AN I d’IBK : L’opposition dans tous ses états

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Mali: à Bamako, le meeting de l'opposition attire la foule
Soumaïla Cissé lors d’un précédent meeting (archives).
Pierre René-Worms / RFI

Pour marquer le premier anniversaire de l’accession du président Ibrahim Boubacar Kéita au pouvoir, l’opposition malienne constituée du Parena de Tiébilé Dramé, l’URD de Soumaïla Cissé, le PIDS de Daba Diawara, le PDES des amis d’ATT, le PS-Yélé-Koura de Amadou Koïta, le PSP de Oumar Hamadoun Dicko, la FCD de Djibril Tangara, l’AFP-Bèdièfaga de Hamed Traoré, le PRVM de Mamadou Oumar Sidibé et le parti la lumière de Seydou Diawara alias Martin, ont organisé ce dimanche 7 août 2014 un meeting au palais de la Culture Amadou Hampaté Ba où elle a passé au laminoir le bilan du président malien.

 

Hormis Tiébilé Dramé (actuellement en France où il a pris part hier samedi à un meeting des partis de l’opposition de l’hexagone) et Oumar Hamadoun Dicko (que nous n’avons pas vu), tous les autres leaders étaient présents à ce meeting qui a fait une mobilisation exceptionnelle puisque la salle des 2000 places du palais de la Culture était remplie. On notait aussi la présence d’Ibrahim N’Diaye de l’Adéma.

 

Accueillis sous les vivats de leurs militants, les leaders de ces partis de l’opposition ont d’abord assisté à un film qui retrace les faits saillants de cette première année du mandat d’IBK.

 

De son investiture le 4 septembre 2013 à la visite du Premier ministre à Kidal où le Mali a perdu les acquis de la transition en passant par la nomination et la démission du Premier ministre Oumar Tatam Ly ; la déclaration d’IBK à Kayes lors de l’inauguration du barrage de Félou où il disait qu’il n’allait plus accepter s’asseoir sur la même table que les rebelles ; la nomination de Moussa Mara à la Primature et sa Déclaration de politique générale, son interpellation sur l’achat de l’avion présidentiel ; l’affaire contrat d’armement ; la suspension des relations avec la communauté financière internationale ; la motion de censure de l’opposition etc., l’opposition n’a rien oublié puisque voulant montrer à ses militants et au peuple malien que son discours est bien étayé par des arguments péremptoires.

 

Dans une déclaration qui a été lue par le président du Groupe parlementaire VRD, l’honorable Mody N’Diaye, l’opposition dit ceux-ci : « les partis signataires réaffirment avec force leur attachement indéfectible aux valeurs de la république, aux vertus patriotiques et aux principes démocratiques. Ils réaffirment leur respect immuable des institutions. Les partis signataires attestent être les partisans et les défenseurs d’un État laïc, indépendant, souverain et garant de son intégrité territoriale. Ils s’opposent à toute velléité d’autodétermination. Les partis signataires rappellent aux autorités de l’État qu’ils entendent exercer leurs missions d’opposition en toute liberté d’opinions et d’expressions dans le strict respect de la Constitution, des lois et règlements qui régissent la vie politique nationale. Au regard de ces préalables et de la situation difficile actuelle que traverse notre pays, à cause de la mal gouvernance politique, institutionnelle, économique, sécuritaire, budgétaire et sociale. Nous les partis signataires de la présente déclaration :

 

1. Exhortons le Président de la République à changer urgemment de cap afin d’éviter à notre cher pays une catastrophe imminente qui risquerait de disloquer le pays, de diviser et d’appauvrir ses populations, et de conduire la Nation à une grave fracture.

 

2. Exhortons le Président de la République à prendre en compte la souffrance  quotidienne de son peuple, la déshérence dramatique et l’aggravation du niveau de chômage de sa jeunesse, la marginalisation et la paupérisation progressive et dangereuse des forces vives  du pays dont les femmes payent le plus lourd tribut.

 

3. Exhortons le Président de la République à imposer sans préavis la gestion rigoureuse, transparente et efficace des finances publiques et à arrêter d’utiliser le budget de l’Etat dans des dépenses somptuaires. Au surplus nous demandons au Président de la République d’investir fortement dans les infrastructures  vitales au redressement économique du pays (routes, santé, éducation, etc.), de relancer l’économie nationale par la promotion appuyée du secteur privé et enfin de garantir le fonctionnement optimal et transparent des institutions de la République en vue d’assurer des prestations publiques efficaces au profit des populations.

 

4. Exhortons le Président de la République à organiser structurellement, matériellement et professionnellement notre Armée, afin de lui permettre d’accomplir dignement et efficacement les missions majeures qui lui sont dévolues par la Constitution. Dans ce cadre une diligence est à accorder à l’adoption de la loi de programmation militaire.

 

5. Exhortons le Président de la République à respecter son engagement solennel de création d’une Commission Vérité, Justice et Réconciliation, en la rendant indépendante, opérationnelle et efficace.

