Assistance aéroportuaire : Un trou financier de 159,29 millions de FCFA décelé !

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La sélection par le Ministère chargé des transports du partenaire actuel comme attributaire provisoire, alors qu’il ne répondait pas à des critères exigés par le dossier de consultation restreinte internationale et qui, de plus, a fourni de faux numéros d’enregistrement au registre de Commerce dans sa soumission, traduisent en partie les défaillances qui ont entaché la gestion de la Société Assistance Aéroportuaire du Mali dès la phase conceptuelle du projet. En outre, le Ministère n’a jamais procédé à une évaluation des performances dudit partenaire, afin d’apprécier le respect de la mise en oeuvre de la convention de partenariat. Des dysfonctionnements ont également été relevés dans la mise en oeuvre de la convention de partenariat ainsi que des irrégularités financières aussi bien dans les opérations de collecte de recettes que dans les dépenses effectuées. De tels manquements ont occasionné, notamment, des pertes financières qui se chiffrent à 159,29 millions de FCFA au détriment de la Société Assistance Aéroportuaire du Mali qui demeure une société à participation publique majoritaire.

Précision : ASAM-SA est une société anonyme d’économie mixte au capital d’un milliard de FCFA détenu à 51% par l’Etat du Mali et à 49 % par des privés maliens. Elle assure l’assistance en escale à toutes les compagnies aériennes ayant une activité au Mali. À sa création, le Gouvernement du Mali a chargé le Ministre de l’Equipement et des Transports de choisir un Partenaire Technique et Financier (PTF) qui sera actionnaire à hauteur de 15% du capital de la société. A l’issue du processus de sélection, la convention a été signée avec la société Europe Handling Mali (EHM).

La mission de vérification a porté sur le processus de sélection du PTF, la mise en oeuvre de la convention de partenariat technique et financier, les recettes générées à travers les Lettres de Transport Aérien (LTA) et les Fiches de Touchée (FTO), ainsi que les dépenses effectuées par marchés, contrats, bons de commande/bons de travail et sur les caisses. Elle a concerné les exercices 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015 (1er trimestre 2015).

Pendant la période sous revue, la Société ASAM-SA a réalisé un chiffre d’affaires global de 26,81 milliards de FCFA; ce qui dénote d’un enjeu économique important pour le Mali.

Lors de ses vérifications à ASAM-SA, le Bureau du vérificateur a constaté de nombreux dysfonctionnements dans le contrôle interne ainsi que des irrégularités financières. Ces cas de violation se sont caractérisés par des manquements dans le processus de sélection du Partenaire Technique et Financier (PTF), la mise en oeuvre de la convention de partenariat technique et financier, la collecte des recettes, et les opérations de dépenses.

Au nombre des manquements relevés dans le processus de sélection du PTF, il y a le fait que  la commission de dépouillement, d’évaluation et de jugement a analysé des offres de manifestation d’intérêt déposées hors délai. Sur les trois offres analysées, une seule a été réceptionnée dans le délai indiqué. En effet, les plis n°2 et 3 ont été reçus respectivement le 18 avril et le 13 avril 2006, dates antérieures à la publication, même, de l’avis qui a été lancé le 11 mai 2006.

En outre, la commission de dépouillement de la consultation restreinte internationale a, contrairement aux critères du dossier de consultation restreinte, sélectionné un soumissionnaire n’ayant pas notamment l’expérience et le personnel qualifié. Le non-respect des critères d’évaluation, selon le BVG, peut amener la commission à sélectionner un PTF ne disposant des capacités pour fournir les services demandés.

Plus grave : la commission a retenu un PTF non immatriculé auprès de l’Administration fiscale. La société EHM, PTF signataire de la convention, ne disposait pas de Numéro d’identification Fiscale alors même que le dossier de consultation restreinte internationale le cite parmi les pièces à fournir par chaque membre individuel du groupement d’entreprises.

Le ministre chargé des Transports a signé la convention relative au Partenariat Technique et Financier dans le cadre de l’assistance en escale avec un prestataire différent de l’attributaire provisoire. Il a conclu ladite convention avec la société EHM au lieu du Groupement Europe Handling Mali/Groupe TOMOTA qui a été retenu suite aux travaux de la commission de dépouillement, d’évaluation et de jugement des offres.

Dans son rapport, le Végal recommande que ces manquements soient corrigés.

Plusieurs manquements ont été également relevés dans la mise en oeuvre de la convention de partenariat technique et financier. Le ministère chargé des Transports n’a pas évalué les performances du PTF. En effet, malgré les dispositions de la convention de partenariat technique et financier qui préconisent cette évaluation, le Ministère n’a pu fournir aucun rapport y afférent.

Le Ministre dudit département n’adresse pas de rapport annuel au Gouvernement sur la Société ASAM-SA, en violation des dispositions du Décret n°05-112/P-RM du 9 mars 2005 déterminant les modalités de participation de l’Etat au capital de la Société ASAM-SA qui en fait une exigence. L’absence d’un tel document ne permet pas à l’Etat de s’assurer de la mise en oeuvre conforme de la convention de partenariat.

