l'AES se dote d'un pilier financier stratégique : Vers la création d’une Banque Confédérale

26 Mai 2025 - 01:08
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l'AES se dote d'un pilier financier stratégique : Vers la création d’une Banque Confédérale

L'Alliance des États du Sahel (AES) a franchi une étape historique ce vendredi 23 mai 2025 à Bamako, avec l'opérationnalisation de la Banque Confédérale pour l'Investissement et le Développement (BCID-AES). Plus qu'une simple institution financière, cette banque est le véritable bras armé économique de l'AES, concrétisant la vision d'une souveraineté retrouvée pour le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Son lancement est le point d'orgue d'un processus initié en juillet 2024 à Niamey, et marque une rupture audacieuse avec les dépendances passées.

Procédant d'une vision partagée menant à l'action commune, la décision de créer la BCID-AES assortie d'un Fonds de stabilisation, avait été prise lors du premier Sommet des Chefs d'État de l'AES, le 6 juillet 2024 à Niamey. Les dirigeants avaient alors instruit leurs ministres de l'Économie et des Finances de concrétiser cette feuille de route. C'est dans ce sillage que Bamako a accueilli cette semaine des experts, puis une rencontre ministérielle cruciale, pour affiner et finaliser les modalités de mise en place de la banque.

La réunion ministérielle, tenue au Centre international de conférences de Bamako (CICB), a vu la participation du Premier ministre nigérien, Ali Mahaman Lamine Zeine, de son homologue malien, le Général de Division Abdoulaye Maïga, et du chef de la délégation burkinabè, le ministre de l'Économie et des Finances, Dr Aboubakar Nacanabo. Cette assise s'inscrit dans la dynamique de renforcement des axes prioritaires de l'AES : sécurité collective, intégration économique, souveraineté financière, et identité culturelle et éducative.

 

Financement autonome et bouclier monétaire

La BCID-AES est conçue comme un outil financier autonome pour garantir le financement des projets structurants dans les secteurs vitaux tels que l'énergie, le transport, l'agriculture et les technologies. L'objectif est clair : soutenir un développement durable et endogène, adapté aux réalités sahéliennes. Au-delà de son rôle d'investissement, la pertinence stratégique de la BCID-AES réside dans sa relation intrinsèque avec l'ambition de l'AES de lancer sa propre monnaie commune d'ici juillet 2025. La banque est appelée à être un pilier essentiel de la stabilité et de la gestion de cette nouvelle devise, agissant comme un "bras armé" financier de la future banque centrale de l'AES. Elle sera cruciale pour mobiliser des ressources financières à grande échelle ; participer à la gestion des réserves de change ; mettre en œuvre les politiques monétaires de la future banque centrale ; faciliter les transactions commerciales et financières intra-AES avec la nouvelle monnaie ; stimuler l'investissement et la production interne en finançant des projets générateurs de revenus locaux et de devises ; soutenir le développement des filières d'exportation pour accumuler des devises étrangères ; accorder des crédits aux PME/PMI, à l'entrepreneuriat féminin et jeune, et aux ménages pour dynamiser l'économie interne ; mener des campagnes de sensibilisation pour renforcer la confiance dans la nouvelle monnaie ; et collaborer avec les partenaires pour mettre en place des mécanismes de protection contre les chocs externes, assurant la stabilité de la devise.

Pour le ministre malien de l'Économie et des Finances, Alousséni Sanou, cette banque est une "réponse pragmatique et stratégique aux défis économiques de notre Confédération," insistant sur le potentiel de croissance immense de la région et l'impératif d'une gouvernance rigoureuse et transparente.

 

Rupture stratégique face aux défis du changement monétaire

Le lancement de la BCID-AES et l'ambition d'une monnaie propre s'inscrivent dans une rupture majeure avec le système du Franc CFA après le retrait des pays de l'AES de la Cedeao. Cette transition est lourde d'enjeux et de défis. On peut souligner la fin de la "garantie" externe, de sorte que la nouvelle monnaie n'aura pas la parité fixe avec l'euro garantie par la France. La BCID-AES et la future banque centrale devront construire leur propre crédibilité et stabilité sur les marchés. Il y a aussi la maîtrise de l'inflation et des flux de capitaux. L'AES devra développer ses propres outils pour contenir l'inflation et gérer ses réserves de change, sans la "béquille" du taux directeur de la Bceao. Le risque de fuite des capitaux nécessitera des politiques monétaires et budgétaires saines pour rassurer les acteurs économiques. D'autre part, la nouvelle institution bancaire et la future monnaie devront rapidement établir leur crédibilité auprès des populations et des marchés internationaux pour gagner leur confiance. Cela passe par une transparence exemplaire et une communication efficace pour davantage rassurer sur la fin de la dépendance monétaire et la diversification des partenariats commerciaux et stratégiques. Si cette démarche vise une plus grande autonomie, elle implique aussi de forger de nouveaux accords commerciaux et financiers plus équitables. La capacité de la BCID-AES à attirer les investissements directs étrangers (IDE), notamment grâce à la richesse minière des pays de l'AES, sera cruciale pour une croissance à deux chiffres.

Comme l'a souligné le Général Abdoulaye Maïga, la création de l'AES et ses initiatives comme la BCID sont une "nouvelle page de notre histoire partagée que nos enfants liront avec fierté," incarnant "l’audace d’un avenir repensé et remodelé." L'AES, forte de ses 78 millions d'habitants, entend transformer cette alliance en un levier de développement endogène et de souveraineté retrouvée, au-delà des cadres régionaux existants.

La mise en place de la BCID-AES est donc un signal fort de la volonté de l'Alliance des États du Sahel de prendre en main son destin économique et financier. Elle représente un pari audacieux, mais nécessaire, pour consolider une souveraineté pleinement assumée.

Question fondamentale : comment l'AES peut-elle garantir la stabilité et l'attractivité de sa nouvelle monnaie et de la BCID-AES face aux défis inhérents à une telle transition au niveau de la sous-région ?

KML

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