 

6. Exhortons le Président de la République à agir avec célérité et humanité, afin de permettre aux populations déplacées, qui survivent dans des conditions dégradantes et humiliantes, de retrouver leurs lieux d’habitat et leur assurer un accompagnement fonctionnel en vue de leur réinsertion sociale et économique.

 

7. Exhortons le Président de la République à favoriser et valoriser le dialogue social avec l’ensemble des organisations qui défendent les intérêts des travailleurs, et à les considérer légitimement comme des partenaires de réussite et de progrès.

 

8. Exhortons le Président de la République à rétablir la confiance: une confiance durable, estimable envers son peuple et envers la communauté africaine et internationale, afin de mettre fin aux souffrances qui perdurent, aux colères qui grondent, aux suspicions qui s’installent et aux blocages financiers qui se multiplient.

 

9. Exhortons le Président de la République à faire en tant qu’acteur principal la promotion de la culture des trois piliers fondateurs de notre pays à savoir : (i)la morale publique qui privilégie l’intérêt supérieur de l’État au détriment du profit personnel, (ii)la cohésion sociale qui développe la solidarité, l’emploi et la croissance, et (iii)l’unité nationale qui garantit la paix et solidifie l’avenir.

 

Les partis signataires, sereinement conscients de leurs responsabilités, mesurent avec gravité combien cette déclaration solennelle est un «cri d’alarme» pour leur pays, en réel danger de déliquescence prononcée.

 

Les partis signataires souhaitent plus que jamais que le Président de la République soit enfin au cœur des préoccupations de son peuple, comprenne et apaise ses souffrances, réussisse les justes voies de son bonheur et donne de l’honneur à sa vie citoyenne.

 

Les partis signataires prient le Président de la République de considérer cette déclaration comme l’incontestable preuve de leur amour pour leur pays, de leur sens profond de leurs responsabilités citoyennes envers l’État et de leur ferme volonté de contribuer, à leur place, à préserver l’unité, la liberté, la prospérité et la vitalité du Mali ».

 

Après cette déclaration, les leaders de ces partis politiques se sont succédés au pupitre pour livrer des messages.

 

Le leader de l’URD, Soumaïla Cissé, potentielle chef de file de l’opposition, a rappelé quelques faits du Mali récent notamment « la nuit du 10 au 11 janvier 2013 avec l’attaque de Konna par les forces du mal, l’intervention de Serval, celle des forces africaines, la mort le samedi dernier de civils à Aguel Hoc, la mort des soldats tchadiens à Aguel Hoc, les humanitaires morts à Goudam, les soldats burkinabè morts à Ber et à Tombouctou, les journées du 17 et 21 mai, tristes journées, avec plus de 150 de nos compatriotes tués par l’irresponsabilité d’un homme qui refuse d’assumer sa responsabilité ».

 

Au nom de tous ces morts, Soumaïla Cissé a demandé d’observer une minute de silence. A en croire le leader de l’URD, depuis que le vieux (IBK NDLR) est arrivé au pouvoir, le leitmotiv a toujours été « nous avons trouvé le Mali dans le trou » pour justifier son échec, alors que le peuple malien et la communauté internationale lui a donné beaucoup d’atouts pour sortir de ce trou. Premièrement le plébiscite à la présidentielle et la reconnaissance de sa victoire par lui-même Soumaïla Cissé. Deuxième atout selon M. CIssé, c’est qu’au temps de Dioncounda Traoré, la communauté internationale a mobilisé plus de 2 milliards F CFA à Bruxelles pour les Maliens, mais on a été incapable de les mobiliser pendant 12 mois alors que nous avons aujourd’hui deux avions pour aller les chercher. Comme troisième atout, Soumaïla Cissé a cité l’Accord de Ouagadougou qui devrait permettre de gérer le cas de Kidal. Mais rien.

 

IBK, a-t-il dit, a dilapidé tous ces acquis en prônant une gestion familiale du pouvoir, les marchés douteux de plusieurs milliards F CFA, nous faisant perdre l’honneur, la dignité, les valeurs du Mali. « Le vieux, tu n’a pas dit aux Maliens pendant la campagne que tu peux, il faut le faire maintenant ». A en croire Soumaïla Cissé, en tant qu’ancien ministre des Finances, c’est la première fois que le FMI doute de la moralité dans la gestion d’un gouvernement au Mali. « A cause de cette gestion chaotique qui a vu le FMI, la Banque Mondiale, l’Union européenne, romprent leurs relations avec le Mali, les Maliens n’ont plus confiance à IBK. Et celui qui critique cette situation est taxé d’ennemi du Mali. Non, les vrais ennemis du Mali ce sont les courtisans d’IBK, ses collaborateurs, qui sont avec lui le jour, mais qui viennent le désavouer auprès de nous la nuit. Ils sont à l’Assemblée nationale et au gouvernement. Aujourd’hui, j’ai l’impression qu’IBK est incapable face à la situation ». Selon M. Cissé, IBK a fait 4 déplacements à l’intérieur du Mali contre 42 voyages à l’extérieur.

