Mali: vive émotion et de nombreuses questions après le massacre de Sobane

11 Juin 2019 - 10:57
11 Juin 2019 - 12:00
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Mali: vive émotion et de nombreuses questions après le massacre de Sobane
village dogon de Sobane-Kou

L'émotion est toujours vive dans le village de Sobane, situé dans la commune rurale de Sangha, dans le centre du Mali, où un massacre a duré plusieurs heures entre dimanche et lundi matin. Des corps ont été inhumés lundi après-midi, alors que de nombreuses autres personnes sont portées disparues. Le point sur la situation.

Dans l’après-midi de ce lundi 10 juin, dans le village de Sobane, les victimes de l’attaque meurtrière ont été inhumées. Du monde sur les lieux, notamment des élus, des parents de personnes décédées, ainsi que le gouverneur de la région de Mopti. Sidy Alassane Touré estime qu’il y a beaucoup moins que 95 morts, alors que de leur côté des élus maintiennent les premiers chiffres avancés. Après l’enterrement, un détachement de l’armée malienne est resté sur les lieux pour renforcer la sécurité. Outre les victimes, il y a des blessés. L’un d’eux a apporté des précisions. L’attaque aurait commencé dimanche vers 17 heures, pour prendre fin lundi vers 3 heures du matin. « Personne n'a été épargné » Les assaillants étaient nombreux, plusieurs dizaines. Certains à pied, d’autres à moto. À leur arrivée sur place, les autochtones ont pris peur et se sont réfugiés dans des cases. Alors, les assaillants ont fait usage d’armes (certaines étaient automatiques), avant de mettre le feu à de nombreuses cases avec à l’intérieur des civils. De nombreux autres habitants du village, qui abrite environ 300 personnes, sont toujours portés disparus. D'après un rescapé, Amadou Togo, cité par l'AFP, il y avait là « une cinquantaine d'hommes lourdement armés. Ils ont d'abord encerclé le hameau avant de lancer l'assaut », raconte cet habitant qui décrit des scènes d'horreur. Plusieurs personnes ont été « égorgées et éventrées », raconte-t-il, « des greniers et du bétail brûlés », poursuit ce rescapé. « Personne n'a été épargné : femmes, enfants et vieilles personnes », conclut cette source.   Qui sont les tueurs? Le massacre n’a pas encore été revendiqué. Plusieurs pistes, peu claires, se dégagent. En condamnant cette attaque, le gouvernement pointe du doigt des « terroristes », sans indiquer à quel groupe il fait allusion. C'est en tout cas le terme employé dans un communiqué diffusé hier. D'après ce document, les auteurs de ce massacre seraient « des hommes armés, soupçonnés d'être des terroristes, qui ont lancé un assaut meurtrier contre ce paisible village ». Cette option terroriste, certains observateurs l'envisagent également, vu le contexte socio-culturel et la situation géographique. Sobane est un village majoritairement catholique. « L'attaquer peut inaugurer un cycle », indique l'éditorialiste Adam Thiam. Pour lui, l'hypothèse selon laquelle ce village pourrait être la cible d'islamistes venant notamment du Burkina est tout à fait possible. Autre piste envisagée par certains observateurs : celle d'une vengeance post-Ogossagou. Du nom de cette localité du centre du pays, où fin mars dernier, une attaque d'une grande ampleur contre des habitants à majorité peule, avait fait près de 160 morts... Tous les regards s'étaient alors portés sur une milice d'autodéfense, celle de l'association de chasseurs dogons Dan Nan Ambassagou. Sur le coup, l'État avait même promis de démanteler cette milice. Or, Sobane « fournit l'essentiel des troupes de la milice dogon Dan Nan Ambassagou », relève le journaliste Adam Thiam. Pour ce dernier, les deux pistes « ne s’excluent pas. La piste de la vengeance Ogossagou est soutenue par le fait que Sobane relève de l’une des communes qui fournissent le plus de troupes à la milice dogon Dan Nan Ambassagou. Il est très exposé parce qu’il est situé dans la plaine, contrairement à l’habitat dogon qui est dans le contrefort des rochers. Et la piste de l’État islamique s’appuie sur le fait que Sobane est majoritairement catholique. L’attaquer peut inaugurer un cycle. Nous sommes dans le bassin non musulman du plateau Dogon, avec une majorité de chrétiens et d’animistes. Il serait naïf de croire que cela n’est pas possible au Mali où Daesh a déjà pris pied avec les ex-Mujao Abou Walid Sahraoui et Abdel Hakim, implantés seulement à quelques centaines de kilomètres du plateau Dogon. » Dans tous les cas, une question se pose : celle de l'efficacité de la réponse sécuritaire. « C'est un échec : qu'est-ce qui a été mis en place pour prévenir de ce genre d'attaque fréquente ? », interroge l'analyste Ibrahim Maïga.
Des corps calcinés, des maisons incendiées, des animaux abattus... Hama Kassogué, l'enseignant du village, n'en revient pas. Il était chez lui, à une quinzaine de kilomètres de Sobane quand l'attaque a eu lieu dimanche soir... Par RFI Publié le 11-06-2019

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