Gouvernance au Mali : Danger islamiste !
Après avoir demandé aux imams de dresser le portrait robot du nouveau président, les associations islamiques s’apprêteraient à donner des consignes de vote à la communauté musulmane. Il y a danger islamiste.
Le 14 janvier dernier, le Haut Conseil islamique du Mali, l’instance suprême qui représente la communauté musulmane, a tenu un grand meeting symbolique stade du 26 mars. Une véritable démonstration de force ! Surprenant ? Pas du tout. Car, depuis la vague de contestation en 2009 contre le code «satanique» des personnes et de la famille, les ‘’islamistes’’ sous la bannière du Haut Conseil islamique avaient réussi le pari de la mobilisation et de l’unité en fédérant toutes les composantes de l’islam au Mali qui ont mis leurs divergences entre parenthèse. Code des personnes et de la famille, élection présidentielle, situation au Nord, voilà les principaux thèmes qui étaient au cœur des échanges du 14 janvier.
Sur le Code des personnes et de la famille, taillé sur mesure par l’Assemblée Nationale au cours de la seconde lecture, les responsables du Haut Conseil ne trouvent que satisfaction. Juste 48 heures après leur démonstration de force, le chef de l’Etat les a reçu en grande pompe au Palais de Koulouba pour annoncer la promulgation du texte adopté par l’Assemblée nationale. Jusque-là, rien d’inquiétant. Bravo au Haut Conseil islamique pour avoir obligé les trois plus grandes institutions de la République à relire le Code. Mais lorsque le président de l’instance suprême musulmane met en garde les opposants du texte, il y a danger. Ainsi, on comprend que ces gens-là, veulent montrer leur vrai visage, c'est-à-dire réduire au silence toute voix discordante, réprimer toute contestation. Une atteinte grave et intolérable à la liberté d’opinion et d’expression. On croyait révolues de telles pratiques depuis la chute du général dictateur Moussa Traoré. On accuse les opposants d’être financés par l’extérieur pour ne pas dire l’Occident. Là, les associations islamiques ne disent pas toute la vérité. En réalité, leur gros financement provient de l’extérieur. Même si ce n’est pas de l’Occident. Personne n’est dupe.
Politiciens déguisés en islamistes
Quid des prochaines élections présidentielles ? Depuis 2009, la montée de politiciens déguisés en islamistes était prévisible. Mais à défaut de désigner quelqu’un dans leur rang, il nous revient de sources concordantes que les religieux envisageraient de donner des consignes de vote en faveur du candidat qui répondrait aux critères définis par eux-mêmes. Ce qui est une très mauvaise initiative. En 2002, les initiateurs d’un appel ont été réduits à leur strict minimum avec toute l’humiliation que l’on connaît déjà.
Aujourd’hui, le fait pour certains candidats déclarés à l’élection présidentielle du 29 avril d’exercer leurs armes de séduction massive sur des leaders religieux, notamment musulmans, ou de se laisser séduire par ces derniers, est loin d’être un bon calcul politique. Les visites de courtoisie s’inscrivent dans la pure tradition malienne. Mais aller soumettre les lois aux leaders religieux devant être adoptées par l’Assemblée nationale est anti-démocratique, voire anti-républicain. Mieux, cela constitue une façon dangereuse d’impliquer les religieux dans la gestion des affaires publiques. Quand les arbitres décident de devenir des acteurs principaux, les règles du jeu sont faussées. Avec la présidence de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) confiée à un membre influent du Haut Conseil, les associations islamiques ont l’obligation d’observer une stricte neutralité entre les différentes forces en compétition. Il y va de leur crédibilité et de leur honorabilité. Et là, sur cette question sensible qui engage la vie de la nation, Mahmoud Dicko et le Haut Conseil sont fortement interpellés.
Ch DOUMBIA
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