Les femmes du Mali réclament plus de places au niveau de tous les centres de décision du pays. La semaine dernière, elles avaient organisé, sous la houlette du Groupe pivot «Droit et citoyenneté des femmes», un sit-in à l’Assemblée nationale. C’était pour amener les députés à entériner certaines propositions du Code électoral relatives à la participation d’un taux maximum de 70 % autant pour le sexe masculin que féminin sur les listes de candidature et au niveau de la Ceni. Prêtes à tout pour faire de leur participation à la vie publique une réalité, après le sit-in, Mme Kané Nana Sanou, présidente du Groupe pivot, a bien voulu nous accorder une interview. Exclusive !
L’observateur : Mme la présidente, pour faire de votre participation à la vie publique une réalité, vous avez organisé un sit-in à l’Assemblée nationalité. Votre initiative a-t-elle été une réussite ou un échec ?
Nana Sanou : Le sit-in a été une réussite. Il n’est pas dit que le fait que les députés n’ont pas voté l’amendement que ça été un échec. L’objectif, c’était que les femmes comprennent ce que nous voulons. Que les députés sachent qui nous suivons et ce que nous faisons. Parce que nous avons suivi cette affaire depuis l’atelier organisé par l’administration territoriale, il y a plus d’un an. Nous avons suivi le projet de loi jusqu’à l’Assemblée nationale. Nous avons été écoutées.
Concrètement, Mme la présidente, est-ce qu’il est possible qu’une telle loi soit adoptée par les parlementaires dont la majorité est composée d’hommes ?
Nous savions plus ou moins un peu sur la position des députés par rapport à la question. Mais, on avait pensé, qu’avec toutes les explications que différentes personnes leur avaient données, qu’ils allaient, peut-être, accepter de retenir l’amendement de la loi électorale. Malheureusement, chacun a sa façon de comprendre. Peut-être que les députés pensent qu’aujourd’hui les femmes doivent encore se battre. On leur a dit que nous nous battons. Toutes les démocraties sont passées par ce chemin en un moment donné de leur histoire. Elles ont toutes voté le quota pour équilibrer la présence des hommes et des femmes dans les instances de décisions. Malheureusement, les députés actuels ne l’ont pas adopté. Mais, ce n’est pas un échec. Nous pensons que la lutte n’est pas seulement couronnée de succès. Elle est faite de hauts et de bas. Nous nous sommes dites que l’essentiel ce n’est pas de nous décourager. C’est plutôt de continuer à lutter, à se battre jusqu’au moment où nous obtiendrons gain de cause.
Donc, vous ne baissez pas les bras. Que comptez-vous faire encore ?
Nana Sanou : Nous allons nous retrouver et nous allons décider… Il y a des idées. Comme je l’ai dit, avant même qu’on ne parte à l’Assemblée nationale, on savait que la loi allait passer difficilement. Donc, on avait déjà commencé à dégager des stratégies. Nous allons les développer dans les jours à venir pour revenir à la charge par rapport à cet amendement.
L’occasion est bonne pour moi de dire que le ministre de l’Administration Territoriale, par rapport à un amendement personnel sur les listes de candidatures pour les élections communales, demandait aux différentes institutions (Assemblée nationale, ministères…), de réfléchir sur cette question. Puisque les communales sont prévues jusqu’en 2009, nous l’avons retenu aussi. On s’est dit que sûrement il y aura relecture d’ici cette date. Et nous allons nous repositionner pour notre amendement.
Actualité oblige ! Mme la présidente, vous, en tant que responsable des femmes, est-ce qu’on peut connaître votre point de vue par rapport à l’Accord d’Alger ?
Nana Sanou : Je m’excuse de ce que je vais dire. Ça ne paraîtra pas, peut-être très digne d’une responsable. C’est dommage qu’à l’époque des faits, j’étais en dehors du pays. C’est sur Rfi que j’ai appris la nouvelle. Jusque-là je n’ai eu que des commentaires des différentes réunions, tenues ici à Bamako et dans les régions. Personnellement, je n’ai pas encore le document de l’Accord pour le comparer à celui du Pacte national. C’est avec la comparaison des deux documents que je pourrai me prononcer sur la question.
Et quand le général Kanfougouna Koné, le signataire lui-même, dit que l’Accord d’Alger n’a rien à voir le Pacte national… ?
Nana Sanou : (…) Alors que les gens pensent. Je ne sais pas trop. En tout cas, j’ai appris qu’ils ont pris le Pacte en changeant certains points.
Je le redis. Je n’ai pas un point de vue précis sur l’Accord. Seulement, mon inquiétude, même avant l’Accord, était qu’on fasse très attention avec le problème du Nord.
Quand j’appris que Kadhafi a installé son consulat au Nord, en tant que Malienne je trouvé que c’est pas normale. Quelle que soient les conditions, tous les autres pays ont leurs consulats à Bamako. Pourquoi la Libye établit son consulat à Kidal ?
Le deuxième aspect, depuis que j’ai appris qu’on va entamer les études d’extraction du pétrole du Nord -on attend qu’il y a du pétrole dans la zone depuis le régime Moussa Traoré-, je me suis dit qu’on doit faire extrêmement attention pour qu’on ne tombe pas dans les histoires de guerre comme les autres pays. Quand on regarde autour de nous, en Afrique, dans tous les pays où il y a le pétrole, l’or et le diamant, ils sont exposés aux conflits et à la guerre. Le problème est simplement lié à ces richesses. En tout cas je dis aux autorités maliennes de faire attention avec les problèmes du Nord. Sinon, ça peut nous créer de sérieux problèmes.
Propos recueillis par K. YOU