Mali: «l’ensemble de la nation est concerné» par la corruption

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Amadou Ousmane Touré, Vérificateur général au Mali. DR
Amadou Ousmane Touré, Vérificateur général au Mali.
DR

L’ancien procureur Amadou Ousmane Touré occupe le poste de Vérificateur général depuis bientôt trois ans. Son dernier rapport est accablant, notamment sur la gestion du PMU et l’attribution de la troisème licence de téléphonie mobile au groupe Planor Monaco Telecom. Pour lui, c’est « l’ensemble de la nation qui est concernée par ce phénomène » de corruption.

RFI : Dans votre rapport 2012, qui vient d’être publié, vous écrivez qu’une véritable mafia financière est en train de se « momifier ». Les mots sont forts. Quels sont les services de l’Etat les plus « momifiés », comme vous le dites ?

Amadou Ousmane Touré : Ils sont forts, mais ils sont réels. Ils sont symboliques. Aujourd’hui, ce sont essentiellement les services chargés de l’assiette, les services chargés du recouvrement.

 

 

C’est-à-dire les services fiscaux ?

Les services fiscaux, les services douaniers, les services domaniaux… Plus d’autres services, aujourd’hui, qui reçoivent des fonds des partenaires techniques et financiers : des services sociaux, sanitaires, des services de l’éducation… Aujourd’hui c’est l’ensemble de la nation qui est concernée par ce phénomène.

 

 

Sur le PMU, le Pari mutuel urbain, on parle de 34 milliards de francs CFA de pertes. Confirmez-vous ces chiffres ?

Je le confirme.

 

 

Trente quatre milliards, cela représente quelque 3 % du budget de l’Etat du Mali. Y a-t-il une administration qui était compétente et qui est particulièrement visée ?

Personnellement, et ceci n’engage que ma propre personne, je pense que le ministère de l’Economie et des Finances de la République du Mali devrait mieux veiller sur ses intérêts, au niveau du PMU. Je ne dis pas que le ministère de l’Economie et des Finances a une quelconque part de responsabilité, pénale ou administrative. Je dis que l’intérêt d’un suivi, d’une évaluation des intérêts de l’Etat, est absolument nécessaire.

 

 

L’un des grands scandales du régime de transition, c’est l’attribution de la troisième licence de téléphonie mobile au groupe Planor Monaco Telecom. Vous dites que l’autorité qui a attribué cette licence était « matériellement incompétente ». S’agit-il du ministère de l’Economie et de Finances ou de celui de la Poste et des Nouvelles technologies ?

En fait, c’est une autorité qui a été créée pour appuyer le processus du dossier d’appel d’offre.

 

 

Et cette autorité ad-hoc était sous la tutelle de quel ministère ?

Du ministère, à l’époque, des Télécommunications.

 

 

Est-ce qu’il y a eu favoritisme, lors de l’attribution de cette troisième licence ?

On peut penser qu’il y a eu favoritisme. Toutes les fois qu’il y a violation d’une règle de passation des marchés ou de délégation au service public au point qu’on ait besoin démontrer qu’il y a eu enrichissement, qu’il y a eu transfert d’argent, le fait de violer une disposition constitue en soi un délit de favoritisme. Mais nous ne l’avons pas retenu. Nous avons laissé cette recommandation ouverte. Il appartiendra au procureur d’entamer des poursuites et de décider s’il peut retenir le qualificatif de favoritisme ou pas.

 

 

En juin dernier, le ministre de l’Economie de l’époque, Tiéna Coulibaly, a affirmé que tout le processus sur cette troisième licence avait été conduit conformément aux dispositions du Code des marchés publics. Est-ce qu’il s’est trompé ?

Je pense sincèrement que oui. Je pense que, lui, il était certainement de bonne foi. Mais il s’est trompé quand même.

 

 

Et s’est-il trompé parce qu’il était complice ?

Non, je ne crois pas. Peut-être que la crise en cours a perturbé les finances de l’Etat et l’économie. Le gouvernement devrait annuler la procédure et reprendre sur des bases saines.

 

 

A l’époque où cette troisième licence a été attribuée, le Mali était gouverné par le président Dioncunda Traoré, le Premier ministre Modibo Diarra et le capitaine Sanogo. De ces trois autorités, quelle est celle qui a été la plus défaillante ?

