Sahel : que cache la recrudescence des attaques terroristes
Les nouvelles stratégies adoptées par les groupes terroristes dans le Sahel contraignent les autorités militaires au pouvoir au Niger, au Burkina Faso et au Mali, à revoir leurs approches et leurs partenariats.

Si les forces armées ont enregistré d’importantes victoires ces dernières années, les mois récents se sont avérés particulièrement éprouvants pour les trois États de l’Alliance des États du Sahel (AES). Des attaques parfaitement coordonnées et simultanées ont été menées contre leurs forces de défense.
Au Mali, le 12 mai 2025, un site minier a été pris pour cible à Naréna, provoquant de lourdes pertes humaines. Peu après, le camp militaire de Dioura, dans la région de Mopti, a subi une violente offensive terroriste. Le 1er juin 2025, une double attaque a frappé la zone stratégique de Boulkessi dans la région de Tombouctou, au cœur du centre malien, ciblant à la fois un camp militaire et l’aéroport. Ces assauts ont fait de nombreuses victimes, tant parmi les terroristes que dans les rangs de l’armée.
Au Burkina Faso, le 11 mai 2025, des combattants du JNIM (Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans), affilié à Al-Qaïda, ont lancé une offensive contre le camp militaire de Djibo, dans la région du Sahel. Plusieurs localités, dont Sollé (Nord), Sabcé (Centre-Nord) et Yondé (Centre-Est), ont également été attaquées, faisant plusieurs dizaines de morts et de blessés.
Au Niger, le 25 mai 2025, douze soldats ont péri lors d’une attaque contre une position militaire à Eknewane, dans la région de Tahoua. Ainsi, rien qu’au cours du mois de mai, des centaines de civils et militaires ont perdu la vie dans les trois pays de l’AES.
Les causes de cette recrudescence
Les groupes terroristes semblent avoir adopté une nouvelle stratégie, coordonnant leurs efforts dans une vaste campagne d’usure visant à déstabiliser les forces de sécurité et à tester les nouvelles doctrines militaires des États sahéliens. Si certains pointent des défaillances dans l’appareil défensif de ces pays, d’autres rejettent cette analyse.
Face à cette escalade, les autorités ont pris la parole. Lors d’un entretien accordé à la télévision nationale nigérienne le 31 mai 2025, le président de transition du Niger, le Général Abdourahamane Tiani, a dénoncé un complot contre les États du Sahel, en particulier le Niger. Selon lui, les terroristes, sous pression, auraient reçu l’ordre de puissances étrangères avec la complicité de pays voisins comme le Nigeria de s’en prendre aux forces armées de l’AES. Il a évoqué des réunions secrètes tenues au Nigeria et dans le bassin du lac Tchad, rassemblant des représentants de pays occidentaux et de leurs alliés africains, dans le but avoué de saper la stabilité du Niger. Les autorités nigériennes affirment également détenir des renseignements précis sur les mouvements de ceux qui cherchent à semer le chaos, notamment des tentatives d’introduction d’armes et d’explosifs à destination des groupes terroristes.
La diversification des partenariats engagée par les États du Sahel depuis l’arrivée au pouvoir des militaires joue un rôle central dans ce conflit. L’AES a tourné le dos à ses partenaires traditionnels (France, États-Unis) pour se rapprocher d’autres acteurs, tels que la Russie, l’Iran ou la Turquie. Si les autorités justifient ce choix par la quête d’une véritable souveraineté, les anciens partenaires peinent à l’accepter.
Pour de nombreux analystes africains, ces anciennes puissances coloniales, œuvreraient activement à la déstabilisation des trois États afin de maintenir leur emprise sur les ressources de la région. Cette recrudescence des attaques survient paradoxalement alors que l’AES renforce son intégration, avec l’adoption d’un hymne commun et la création prochaine d’une banque d’investissement.
« Les impérialistes constatent que s’ils ne mettent pas rapidement un terme à l’intégration régionale de l’AES, ces pays serviront d’exemple à toute l’Afrique. Tout ce que l’AES entreprend pour son développement déplaît aux puissances occidentales. », a constaté Didier Nourredine Aholou, journaliste, analyste et expert en communication.
Le général Tiani abonde dans ce sens, affirmant que l’hostilité des Occidentaux s’explique par la crainte d’un « effet domino » en Afrique si l’AES réussissait. Il accuse également les puissances étrangères de cibler spécifiquement le capitaine burkinabè Ibrahim Traoré, en raison de son leadership grandissant : « C’est son influence qu’ils redoutent le plus. »
L’urgence de nouvelles stratégies
Cette vague d’attaques met en lumière la nécessité pour les États de l’AES (Alliance des États du Sahel) de coordonner leurs efforts militaires de manière plus efficace. Face à la mobilité des groupes armés et à leur capacité d’adaptation, une réponse isolée de chaque pays s’avère insuffisante. La fragilité des appareils étatiques, marquée par des ressources limitées, des défis logistiques et parfois des tensions internes, et la complexité du terrain vastes zones désertiques, frontières poreuses et réseaux criminels transnationaux, favorisent également la reconfiguration rapide des groupes armés.
Malgré les défis, les forces armées des trois pays gardent le moral et répliquent avec fermeté à chaque offensive, neutralisant de nombreux assaillants et récupérant leur matériel. Elles bénéficient également du soutien indéfectible des populations, déterminées à résister au fléau terroriste. Les écoles restent ouvertes, les marchés fonctionnent, et les symboles de l’État comme les drapeaux continuent de flotter sur les bâtiments publics.
Lors d’une conférence de presse tenue le 2 juin 2025, le ministre malien de la Défense a affirmé avec détermination :
« Le cap est maintenu. Chaque goutte de sang versée renforce notre résolution à éradiquer ces ennemis de la paix et de la souveraineté nationale. »
Source: https://www.toutafrica.com/
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