Après la publication de la Feuille de route du gouvernement de transition, l’Adema a mis en place une équipe de réflexion sur le sujet. Les conclusions de cette analyse sont de nature à remettre en cause la compétence et le dynamisme de l’actuelle équipe gouvernementale car beaucoup d’imperfections ont été décelées par le secrétariat politique de l’Adema. Raison pour laquelle l’Adema appelle les forces politiques et sociales du pays à rejeter ce document qui n’est acceptable ni sur la forme ni dans le fond.

La remarque sur la forme de la Feuille de route est sans équivoque: non seulement ledit document est incomplet, estime le secrétariat politique, mais cette feuille de route vient à un moment inopportun et ne répond à aucune exigence du moment. En ce qui concerne le fond, le parti des abeilles découvre que ladite feuille de route est vide car le document manque de précision et comporte de graves omissions.
Les remarques sur la forme
Dans son analyse, l’Adema dira qu’en temps normal, le président de la République adresse au Premier ministre une lettre de cadrage. Ce dernier s’en inspire pour proposer une Déclaration de politique générale soumise à la validation de l’Assemblée nationale. Le Gouvernement élabore ensuite, en interne, un programme de travail gouvernemental avec un mécanisme de suivi-évaluation interne.
Puisque le pays traverse une situation exceptionnelle, le Gouvernement de transition doit élaborer une feuille de route précise et claire pour la sortie de crise. Dégager les principales priorités qui en découlent et tracer le chronogramme et les moyens qu’il faut pour la réalisation des objectifs. Mais, selon les Adémistes, cette feuille de route ne respecte aucune de ces exigences. C’est juste une compilation de l’ensemble des plans d’action des différents départements ministériels, sans aucun effort de mise en cohérence.
L’inopportunité du document :
En plus de l’ incohérence, le secrétariat politique des abeilles souligne que la présente feuille de route est venue en retard et à un moment inopportun car tout le monde demande et attend un gouvernement d’union nationale qui est en gestation. En plus de cela, la feuille de route a été présentée aux partenaires extérieurs avant la moindre concertation avec les forces politiques et sociales du pays. Cette attitude ne facilite pas la recherche du consensus si utile dans cette situation de crise que nous vivons, déplore ledit parti.
Pourquoi est-il incomplet ?
Le document ne contient pas l’ordre des priorités. On a l’impression que toutes les actions se valent. Le chronogramme des actions est vague, comme si la transition devait prendre un quinquennat. Selon les analystes de l’Adema-Pasj, la Feuille de route ignore certaines questions majeures de l’heure, comme le respect des libertés publiques et de l’Etat de droit. A cela s’ajoute l’absence de l’indispensable interaction du gouvernement avec les autres institutions de la République et les différents corps intermédiaires (politiques et sociaux).
Les imperfections quant au fond
Il ressort des résultats des réflexions de l’Adema, que le document manque de précision. Car ce dont notre pays a besoin, c’est un Gouvernement de mission pour la sortie de crise et non un Gouvernement réformateur ou refondateur qui viendra après la transition. A la lecture de cette feuille de route, on a l’impression que le gouvernement est la seule institution qui existe. Les autres institutions de la République sont ignorées. Cette idée d’autosuffisance est l’une des grandes tares du document, fustige la Ruche. Elle poursuivra que dans ce document, on a l’impression que la gestion de la crise du Nord et l’organisation des élections n’ont aucun lien, ni interaction. Elle a également constaté que les 9 premières pages de la feuille de route occultent un pan entier de la mission du gouvernement de transition: l’organisation des élections législatives et de la présidentielle. «Le document n’y consacre qu’une longue phrase. Il n’y a aucune clarté sur la nature du fichier électoral choisi (biométrique ou mise à jour du Race). Alors que la Feuille de route doit s’articuler autour de la reconquête de l’intégrité territoriale, la restauration des administrations et la sécurisation des personnes et des biens sur toute l’étendue du territoire national. Par ailleurs, l’accent doit être mis sur la préparation, l’organisation et la gestion des différents scrutins électoraux, ainsi que la certification du vote par les instances internationales » indique l’Adema.
De graves omissions
Selon les Adémistes, malgré son caractère de fourre-tout, la Feuille de route du Gouvernement comporte de graves omissions.
Il ne dit rien sur l’état des comptes publics et comment le Gouvernement entend financer toutes les actions citées. Les financements sont- ils disponibles où faut-il aller les chercher ?
Cette question devient stratégique quand on sait qu’au titre de l’exercice 2012, l’Etat a un manque à gagner au Trésor de 600 milliards de F CFA soit 1/3 du budget. A cela, s’ajoute la suspension de la quasi‐totalité des aides bilatérales ou multilatérales. Partant, l’Adema précise qu’il aurait été plus cohérent de faire ressortir le budget disponible, l’allouer aux priorités de la transition et prévoir les fonds supplémentaires (pour le financement non disponible) pour les actions secondaires. Une autre des grandes faiblesses de ce document décelées par la Ruche est le traitement qu’il fait de l’économie. Sans une relance économique, les objectifs ne seront pas atteints. Une bonne partie du Budget national est mobilisée sur les recettes intérieures (fiscalité de porte et fiscalité intérieure).
L’Adema indique que sur le sujet, les questions suivantes se posent. Quelles sont les mesures pour l’indemnisation des opérateurs économiques ayant subi des dégâts pendant les évènements du 22 mars ?
Quel est le plan de sauvegarde des secteurs économiques aujourd’hui en danger ?
Que faut-il faire pour endiguer le licenciement massif dans le secteur privé ?
Quelles sont les dispositions prises pour la relance des grands projets qui sont aujourd’hui suspendus ?
Que compte faire le Gouvernement de transition au sujet de la dette intérieure qui occasionne de gros problèmes de trésorerie au niveau des opérateurs privés ?
Quelle initiative pour la relance des investissements directs étrangers ? Quelles sont les mesures pour la relance du financement bancaire ?
A toutes ces questions fondamentales pour stabiliser le cadre macroéconomique, préserver les recettes intérieures et éviter un chômage massif, la Feuille de route ne donne pas de réponse.
Oumar KONATE