Le Dialogue en gestation dans notre pays, quâil soit politique ou national, dans sa conduite, a rĂ©ussi Ă dĂ©gager une certaine unanimitĂ© Ă son sujet : une incurie et une dĂ©sinvolture absolues par rapport Ă lâinclusivitĂ© pourtant exhibĂ©e urbi et orbi comme le composant essentiel de ce dialogue.
La preuve en est que de vĂ©ritables forces politiques et de la sociĂ©tĂ© civile sont laissĂ©es en rade. Le FSD, la principale force politique dâoppositionâ; la CoFoP, un autre regroupement politique dâoppositionâ; la Plateforme ââAnw Ko Mali dronââ ont annoncĂ© quâils nâembarqueront pas dans un navire dont les capitaines tĂ©moignent un dĂ©sintĂ©rĂȘt total, si ce nâest un mĂ©pris souverain pour leurs prĂ©occupations. Ă ceux-ci, en lâoccurrence le FSD qui est Ă lâorigine de cette dĂ©marche normalement salvatrice, il peut ĂȘtre tenu rigueur pour parjure. Pour autant, et Ă leur dĂ©charge, ils ont alertĂ© sur les graves dĂ©rives et prĂ©conisĂ© des rectificatifs. Ce, alors que du cĂŽtĂ© du pouvoir aucun effort sincĂšre nâa Ă©tĂ© constatĂ© tendant Ă embarquer tous les Maliens (principe de lâinclusivitĂ© oblige) dans le bateau du Dialogue National Inclusif (DNI). Un pays aussi dĂ©chirĂ© par les crises peut-il se permettre le luxe dâaller Ă un DIALOGUE NATIONAL sans une frange aussi importante que reprĂ©sente le FSD, si tant est quâil y a une volontĂ© de guĂ©rir le Maliâ? Mais bon ceux-ci ont eu leur dose de mĂ©pris dans une rĂ©ponse du PrĂ©sident IBK Ă Jeune Afrique, en juin dernier : ââil nây a pas eu de crise post-Ă©lectorale, mais la bouderie dâun seul homme, inconsolable de ne pas ĂȘtre entrĂ© au palais de Koulouba. Quelle que soit lâampleur de son ego, il ne reprĂ©sente pas le sentiment de 20 millions de Maliens. Quant au dialogue, il ne sera ni confĂ©rence nationale ni un troisiĂšme tour Ă©lectoral, que cela soit clairââ. Câest vrai que Soumi champion nâincarne pas le sentiment de 20 millions de Maliens, mais il reprĂ©sente tout de mĂȘme 32,83% des suffrages exprimĂ©s au second tour de la prĂ©sidentielle de 2018, soit 879 235 voix, en faisant lâeffort dâavoir foi aux chiffres communiquĂ©s. Ce nâest pas rien. Mieux, il faudrait intĂ©grer que le nombre important de Maliens qui nâont pas votĂ© en 2018 ne partagent pas nĂ©cessairement le sentiment du PrĂ©sident de la RĂ©publique qui devrait avoir le triomphe modeste avec ses 67,17 contestĂ©s jusquâau jusquâĂ preuve du contraire.
Mais, le MandĂ© Masa, du haut de son mont de Koulouba, a franchi une Ă©tape supplĂ©mentaire avec le dĂ©clenchement dâune hostilitĂ© ouverte par cette dĂ©claration Ă la faveur de la cĂ©lĂ©bration du 59e anniversaire de lâaccession du Mali Ă la souverainetĂ© nationale et internationale. Il a dit : ârĂ©affirmer lâattachement du Gouvernement malien Ă cet accord, quitte Ă en discuter certaines dispositions, lâessentiel Ă©tant dâen conserver lâespritâ. Ce propos aussi populiste (parce quâil rĂ©pond aux attentes de lâopinion dans sa plus grande expression) que polĂ©mique a eu le mĂ©rite dâenflammer les relations entre le Gouvernement et la CMA qui dĂ©cide Ă son tour de suspendre sa participation au Dialogue national inclusif.
De ce qui prĂ©cĂšde, il ressort clairement que lâentourloupe est planifiĂ©e.
Lâenfumage ou du moins la tentative dâenfumage concerne le parrain et sauveur devant lâĂternel du Mali en 2012. En effet, le PrĂ©sident de France, invitĂ© sur France2, le 28 mars 2013, disait : «âle temps oĂč la France dĂ©signait des chefs dâĂtat en Afrique est rĂ©volu⊠(Mais a-t-il poursuivi) Nous voulons quâil y ait des Ă©lections au Mali Ă la fin du mois de juillet. Et ça, nous serons intraitables lĂ -dessus. DeuxiĂšmement, il faut quâil y ait ce dialogue avec toutes les composantes de la sociĂ©tĂ© malienneâ».
LâĂ©lection prĂ©sidentielle a bel et bien eu lieuâŠ
Ă prĂ©sent, place au dialogue dĂ©crĂ©tĂ© qui aprĂšs tant «âdâintransigeancesâ» a Ă©tĂ© mis sur les rails, mais avec une dynamite sous chaque traverse, avec le dessein Ă peine dissimulĂ© de le saborder. Le pari est pourtant risquĂ© pour un pouvoir Ă la lĂ©gitimitĂ© toujours fortement contestĂ©e et engagĂ© sur plusieurs fronts.
Les Mouvements armĂ©s, nonobstant la fenĂȘtre ouverte par lâAccord qui donne la possibilitĂ© dâune rĂ©vision, ont Ă©galement Ă©tĂ© flouĂ©s quelque part sur lâarticle 65 qui stipule : ââles dispositions du prĂ©sent Accord et de ses annexes ne peuvent ĂȘtre modifiĂ©es quâavec le consentement express de toutes les Parties signataires du prĂ©sent Accord et aprĂšs avis du ComitĂ© de suiviââ. Si aucune disposition nâest pour lâheure modifiĂ©eâ; il nâen demeure pas moins que se posera le moment venu la question du ââconsentement express de toutes les Partiesââ et lâavis du ComitĂ© de suivi. Lâon est donc en prĂ©sence dâun passage en force aussi pĂ©rilleux quâhypothĂ©tique.
Enfin, le peuple est la grande victime de cette arnaque politique de haut vol du fait que le ââDialogue National Inclusifââ est volontairement amputĂ© dâobjet dans lâintitulĂ© qui devrait renseigner sur les attentes, mais aussi, et surtout servir de fil dâAriane. Par exemple, le Dr Ousmane SOW a proposĂ© un ââMĂ©morandum Pour un Mali ProspĂšre, Stable et en Paixââ. Ce que recherche le MĂ©morandum est annoncĂ© dĂšs lâintitulĂ©.
Au Cameroun, lâoption a Ă©tĂ© prise sur un ââDIALOGUE NATIONAL POUR LA PAIXââ. Lâobjet du dialogue câest la paix, point barre.
Dans le cas du Mali, lâon se contente juste de mettre en garde : ââquant au dialogue, il ne sera ni confĂ©rence nationale ni un troisiĂšme tour Ă©lectoral, que cela soit clairââ. Il sera quoi alorsâ? Une comĂ©die grotesque et dĂ©risoire perpĂ©tuant une tradition de fuite en avant qui a Ă©lu domicile au Mali depuis 2013, un Ă©niĂšme rendez-vous manque avec lâhistoire. Ă condition quâil se tienne bien sĂ»râŠ
PAR BERTIN DAKOUO