Revue de presse Afrique – À la Une: la partie de bras-de-fer se poursuit entre Paris et Bamako

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La tension est toujours très vive à propos de la possible arrivée au Mali des mercenaires du groupe russe Wagner. La France juge cette présence russe « incompatible » avec la présence européenne. Le gouvernement malien, pour sa part, affirme vouloir disposer « d’un plan B », en raison du redéploiement militaire français. Et dans la presse malienne, les critiques continuent de fuser en direction de Paris.

Ainsi pour Info-Matin, « La France, coutumière des lettres de cachet, ne peut accepter qu’une de ses ex-colonies, le Mali, pour laquelle plus de 50 de ses soldats sont morts en opération depuis 2013, se départisse du devoir de reconnaissance ad vitam aeternam envers elle pour imaginer pactiser avec la Russie de Poutine via la société Wagner. Pour cette France, poursuit Info-Matinchantre des droits de l’homme et pays de la liberté, point n’est libre le Mali souverain de contracter avec qui il le veut pour sa sécurité et sa défense. Non, il devrait toujours prendre ses ordres auprès d’elle ! »

La France : « envahisseur, oppresseur, exploiteur… »

Le Matinal hausse encore le ton : « La France n’a pas arrêté sa politique néocolonialiste au Mali, affirme-t-il. Elle s’est compromise à travers sa conduite malhabile en considérant le Mali comme un État vassal. Elle a totalement failli dans sa lutte contre le terrorisme et la reconstruction de l’armée malienne. Pire, son deal avec les mouvements jihadistes sur le terrain a fini de la mettre à nue. Au finish, la France qui était perçue comme un sauveur est subitement devenu un envahisseur, un oppresseur, exploitant sauvagement abusivement nos ressources minières à l’insu des autorités. »

Alors, poursuit Le Matinal, « l’accord en gestation entre le Mali et le groupe Wagner marque un tournant décisif dans la reconquête du Nord du pays. Avec Wagner, c’est la fin de la diplomatie d’influence, du mensonge français. En huit ans, à titre d’exemple, la France a semé le chaos en Centrafrique que Wagner a jugulé en 6 mois. »

Wagner : risque de dérapages…

Justement, le quotidien Enquête, à Dakar, s’intéresse de près à ce fameux groupe Wagner : « Les mercenaires qui font trembler la France », titre le quotidien sénégalais.

Enquête a interrogé plusieurs spécialistes. Pour Mouhamadou Lamine Bara Lo, docteur en sciences politiques et spécialiste des questions de sécurité, « la junte [au pouvoir au Mali] veut une prolongation de la transition; ce à quoi s’oppose Paris. Donc, cette carte des mercenaires russes pourrait être utilisée comme un moyen de pression sur la France et sur les autres organisations internationales. »

Toutefois, poursuit-il, « l’arrivée de ces mercenaires russes risque de poser des problèmes d’engagement et de coordination avec les forces internationales (Nations unies, force Barkhane et européenne Takuba). » De plus, remarque-t-il, « ces paramilitaires ne sont pas très regardants sur les questions de droits de l’homme et des lois qui régissent la guerre. Le groupe Wagner est accusé en Centrafrique de nombreuses exactions contre des civils. »

Pour sa part, le colonel Mamadou Samb, directeur des formations du Centre des hautes études de défense et de sécurité de Dakar, toujours interrogé par le quotidien Enquête, estime que « le recours au groupe de sécurité privé russe pourrait permettre aux forces de sécurité maliennes de gagner en efficacité face aux jihadistes. Toutefois, poursuit-il, le risque de dérapages et de bavures contre les populations civiles existe. Donc, il appartiendra aux responsables maliens d’assurer un contrôle sur les règles d’engagement du groupe Wagner, s’ils décident de travailler avec eux. »

La France prise au piège

En tout cas, « La France est prise au piège » au Sahel, pointe Marc-Antoine Pérouse de Montclos dans une tribune publiée par Le Monde Afrique. Pour le chercheur français, « les coopérations militaires de la France et de l’Union européenne n’ont pas permis d’éviter les coups d’État, les exactions et les violations des droits de l’homme qui ont nourri la protestation islamiste. Pire, elles ont parfois formé les hommes qui ont déstabilisé la région, réprimé dans le sang des manifestants pacifiques et entériné le retrait des armées gouvernementales des zones de combat où les militaires de Barkhane ont pris le relais en déchargeant les soldats du cru de leurs responsabilités sécuritaires. Aujourd’hui, la France est prise au piège, donc, affirme Marc-Antoine Pérouse de Montclos. Partir, c’est prendre le risque de voir la situation se dégrader encore davantage. Rester, c’est endosser la poursuite d’une politique qui ne permet pas d’enrayer l’avancée des groupes jihadistes. Dans un cas comme dans l’autre, l’armée française s’en ira sur un sentiment d’échec. »

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3 COMMENTAIRES

  1. il y’a lieu de se poser la bonne question ? Ces forces russes pourront-elle épauler efficacement les FAMas dans leur mission de sécurisation de notre territoire ? ça c’est la seule question qui vaille aujourd’hui. Les questions des droits de l’homme se posent au quotidien dans notre pays. On tue et au mutile hommes femmes, jeunes vieux, enfants au nez et à la barbe de nos partenaires qui, malgré les moyens colossaux dont ils disposent, ne lèvent pas le petit doigt. Eh bien, figurez-vous que ne fait pas partie de leurs missions. Alors nous appartient, à nous maliens de trouver des partenaires qui auront pour mission de réellement combattre ces illuminés qui mettent à feu et à sang notre terroir.
    Des mercenaires russes vous dites ? pourtant quand d’autres font la même chose on parle de “force de sécurité privée” ! Pour nous maliens, aujourd’hui le plus important est de sauver notre patrie d’une déchéance planifiée et orchestrée par des mains invisibles que nous commençons à voir !!!!
    Donc même s’il faut s’allier avec le “diable”, sauvons l’essentiel (la patrie) d’abord !!!!!!

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  2. Trop de passion et très peu de réflexions sur cette affaire Wagner qui est avant tout une révélation pour nous maliens d’abord , c’est à dire qu’on dispose une armée nationale qui n’est plus en situation de libérer ni de sécuriser le territoire , je crois qu’il nous faut sortir dans nos histoires mythiques et du populisme ambiant pour cette la réalité , une armée qui ne réponde plus à sa mission principale n’en est pas une , deuxième réflexion avec la venue de Wagner qui sera incompatible avec les forces internationales présentes , sur quelle stratégie de compassion de leurs départ que nos militaires se reposent ? un sujet qui reste est toujours flou , les gouvernants doivent rassurer les maliens et leurs dire la vérité. J’ai la crainte que la question de la défense et la sécurité nationale soient l’objet de polémique politicienne dont certains veulent aller aux élections et la tentation des autres de s’y opposer pour cause d’insécurité. En tout état de cause la question de sécurité et de défense nationale ne doivent souffrir d’aucune sorte de polémique !

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