Moments clés de la visite historique de Assimi à Moscou : Carnet de voyage au pays de Vladimir Poutine

Moscou a fait ses adieux au Général d'Armée Assimi Goïta. Le chef de l'Etat a quitté la Fédération de Russie le jeudi 26 juin 2025 pour rallier Bamako avec le même avion de commandement affrété à son honneur au nom de l'amitié russo.maliennes vieille de plusieurs décennies comme il l'a eu à le rappeler dans ses allocutions

30 Juin 2025 - 01:54
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Moments clés de la visite historique de Assimi à Moscou :  Carnet de voyage au pays de Vladimir Poutine

La fin de ce séjour officiel du président Goïta, laisse un sentiment palpable : celui d'un tournant. Cinq jours intenses, d'une portée diplomatique et stratégique telle qu'ils marqueront sans doute les annales de l'histoire malienne et africaine. C'est le récit d'un Mali en pleine réaffirmation, venu sceller des alliances nouvelles, avec une détermination sans faille.

Au moment où les ministres de la Défense des pays membres de l’AES se réunissaient à Bamako, Moscou s'apprêtait à recevoir Assimi Goïta pour insuffler une nouvelle âme à la coopération Mali-Russie. Avant même que l'avion présidentiel ne décolle, le terrain était préparé. En effet, quelques jours auparavant, les 18 et 19 juin, Bamako avait vibré au rythme de la rencontre des ministres de la Défense de l'Alliance des États du Sahel (AES). Cette rencontre avait mis en lumière la volonté inébranlable du Mali, du Burkina Faso et du Niger de forger une sécurité régionale souveraine, face à des menaces qualifiées de "mafieuses et criminelles" et aux "manipulations d'acteurs extrarégionaux". Le ministre malien avait d'ailleurs insisté sur une défense commune, soulignant les succès des opérations comme YEREKO et la coordination aérienne renforcée. L'approbation du Concept d’Opérations (CONOPS) commun et l'annonce de la Force Unifiée AES (FU-AES) avec un futur centre de commandement conjoint d'ici fin 2025, conféraient au Général Goïta une légitimité renforcée, une mission claire : celle de concrétiser une vision de souveraineté régionale sur la scène mondiale. C'est avec ce mandat fort que le Président s'est envolé.

Cap sur Moscou ou la trajectoire d'une rupture

Samedi 22 juin 2025. L'horloge affichait 21h02 à Bamako lorsque les moteurs de l'avion long-courrier, spécialement affrété par la Fédération de Russie, se sont éveillés sur le tarmac de l'aéroport international Modibo Keïta-Sénou. À bord, le Chef d'État, silhouette impassible, portait le poids d'une nation et l'audace d'une nouvelle trajectoire. Ce n'était pas seulement un déplacement ; c'était un message, une trajectoire assumée. L'utilisation d'un appareil russe, à elle seule, était une anecdote éloquente, une déclaration silencieuse sur le choix résolu de diversifier les partenariats du Mali.

À l'arrivée à Moscou, l'accueil fut à la hauteur des enjeux. Le Président Goïta fut reçu avec tous les honneurs dignes de son rang par les plus hautes autorités russes et le corps diplomatique. Au pied du Kremlin, l'atmosphère était solennelle, empreinte d'une reconnaissance réciproque. Dès cet instant, le ton était donné : cette visite ne serait pas ordinaire.

Journée historique au cœur du Kremlin

La journée du lundi 23 juin 2025 restera gravée comme un moment pivot. En matinée, un hommage solennel et porteur de sens donne le ton. Dès l'aube, dans la fraîcheur sereine du Jardin Alexandre, le Président Goïta a procédé à un dépôt de gerbe de fleurs sur la Tombe du Soldat inconnu. Face à la flamme éternelle et aux gardes d'honneur russes, son geste fut empreint d'une profonde solennité, un hommage silencieux aux sacrifices pour la patrie. Cette anecdote protocolaire était bien plus qu'une formalité : elle posait le cadre d'une journée placée sous le sceau du respect mutuel, de la souveraineté assumée et de la volonté d'inscrire les relations bilatérales dans une dynamique durable.

Dans l'après-midi, le dialogue au sommet avec le Président Poutine en toute simplicité, fut tout de même empreinte d'une charge émotive partagée avec la Diaspora. Les dorures séculaires du Kremlin ont accueilli le cœur politique de la visite. Le Président de la Transition a été reçu par Vladimir Poutine, Président de la Fédération de Russie. Dans ce cadre historique, Vladimir Poutine a rappelé avec une chaleur notable les 65 ans de liens diplomatiques et l'impressionnant bilan de plus de 10.000 Maliens formés dans les universités russes. Le chef d'État russe a esquissé un avenir commun ambitieux, couvrant l'énergie, la sécurité, l'économie et les investissements. Le Général Assimi Goïta, avec une assurance toute militaire, a répondu : «Nous reconnaissons l'excellence de notre partenariat avec la Fédération de Russie. Grâce à lui, nous obtenons de bons résultats». Ces mots résonnent comme une approbation claire et une vision pragmatique.