Je ne parlerai pas de défaillance. Je vous dirais simplement que l’institution qui a conduit ce processus-là, c’est le gouvernement de la République du Mali.

 

 

Donc, le Premier ministre Cheick Modibo Diarra ?

Je ne saurais le dire. Je sais simplement que c’est un Conseil des ministres, sur présentation du rapport du ministre des Finances. Le gouvernement a décidé. Et le chef du gouvernement , Cheick Modibo Diarra, comme le Conseil des ministres, sont présidés par le président de la République.

 

 

Voulez-vous dire en fait que les trois autorités de l’époque étaient complices ?

Je ne veux rien dire ! Je ne l’ai pas dit. Je ne saurais le dire.

 

 

Ce que disent beaucoup de Maliens, c’est que votre travail est louable, mais qu’il ne sert à rien. Car le procureur est certes saisi, mais en réalité il n’y a aucune poursuite judiciaire.

 

 

Oui, effectivement. C’est le sentiment de beaucoup de Maliens. C’est ce sentiment que nous allons essayer de corriger, de transformer en une véritable action. Moi-même, je suis magistrat de formation. Nous avons créé à cet effet une cellule juridique au niveau du bureau. Ils montent les dossiers, afin que le procureur puisse être bien saisi.

 

 

Est-ce que des responsables du régime de transition vont avoir des comptes à rendre à la justice ?

Il est fort possible que oui, parce que nous visons de expréssement les noms des gestionnaires. Nous ne laissons pas le flou sur les gestionnaires identifiés.

 

 

Et quand vous parlez des gestionnaires, vous ne parlez que des haut-fonctionnaires, ou vous parlez aussi des ministres de l’époque ?

En ce qui concerne la responsabilité des ministres, vous savez, elle est très lourde à établir. C’est ce que nous avons tous déploré. La responsabilité émane des ministres, elle devrait être mise en œuvre de façon beaucoup plus fluide. Parce que tout fait commis dans l’exercice de ces fonctions relève de la Haute cour de justice.

 

 

Et de fait, aujourd’hui, les anciens ministres, anciens Premiers ministres, anciens présidents, se sentent tous intouchables, c’est ça ?

Presque, oui…

 

 

Et vous le regrettez ?

Absolument ! Les ministres, vis-à-vis desquels des faits précis ont été rapportés, des faits prouvés, il faudrait bien qu’ils comparaissent.

 

 

Et aujourd’hui, ils sont protégés par une Haute cour qui est constituée par…

Qui n’a jamais existée… C’est ça le problème. Elle n’a jamais existé, ou presque. Il n’est pas juste que l’on puisse profiter de ces situations de privilèges. Cela se traduit par des situations d’impunité. Ou bien vous ne gérez pas.

 

Par Christophe Boisbouvier / rfi.fr

 

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27 COMMENTAIRES

  1. Aucun foctionnement doit posseder une voiture ou un batiment sans contracter un pret sur 25 ou 30 an ibk doit saisir tous les biens des fonctionnaire cad l immobulier il y a aucun qui n a pas ete fait par les bien public

  2. Mali: «l’ensemble de la nation est concerné» par la corruption

    NOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOON !

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    MAIS IL EST GONFLE LE PROC ! 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆

    ….

  3. C’est plus que le cancer cancer de la Société malienne : meme dans les familles :mrgreen: . Les gros bonnets et hauts fonctionnaires sont protégés par eux memes dans la sphere infernale..
    . Il faut que l’etat commence a montrer des exemples de quelques decennies decennies de condamnation et meme de l’emprisonnement a vie avec des saisies de biens biens comme cela les corrupteurs comme mon frere Moussa Ag et corrompu comme peut etre moi meme :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen: feront gaffe sinon le gateau est servi juste serons Nouououousssss. N’est pas cher Soldat Rate en passant par le General sans oublier frere Vision2012 aussi et bien d’autres. 😉 . C’est gratuit

  4. LA CORRUPTION EST LE SPORT NATIONAL DU MALI. ELLE VIENT AVANT LE FOOTBALL MAIS SEULS LES HAUTS DIGNITAIRES DU REGIME PEUVENT PRATIQUER CE SPORT! LE PETIT PEUPLE JOUE LE ROLE DES SUPPORTERS. IL APPLAUDIT!!!
    ALLEZ TOURE’, JE VOUS SOUHAITE UNE BONNE CHANCE!