Il (ministre) n’a pas rendu la convention conforme aux dispositions du décret relatif à l’assistance en escale sur les aéroports. Ladite convention fait du PTF le seul prestataire au Mali à travers la Société ASAM-SA qui exerce tous les services de l’activité en escale sur les plateformes aéroportuaires au Mali. Ce monopole des services de l’activité d’assistance en escale, concédé pour une durée de 25 ans renouvelable par tacite reconduction pour la même période, est contraire au Décret n°2011-600/P-RM du 16 septembre 2011 qui indique que le nombre de prestataires ou le nombre de transporteurs aériens autorisé ne peut être inférieur à deux par service. Le non-respect de cette disposition du décret susvisé fausse les règles de la libre concurrence dans le domaine de l’assistance en escale.

Il est recommandé au ministère de corriger les manquements constatés. Entre autres, il doit évaluer les performances du PTF conformément aux clauses de la convention, adresser au Gouvernement un rapport annuel sur la Société ASAM-SA conformément aux textes en vigueur, et rendre conformes les dispositions de la convention à celles du Décret n° 2011-600/P-RM du 16 septembre 2011 relativement à l’assistance en escale sur les aéroports.

Aussi, des manquements ont été relevés dans la collecte des recettes. Le Caissier du Centre Fret de la Société ASAM-SA n’a pas comptabilisé des recettes des Lettres de Transports Aériens (LTA). Des LTA physiques valorisées et archivées au Centre Fret n’ont pas fait l’objet d’enregistrement ni dans le brouillard de caisse ni dans la comptabilité de la Société ASAM-SA. Le montant total de ces LTA encaissées mais non comptabilisées est de 102,55 millions de FCFA. Le même Caissier a enregistré des montants inférieurs aux valeurs figurant sur des LTA. Le montant total enregistré est de 29,39 millions de FCFA alors que celui des LTA physiques s’élève à 57,42 millions de FCFA, soit un montant compromis de 28,03 millions de FCFA.

Le Vérificateur Général a également constaté des manquements dans les opérations de dépenses. La Société ASAM-SA a passé des marchés sans l’autorisation préalable de la Direction Générale des Marchés Publics et des Délégations de Service Public (DGMP-DSP). Les contrats de marchés conclus par la Société dont les montants atteignent 100 millions de francs CFA, seuil requérant l’avis de non-objection de la DGMP-DSP, n’ont pas été soumis à celle-ci pour son autorisation préalable. Ces marchés ont été passés soit par consultation directe, soit par consultation restreinte, en violation des dispositions du code des marchés publics. La non-soumission des marchés à l’autorisation préalable de la DGMP-DSP ne garantit pas la transparence du processus de passation des marchés.

Le Directeur Administratif et Financier a payé des travaux non exécutés. En effet, le contrôle d’effectivité de constructions a révélé que des travaux prévus dans deux contrats n’ont pas été exécutés ou ne l’ont été que partiellement. Le montant total de ces travaux non réalisés, mais payés s’élève à 8,14 millions de FCFA. En outre, le Directeur n’a pas retenu l’Impôt sur les Bénéfices Industriels et Commerciaux (IBIC) sur les paiements effectués aux prestataires locaux non immatriculés. Les retenues non opérées se chiffrent à 13,59 millions de FCFA. Il en est de même pour certains prestataires étrangers pour un montant total de 3,98 millions de FCFA.

Le Végal recommande au Directeur Administratif et Financier de soumettre les marchés de consultation directe ou restreinte à l’autorisation préalable de la DGMP-DSP conformément aux textes en vigueur, et retenir l’Impôt sur les Bénéfices Industriels et Commerciaux sur les prestataires locaux ne disposant pas de NIF et sur les prestataires étrangers qui ne sont pas permanemment établis au Mali. Au service des impôts, il est recommandé de recouvrer le montant de 13,59 millions de FCFA au titre de l’Impôt sur les Bénéfices Industriels et Commerciaux sur les prestataires locaux ne disposant pas de NIF, et les 3,98 millions de FCFA au titre de l’Impôt sur les Bénéfices Industriels et Commerciaux sur les prestataires étrangers.

Les constatations concernant la collecte des recettes n’ont pas fait l’objet de recommandations, car les faits y afférents sont susceptibles de constituer des infractions à la loi pénale. Ainsi, le Vérificateur général a dénonciation au Procureur de la République, les faits relatifs aux recettes encaissées mais non comptabilisées pour la somme de 102,55 millions de FCFA, aux Lettres de Transport Aériens (LTA) dont les valeurs ont été minorées pour un montant de 28,03 millions de FCFA, et ceux concernant les travaux payés non exécutés pour un montant total de 8,14 millions de FCFA.

I B D

 

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3 COMMENTAIRES

  1. Ses prérogatives doivent être renforcées afin que personne n’échappe à la justice. Les juges sont très gentils avec ceux-là qui pillent les deniers de l’état, mais intraitables avec les petits pickpockets qu’ils envoient parfois en prison pour un long séjour, après le vol d’unesimple mobylette. C’est parce que le voleur de moto n’a rien à offrir, et ça les énervent. Or, avec les gros bonnets, ils sont sûr de faire une bonne affaire car, les choses se négocient en terme de millions. Le Vérificateur, après avoir épinglé les auteurs de crimes économiques et détournement en tout genre, doit avoir la prérogative de les déposer directement entre les mains du Procureur, séparément du dépôt théâtral des rapports entre les mains du Président..

  2. Le Bureau du Vérificateur Général est une très bonne chose au Mali s’il gardait ou continue à garder les pieds sur terre.

  3. merci tout simplement aux hommes et femmes du BVGAL POUR pour en faite enseigner les maliens merci encore une fois!

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