Mais au-delà des poignées de main officielles, une anecdote a particulièrement marqué les esprits : l'accueil en masse de la communauté malienne établie à Moscou, reçue par le Président Poutine lui-même au Kremlin. L'effervescence de la diaspora, son enthousiasme palpable, traduisait une fierté immense et une reconnaissance du lien direct qui se tissait. Ce fut un moment émouvant, soulignant l'importance humaine de cette alliance.

Les accords révélateurs : trois piliers pour l'avenir du Mali

Le point culminant de cette journée fut la signature de trois accords majeurs dans la prestigieuse salle de négociation du Kremlin, des actes qui dessinent une nouvelle ère pour le Mali. Avec la création d’une Commission intergouvernementale russo-malienne sur la coopération commerciale, économique, scientifique et technique, un cadre structurant innovant, c'est une porte ouverte sur des investissements russes concrets dans des secteurs clés comme l'agriculture, les infrastructures, et le numérique, facilitant ainsi l'accès à des technologies de pointe.

L'autre accord stratégique lie le Mali à la société d’État russe ROSATOM sur l’utilisation de l’énergie atomique à des fins pacifiques. C'est une réponse structurelle et audacieuse à la crise énergétique malienne, promettant le développement d'infrastructures, le transfert de compétences et la formation d'ingénieurs maliens. C'est un instrument puissant de souveraineté énergétique.

Un accord de principe sur les fondements des relations bilatérales a été trouvé pour établir un pacte politique global qui va au-delà de la diplomatie. Il renforce la coopération sécuritaire (lutte antiterroriste, crime organisé), prévoit formation et fourniture d'équipements, et assure un appui mutuel dans les enceintes internationales. Un message clair : Moscou et Bamako partagent désormais des intérêts stratégiques et entendent les défendre ensemble.

Au-delà de Moscou, visite guidée des Centres d'Innovation

Les journées suivantes, du mardi 24 au jeudi 26 juin, ont permis d'approfondir la portée de cette visite. L'attention s'est portée sur la concrétisation des engagements et l'exploration de nouvelles synergies. L'une des étapes les plus révélatrices fut la visite du Président Goïta à Kazan, dans le Tatarstan, et notamment à Innopolis. Ce n'est pas un hasard : le Tatarstan est un «laboratoire industriel et technologique de la Russie moderne». Cette plongée au cœur de l'innovation russe a démontré la volonté du Mali de miser sur l'avenir, sur la transformation et sur l'indépendance économique. C'est une anecdote puissante qui contredit l'idée d'une simple alliance militaire ; elle illustre un partenariat tourné vers le développement concret et la valorisation des ressources humaines. Ces jours ont été assurément jalonnés de sessions de travail, de rencontres techniques, et de discussions pour ancrer durablement les projets sur le terrain.

Les enseignements d'une visite

Cette visite de cinq jours n'est pas une simple page dans l'agenda diplomatique. Elle marque un véritable réalignement souverain. Dans le contexte d'un Sahel confronté au retrait progressif d'anciens partenaires et à la montée en puissance d'alternatives, le Mali opère un choix décisif : celui de la diversification, de l'autonomie et d'une coopération pragmatique. Un Mali souverain sur l'échiquier mondial est en train de naître de cette Transition. Pour preuve, l'initiative d'une raffinerie industrielle d'or à Bamako, détenue majoritairement par l'État malien avec l'appui russe, en est la parfaite illustration : le Mali veut transformer ses richesses sur son propre sol, affirmer son indépendance économique.

En se rendant à Moscou, le Général Assimi Goïta n'a pas seulement répondu à une invitation. Il a pris position. Dans un monde qui tangue, le choix de ses alliés vaut déclaration de doctrine. La sienne semble désormais claire : le Mali se tient debout, et s'adresse à ceux qui ne le regardent pas de haut. C'est l'affirmation d'un Mali acteur, et non plus spectateur, de son propre destin et de celui de l'AES.

Dans ce repositionnement géopolitique, cette mission de six jours n’est ni une simple visite de courtoisie, ni une énième opération de communication. Elle est, par son essence même, un acte de souveraineté diplomatique retentissant. Elle est le fruit d’une vision claire et non négociable : celle d’un État africain qui refuse catégoriquement d’être assigné à résidence géopolitique, qui rejette le paternalisme international sous toutes ses formes, et qui tisse désormais ses partenariats sur la base inaliénable de l'égalité et du respect mutuel. C'est l'affirmation d'une Afrique qui, forte de ses aspirations légitimes, dit "oui" à elle-même, sans s’excuser d’exister ni de choisir sa voie. 

Khaly-Moustapha LEYE 

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