  5. Qui est ce qui peut me dire le nom de famille du PDG du nouvel opérateur de téléphonie au Mali. A ce dernier je lui donnerai 20/20

  6. savez-vous k les Compaoré st avec Sanogo pour ce contrat d’opérateur de téléphonie au Mali, le saviez vous que c’était pour assurer l’avenir de et de ses descendants?

    • C’est vrai pour des raison d’Etat, le VEGAL aussi sait la faille mais ne le dira jamais. Je ne lui en veux pas

  7. Laissez le VEGAL parler, il sait où se trouve la faille. Ni du côté du président Dioncounda (Incapable à l’époque de diriger convenablement sous peine de se faire lyncher) ni du côté du premier Ministre Cheick Modibo Diarra ( l’ont sait après découverte des manigance comment il a été déposé et humilié sur l’ORTM) ni du côté de son éminence matière grise du Mali (Tiénan Coulibaly le plus pour moi grand intellectuel du mali pour ses savoirs) en prenez vous plutôt à Sanogo qui est le premier actionnaire de ce contrat. Les autres étaient là impuissants de réagir sinon de se retrouver dans un charnier à Diago en son temps.
    S’il vous plait Maliennes et maliens n’en voulez point ni à Dioncouda ni à Cheick Modibo ni à Tiénan.
    Méditez sur ce que je dis.
    Je vous remercie.

    • je voudrai faire encore une révélation aux maliens. Tjrs moi ‘Couzpré’ savez-vous k les Compaoré st avec Sanogo pour ce contrat du mali? voulez-vous plus d’explicatuons alors posez des questions et j repondrai

  8. Ce qui est déplorable c’est que ce monsieur parlent comme si la corruption a débuté au Mali pendant la période de transition de 2012-2013.

    Il y a surement sensation de l’odeur d’un règlement de compte.

    A l’analyse de ses propos, le rapport 2012 se présente plus comme un arrêté de jugement et non un rapport de vérification.

  9. C’est vrai que “l’ensemble de la nation est concerné” par le phénomène de la corruption. Mais pour s’attaquer au mal il faut impérativement améliorer les conditions de vie des fonctionnaires et être intraitable avec les Fossoyeurs de la nation malienne.

    • Mon frère, tous les maliens se trouvent traités avec ces mêmes conditions, donc certains ne peuvent pas se permettre de jouir impunément des ressources du pays alors que d’autre sont dans la misère. Que tout le monde se met dans le droit chemin pour aider ce pays à se relever et prendre un élan salvateur!

  10. Merci M. Touré pour le courage.

    Il faut un véritable nouveau projet pour la société malienne. La majorité des pratiques et habitudes actuelles sont des sources de régression sociale. Tout doit être revu : le fonctionnement des familles, la place des enfants, la formation, les examens et concours, les promotions ou nominations, la pratique de la politique. Bref la société malienne doit être repensée. Il ne sert à rien de perdre son temps à évoquer souvent des problèmes qui relèvent d’une cause profonde et ignorée.

    Attaquez-vous aux conséquences en ignorant les causes et le mal ne fera qu’empirer.

  11. Quand les enfants savent que ce que leur père possède vient de la corruption ils deviennent tièdes ou agressifs face au discours anti-corruption.

    La roue de l’histoire tourne de façon implacable, dites à vos geniteurs qui volent qu’ils iront soit en prison soit en enfer.

  12. Moi je souhaite aussi qu’on s’attaque à la petite corruption…. Par exemple, les 1000 F que les policiers encaissent en lieu et place du Trésor public coûtent en définitive un manque à gagner de plusieurs milliards à l’Etat…..

  13. Toutes les vérités ne sont pas bonne à dire

    M. Amadou Ousmane Touré, vous apprendrez à vos dépens qu’il ne faut pas toujours dire ce que l’on pense, sinon vous vous attirez les foudres qui viendront de partout !

  14. Que des conneries racontées par ce Monsieur qui aurait ordonné à son Comptable de faire un acte malsain d’après certaines sources

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