacorodji, un matin, à 7 heures 04 minutes. Elle se rendait sur son lieu de travail. Je préfère lui donner la parole pour mieux raconter sa mésaventure qui peut faire sourire, mais qui devrait faire réfléchir à la façon dont on peut s’engager à changer certains comportements dans notre société.

" Quand l’apprenti a commencé son encaissement, je lui ai remis une pièce de 200 FCFA. Le tarif normal de  mon trajet étant de 125 F CFA, je m’attendais à recevoir 75 FCFA en retour. Mais l’apprenti me remet 50 FCFA. Je lui réclame le reste de la monnaie. Il me laisse entendre qu’il me le remettra après. Alors j’attends.

Arrivée à destination, je rappelle l’apprenti qu’il me doit encore 25 FCFA. Il me demande de descendre d’abord, le temps de prendre la monnaie avec son patron. Dès que je suis descendue, l’apprenti a demandé au chauffeur de lui remettre les 25 FCFA mais celui a dit qu’il n’avait pas de monnaie. Alors, sans un mot d’excuse, l’apprenti donne à son patron le signal de départ et je vois le Sotrama partir !

Moi je leur ai crié qu’ils vont me payer mon dû, même si cela devait se passer à l’au-delà.

Le soir, à la descente, je suis allée porter plainte contre le chauffeur et son apprenti, au commissariat du 7ème arrondissement. Là-bas, on m’a laissé entendre que c’est le troisième arrondissement qui était qualifié pour recevoir ma plainte vu que l’axe du  Sotrama que j’ai emprunté relève de sa compétence.

Au 3ème arrondissement, les policiers me prennent pour une folle ! Il y en a même un qui me dit que si c’est pour une histoire de 25 FCFA, il est inutile que je porte plainte parce qu’il va me les rembourser. Moi je lui rétorque que ma démarche n’est pas celle d’une femme misérable à ce point et que ce n’est pas une affaire de 25 FCFA mais une affaire de morale. La preuve, j’étais à la police à bord de ma propre voiture. Le comportement de l’apprenti et son chauffeur s’apparente à un abus de confiance, à un vol. On m’a alors demandé le N° du véhicule. Je l’ai donné : T  0079  MD. Puis, je suis rentrée chez moi.

Après trois jours, me rendant compte que les policiers du 3ème ne donnaient aucune suite à ma plainte dont ils semblaient se moquer éperdument, je suis retournée au 7ème arrondissement pour expliquer l’attitude désinvolte des policiers du 3ème. Là-bas, j’ai encore déposé une plainte, en suivant la procédure normale. Mais jusqu’à ce jour, l’acte odieux du chauffeur et de son apprenti reste impuni…"

Chers lecteurs, que vous inspire ce récit ? Beaucoup diront "Bon sang, elle exagère !" Sans se rendre compte que c’est à force de se taire et de laisser faire que les affaires dégénèrent. Avec Madame Oumou Bah, je me pose des questions: à partir de quel degré sur l’échelle de gravité des infractions les autorités dites compétentes doivent-elles ou peuvent-elles intervenir? Y a-t-il des délits irrecevables et pour lesquels il vaudrait mieux pour le citoyen se rendre justice plutôt que d’aller subir la raillerie de mauvais goût de policiers dont certains donnent l’impression de ne pas savoir ce que signifie être policier ou "force de l’ordre" ? Le Mali ira-t-il de l’avant si un acte immoral, si minime soit-il, reste impuni ? Peut-on moraliser la vie publique si des citoyens peuvent se moquer impunément d’autres citoyens, parce qu’ils savent que nos lois sont trop élastiques et trop sélectives ? Si l’on sait que celui qui vole un œuf volera un bœuf, ne doit-on pas prévenir en condamnant tous les larcins, objets de plainte ? Au-delà de la somme de 25 FCFA, notre concitoyenne n’a-t-elle pas subi un préjudice, peu importe le qualificatif qu’on peut lui donner ? N’est-ce pas un risque dangereux que de laisser des inconscients faire du " je-m’en-foutisme " un mode de vie ? Ces questions sont graves et méritent des réponses claires, si nous ne sommes pas dans une République de l’anarchie et de la chienlit.

Bien à vous.

MINGA S.Siddick

 

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