 

Pour Amadou Koïta du PS-Yélé-Koura, le bonheur du Mali, c’est de respecter la Constitution en son article 37 qui stipule que 48 heures après son investiture le président de la République doit faire une déclaration publique de ses biens. Ce qu’IBK n’a pas fait contrairement à ses prédécesseurs constitutionnellement élus.

 

« Pourquoi le gouvernement IBK ne respecte pas l’article 57 de notre constitution qui demande au Premier ministre et aux membres du gouvernement de faire une déclaration publique de leurs biens ? Le Premier ministre Moussa Mara, candidat aux communales et à la présidentielle l’avait fait alors que la loi ne l’obligeait pas, mais aujourd’hui c’est la Constitution qui l’exige. Pourquoi cette violation de la Constitution ? ».

 

Selon Amadou Koïta, le Mali d’abord, c’est d’exiger tout de soi et comme le dirait l’autre, un homme de qualité exige tout de soi, c’est un bon chef alors qu’un homme sans qualité, un despote, exige tout de son peuple. Pour lui, l’honneur du Mali, c’est de faire en sorte que l’image du Mali rayonne tant sur le plan national qu’international, que l’autorité et la souveraineté du Mali s’exerce partout, sur toute l’étendue du territoire ; qu’on accepte la défaite dans la dignité et qu’on ait le courage d’assumer ses responsabilités.

 

« Ce courage a manqué au président Ibrahim Boubacar Kéita, au Premier ministre Moussa Mara lequel, après la défaite militaire de Kidal le 21 mai à Kidal, a dit que l’autorité politique n’a pas donné de l’ordre. Quand on envoie son armée au front, on ne la trahie pas ». Selon Koïta, le bonheur des Maliens, c’est d’améliorer leurs conditions de vie : diminuer ou maintenir les tarifs d’électricité, c’est de permettre aux classes moyennes (commerçants détaillants) d’avoir les conditions favorables à une émergence et non de leur faire payer la facture d’un luxe, d’un prestige, c’est-à-dire les 20 milliards de l’avion présidentiel ; le bonheur des Maliens, c’est de faire en sorte qu’on n’ait plus de grève dans ce pays. « Je voudrais dire à IBK de gouverner pour les 4 ans restants après avoir régné pendant la première année qui l’a vu décider de tout, faire ce qu’il veut et tout ramener à sa personne. Gouverner, c’est avoir une vision, une stratégie de sortie de crise, avoir le sens des priorités, échanger, partager avec les forces vives de la nation les questions d’intérêt national. Je demande à IBK de comprendre que gouverner, c’est de se dire que la grandeur d’un chef n’est pas dans sa personne, mais dans la mesure où il sert la grandeur de son peuple ».

 

Pour Djiguiba Kéita alias PPR, secrétaire général du Parena, la majorité des actes posés par IBK sont négatifs, à commencer par son échec sur le dossier du Nord. Pour PPR, Oumar Tatam Ly a été un bon jeune Premier ministre, il avait une bonne vision, il était patriote à l’image de son père Ibrahim Ly, il a demandé à IBK de changer de cap ou il démissionne, mais n’a pas été entendu et il a démissionné. « Ça veut dire que tous les jeunes du Mali ne sont pas mauvais. C’est la démission de Oumar Tatam Ly  qu’il a amené le fils de Joseph Mara, Moussa Mara. On ne souhaite pas pour lui que ça soit tel père, tel fils parce que le père de Moussa Mara n’a pas fait que de bon dans ce pays. Mais le chemin qu’il a emprunté, là où il est en train de conduire le pays, veut dire qu’il n’est pas loin de son père parce que c’est par exemple à cause de son arrogance, son manque d’humilité que Kidal n’est plus aujourd’hui malien ». Autres échecs d’IBK, selon PPR, c’est la faillite de l’école avec le mensonge à l’appui du Premier ministre qui a osé dire qu’il n’y a pas eu de fraudes au Bac ; l’achat de l’avion avec encore le mensonge du même Moussa Mara ; la grève de l’UNTM due au manque d’humilité du pouvoir ; dans la lutte contre la corruption du régime, sa propension à indexer les autres comme étant les corrompus alors que quand il était Premier ministre, Soumaïla Cissé était ministre des Finances, il sait ce qui s’est passé. « L’opposition est désormais débout, jusqu’à ce qu’IBK comprenne que le Mali appartient à tous les Maliens et ne saurait être sa propriété privée ».

 

Auparavant, ce sont la présidente des femmes de l’opposition, Mme Dandara Touré ; le président de la jeunesse de l’opposition, Seydou Cissé ; le vice-président du PDES, Amadou Abdoulaye Diallo ; le président de la FCD, Djibril Tangara ; le président du PIDS, Daba Diawara ; le président de l’AFP, Hamed Traoré ; le président du PRVM, Mamadou Oumar Sidibé ; le président du parti la lumière, Seydou Diawara alias Martin qui étaient passés au pupitre pour dénoncer IBK et son régime.

 

Yattara Ibrahim

 

 

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