Médiation du Faso dans la crise malienne : Le Président Blaise lutte contre les va-t-en guerre

12 Nov 2012 - 13:30
12 Nov 2012 - 13:30
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Alors qu’on s’active pour la guerre, la petite phrase du Président burkinabé, Blaise Compaoré, prononcée à la télévision nationale en marge du forum sur les personnes âgées a retenti comme une mise en garde : « La guerre n’est pas nécessairement un choix utile ni pour le Mali, ni pour la région ». Derrière cette petite phrase se cache en réalité une divergence de fond dans l’approche de la crise malienne. Depuis le sommet de la France-Afrique à Kinshasa, Blaise ne cesse de multiplier les petites phrases de défiance au risque de se brouiller avec la France. De toute évidence, le Président du Faso est agacé par les déclarations tonitruantes et sans nuance de son homologue français, qui peuvent laisser croire qu’au Mali, il n’y a d’autre alternative que la guerre. Pour Blaise Compaoré qui se trouve engagé dans de délicates négociations avec les rebelles maliens, ces propos dissonants sont de nature à torpiller ses efforts. Pourtant, on croyait que la France est en phase avec le Médiateur burkinabè d’autant qu’ils sont tous les deux soupçonnés de sympathie avec les rebelles maliens. En fait, le projet politique du MNLA rencontrait d’emblée une oreille attentive dans les deux capitales (Paris et Ouaga) où résident du reste de nombreux responsables de ce mouvement. Mais Ouagadougou et Paris ne pouvaient sans doute pas soutenir ouvertement les positions maximalistes de leurs protégés, vu que la thèse de l’indépendance pure et simple pouvait difficilement prospérer. Même les Américains, qui paraissaient jusque-là distants, ont pris clairement position : « Nous soutenons l’intégrité territoriale du Mali. Nous sommes contre l’idée d’un Etat indépendant de l’Azawad. Le Mali doit recouvrer aussi vite que possible son intégrité territoriale ». Ces propos émanent du responsable des Affaires africaines au département d’Etat américain, Johnny Carson. La volte-face du MNLA, qui prône à présent l’autodétermination plutôt que l’indépendance, est symptomatique de l’impasse dans laquelle s’est retrouvé ce mouvement dans sa visée d’indépendance. Blaise Compaoré, qui veut des résultats, a sans doute beaucoup pesé dans la balance. Mais comment vendre l’idée de l’autodétermination aux va-t-en guerre qui veulent coûte que coûte, et quoiqu’il en coûte, en découdre avec ceux qui ont osé prendre les armes et qui ont commis le crime suprême, celui d’avoir enfreint l’intégrité du Mali ? La manœuvre de Blaise Pour le Président du Burkina-Faso, il n’est pas possible de revenir au « statu quo ante » et d’ignorer les revendications identitaires des Azawadiens. Vu d’Ouaga, il y a donc un problème qui ne peut être réglé que par la négociation entre les Maliens eux-mêmes. Mais avec qui va-t-on négocier et sur quoi va porter la négociation ? Pour la médiation de Blaise, Ançardine et le MNLA, qui sont des groupes maliens, sont incontournables. D’où les efforts diplomatiques actuellement déployés pour les amener à présenter un projet politique commun pour le Nord. L’alliance MNLA-Ançardine est l’idée maîtresse de la stratégie de Blaise Compaoré. Selon sa diplomatie, une fois l’unité scellée entre les deux groupes autour d’un projet politique, la question des groupes terroristes peut être envisagée avec beaucoup plus de clarté. Apparemment, Blaise Compaoré croit dur comme fer à la viabilité de cette perspective qui, seule, permet d’envisager avec optimisme l’avenir du Mali. Du reste, à l’intérieur du Mali, il y a, pour diverses raisons, des résistances assez fortes contre la guerre. Ils sont très nombreux ceux qui pensent que les troupes de la CEDEAO viennent pour tuer des Maliens. Et ils les imaginent d’autant plus féroces qu’elles combattent hors de leur territoire et sont donc à priori insensibles aux drames humains qu’entraîneraient nécessairement les batailles. Mais il y a aussi ceux qui s’opposent à la guerre tout en nourrissant des desseins inavouables. Aussi, certains politiciens, qui croyaient enfin leur heure venue, voient d’un mauvais œil une intervention étrangère qui viendrait leur ôter toute légitimité. Il y a donc actuellement une grande confusion au Mali, une confusion qui ne peut que profiter aux pêcheurs en eau trouble. D’où l’urgence de clarifier les objectifs qu’on veut atteindre, et de définir les moyens dont on entend se doter pour y parvenir. Quel statut réserve-t-on alors au Nord-Mali ? Si, à travers leurs organisations, les communautés du Nord s’entendent autour d’une plate-forme politique, le reste est presqu’un jeu d’enfant. Mais est-il facile de s’entendre, compte tenu des interférences extérieures et du jeu d’influence pratiqué par les djihadistes et trafiquants de tous bords (trafic humain et de drogue) ? Et la pratique de la charia dans tout cela ? Manifestement, cette  question constitue le point d’achoppement entre les acteurs du MLNA et d’Ançardine. Pour la médiation du Faso, ni la charia, ni même la revendication indépendantiste ne sont des motifs suffisants pour entreprendre des expéditions militaires au Nord-Mali. Et comme se demandait quelqu’un, a-t-on bombardé la Corse parce qu’elle réclamait l’indépendance ? Tout au plus, l’un des rôles de la communauté africaine consiste à aider le Mali à définir un projet politique acceptable par tous les Maliens. Ce projet politique devrait prendre en compte un certain nombre de revendications de nature culturelle ou identitaire propre au Nord  et devrait être nécessairement partagé par tous les protagonistes maliens. Le peuple malien, qui est tolérant et épris de paix, ne devrait pas avoir de grandes difficultés à s’entendre. De l’avis général, le problème, ce sont les groupes minoritaires terroristes (AQMI et MUJAO) qui poussent à la radicalisation. Ce sont ces groupes qui devraient être l’ennemi commun du Mali et de ses alliés africains et internationaux. L’absence d’objectifs et de stratégies des responsables maliens et de la CEDEAO a permis à ces groupes terroristes de renforcer leurs positions militaires et leur mainmise sur les populations du Nord. Comme il le rappelle lui-même, Blaise Compaoré continue de miser sur le dialogue. En tout cas, le temps presse... Jean Pierre James

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