G5 Sahel: Bamboula autour de 250000 euros et 600 000 euros pour des « études bidons » commandées par l’ancien Secrétaire Exécutif Maman Sidikou. Documents exclusifs

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C’est un début de grosse tempête qui s’abat sur le G5 Sahel, cette organisation inter-États qui regroupe des pays comme le Tchad, le NIGER, le Mali, la Mauritanie et le Burkina. Lancée depuis la capitale mauritanienne, Nouakchott, lors d’un sommet du 15 au 17 février 2014, l’une des dernières organisations régionales africaines, engagée dans la lutte contre le terrorisme dans la région du Sahel est éclaboussée par deux dossiers ‘’délicats’’ files comme des sucettes à vril à deux cabinets aux montants astronomiques. Ces deux marchés surévalués financièrement à la française Niagalé Bakayoko et au burkinabè Tertius Zongo, ex- Premier ministre du Burkina Faso, relèvent du magistère du nigérien Maman Sidikou, ancien Secrétaire Exécutif du G5 Sahel. Des marchés filés à deux proches du nigérien, aux odeurs de capitulation sismique qui n’honorent pas l’organisation. Exclusif.

Confrontée à des soucis d’argent, depuis le début de ses activités, le Secrétariat Exécutif du G5 Sahel s’est avérée un gouffre à centaines de millions de FCFA. Selon deux documents obtenus en exclusivité par Confidentiel Afrique, l’attribution de ses deux marchés, sont loin d’être un fleuve tranquille. L’affaire a ébruité et Confidentiel Afrique s’est procuré les deux dits contrats filés à la française Niagalé Bakayoko et au burkinabè Tertius Zongo. Les deux bénéficiaires ont la forte réputation d’être des proches inoxydables au diplomate nigérien, Maman Sidikou. Ce dernier est depuis quelques mois, nouveau Haut-Représentant de l’Union africaine au Sahel et au Mali, en remplacement de Pierre BUYOYA.

Ce qui agace dans cette affaire de marchés aux allures de bamboula restreinte, c’est bien l’inopportunité de payer ‘’gracieusement’’ des amis, au moment où à chaque raout des Chefs d’État du G5 Sahel, la question lancinante des financements est posée pour solliciter auprès des partenaires financiers la mise à disposition des ressources financières substantielles afin de mener la lutte antiterroriste.

Sur instance de la France, parrain et premier partenaire militaire et économique de l’organisation, le G5 parvient, tout de même, à mobiliser quelques ressources. Mais, cet argent, très difficilement, acquis ne semble pas être utilisé parfois  dans les bons tuyaux. La preuve: des dépenses de prestige pas souvent utiles et l’octroi répété d’avantages difficilement justifiables à certaines personnes extérieures à l’organisation, constituent la chienlit de la gestion des ressources de l’organisation.

Confidentiel Afrique dans ses investigations, est tombé sur deux rapports de marchés. L’un octroyé à  la française Niagalé Bakayoko ( 250 000 Euros) et le deuxième au  burkinabé Tertius Zongo, ancien Premier ministre du Burkina Faso ( 600 000 Euros).

Deux factures astronomiques qui sentent du copinage

La note payée à ces deux gâteux bénéficiaires fait saliver. Ces marchés payés de façon ostentatoire électrocutent tous les spécialistes et chercheurs sur le Sahel ou présumés tels et dont Confidentiel Afrique possède une copie.

Citoyenne française, et jusqu’il y a peu épouse d’un ambassadeur de France et ex-conseiller du président François Hollande, Niagalé Bagayako, s’est vue octroyer par le Secrétariat exécutif du G5 Sahel sous la direction du nigérien Maman Sambo Sidikou, un contrat pour une étude sur «Les causes profondes des violences et conflits communautaires dans l’espace du G5 Sahel ». Faisant 80 pages environ, ce travail payé de plus de 136 millions de francs CFA, soit 250000 TTC  n’est ni spécialement bien rédigé, ni franchement remarquable par son contenu. Le document dont l’auteur ne parle aucune langue sahélienne, n’a d’ailleurs toujours pas été rendu public dans son intégralité par l’institution. Seul un résumé de quelque dizaines de pages a été publié sur le site du G5 Sahel, comme si l’organisation a des raisons de ne pas divulguer ce travail dont elle redouterait, peut-être, qu’il soit très mal accueilli, en raison de sa piètre qualité notamment. Selon plusieurs chercheurs et experts notoirement reconnus pour leur compétences et la qualité de leur travail sur le Sahel et ce genre de sujets, le prix payé à cette ancienne fonctionnaire de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), inconnue dans le Sahel avant sa conversion en ‘’spécialiste’’ de la région dans la foulée du déclenchement de la guerre contre les jihadistes en 2013, est dix fois supérieur aux tarifs internationaux habituellement pratiqués dans ce genre de contrats.

La seconde étude attribuée à l’ancien premier ministre du Burkina-Faso, Tertius Zongo et remise en novembre 2020 a été payée, elle, à plus de 336 millions de français Cfa, soit 600000 euros TTC.

Faisant 32 pages rallongées par des annexes, et rédigée dans un style rappelant celui d’un rapport de fin d’études d’un étudiant en finances publiques, ce travail au titre kilométrique et indéchiffrable pour les non-initiés, les Chefs d’État notamment, est pompeusement intitulé; «Étude sur les dépenses de sécurité et leurs effets d’éviction sur le financement des dépenses de développement dans les pays du G5 Sahel ».

Comme celui réalisé par la française Niagalé Bagayako, le rapport de l’ex-chef du gouvernement burkinabé a lui été payé sur les fonds spéciaux du Secrétariat Exécutif du G5 Sahel et sur instruction de Maman Sambo Sidikou, lequel vient d’ailleurs tout juste de quitter ses fonctions pour un poste plus prestigieux de Haut représentant de l’Union africaine pour le Mali et le Sahel.

Dans sa dernière édition datée de ce mercredi 25 août, le journal français Le Canard Enchainé, spécialiste des secrets les mieux gardés et seul confrère avec Confidentiel Afrique à avoir visiblement accèdé aux contrats et à l’intégralité de ces ’’ études bidons», selon les mots d’un chercheur respecté, a tenté d’obtenir des explications des deux heureux bénéficiaires de cette étrange générosité de l’organisation qui regroupe les cinq pays parmi les plus pauvres du monde.

Pour Niagalé Bagayako, son travail a mobilisé une dizaine d’enquêteurs sur le terrain tous équipés de smartphones et transporté à ses frais. Pour Tertuis Zongo, « l’étude devrait servir aux chefs d’État du G5 Sahel pour leurs plaidoyers auprès des institutions financières ».

Pour obtenir d’autres ressources destinées  à filer à d’autres « spécialistes » du Sahel dans le besoin ? Des explications du commanditaire principal de ces fameux rapports, le nigérien Maman Sidikou seraient les bienvenues pour étayer certaines zones d’ombre qui entourent la qualité des contenus et leur tarification de ces deux contrats. Aura-t-il le courage de s’expliquer ou sera-t-il rattrapé par cette affaire qui sent tout du copinage sinon plus?

Par Hugues DESORMAUX et Ismael AIDARA (Confidentiel Afrique)

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