Ebola ou comment lutter contre la maladie dans un contexte de sécurité dégradé, l’exemple du Burkina Faso et du Mali

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La mort à Bamako le 11 novembre, de l’infirmier qui a soigné des patients guinéens nous rappelle que l’ensemble des personnels de santé et les membres des ONG doivent être continuellement informés pour  répondre aux questions pratiques des acteurs de terrain des ONG, afin qu’ils puissent suivre rigoureusement les procédures.

 

Le temps d’incubation du virus Ebola varie de 5 à 21 jours (le pic étant atteint en général au bout de 1 semaine) mais durant cette période les sujets humains ne sont pas contagieux. Cette information doit être relayée sur le terrain afin d’éviter toute psychose des acteurs : tant qu’aucun symptôme n’apparaît, il faut continuer à employer les mesures de protection identifiées comme nécessaires sans excès de peur.

Les premiers symptômes sont une fatigue fébrile très soudaine, des douleurs musculaires,  des céphalées et un mal de gorge. Plus tard peuvent suivre des vomissements, la diarrhée, des éruptions cutanées et des cas d’hémorragie internes et externes (saignement des gencives et du sang dans les selles) dans environ 10% des cas.

Le diagnostic de la maladie à virus Ebola est malaisé car celle-ci est difficile à distinguer du paludisme (600 000 cas dans la région), de la fièvre typhoïde et de la méningite par exemple.  Des échantillons envoyés aux laboratoires permettront une investigation complète. Pourtant il faut noter l’extrême risque biologique des échantillons provenant des patients humains. Ainsi s’il n’est pas possible de convoyer ces échantillons dans de bonnes conditions, il vaut mieux s’abstenir de tout envoi. De même, dans des conditions hospitalières non spécialisées, les soins aux personnes malades doivent éviter tout soin invasif (prise de sang par exemple) et se focaliser sur le soin des symptômes uniquement.

 

Au Burkina Faso et au Mali où, malgré un deuxième cas, l’épidémie ne semble pas s’être installée, les messages auprès de la population doivent porter en priorité sur la prévention:

– sur la réduction des risques de transmission entre les animaux (chauve souris / singes-primates) et l’homme par la manipulation des animaux avec des gants, par le port des vêtements de protection, par  la cuisson rigoureuse du sang et de la viande. Là encore, les personnels des ONG doivent éviter tout contact avec les animaux, même les animaux de ferme tels que les cochons.

 

– sur la réduction des risques  de transmission interhumaine à travers des contacts directs ou contacts avec des liquides biologiques par le port des gants et des équipements de protection individuelle à usage unique. Le lavage des mains doit être systématique mais il faut rappeler qu’il n’est pas suffisant pour les personnels soignants confrontés aux cas suspects et cas possibles. En effet, il est recommandé d’utiliser les équipements de protection individuelle  et les équipements de protection individuels renforcés. Ces équipements individuels sont à usage unique. Le cadre logistique doit donc être particulièrement étudié et planifié pour faire parvenir en temps et en heure les kits référencés (comprenant masque, double paire de gants nitrile, combinaison…). Il est aussi indispensable de rappeler ici que les cas européens ont été infectés lors du déshabillage des personnels. Il faut donc insister auprès de nos collaborateurs et des personnels soignants de  terrain sur le respect strict de la procédure de déshabillage (on se référera utilement une nouvelle fois au site de l’OMS).

 

– sur l’endiguement de l’épidémie par une inhumation rapide sans manipulation de corps et par des équipes spécialisées, par l’identification et le suivi de l’état pendant 21 jours des personnes ayant été en contact avec une personne infectée (des discussions sont en cours pour passer cette période à 30 jours), par une bonne hygiène et le maintien d’un environnement propre et la séparation des sujets sains/malades.

La non manipulation des personnes décédées est essentielle, les corps des personnes décédées présentant un risque contagieux beaucoup plus élevé que ceux des personnes malades.

La séparation des sujets sains/malades est très délicate d’un point de vue pratique et psychologique pour les patients mais doit être menée de façon stricte. La connaissance précise de la catégorisation est essentielle. Cela permettra aussi d’expliquer aux personnes isolées qu’elles ne sont pas destinées à une contamination certaine.

Pour rappel, voici  la définition des différents cas  (là encore des mises à jour doivent être consultées très régulièrement):

1/ Cas suspect : Un cas suspect est défini comme toute personne présentant, dans un délai de 21 jours après son retour de la zone à  risque 2, une fièvre ≥ 38°C.

2/ Cas possible : Toute personne présentant, dans un délai de 21 jours après son retour de la zone a risque 2, une fièvre ≥ 38°C  et pour laquelle une exposition à risque avérée a pu être établie dans un délai de 21 jours avant le début des symptômes ou qui présente une forme clinique grave incluant des signes hémorragiques.

3/ Cas confirmé : Toute personne avec une confirmation biologique d’infection au virus Ebola

4/ Cas exclu : Un cas est exclu s’il ne répond pas à la définition de cas suspect ou si un diagnostic négatif d’infection a été établi par le CNR.)

 

Les acteurs sur le terrain devraient donc essayer de contacter et convaincre au préalable les autorités traditionnelles et religieuses pour obtenir leur consentement formel. La population doit être prête à suivre les mesures d’isolation et surtout éviter toute inhumation traditionnelle qui entrainerait une  manipulation des corps. Ces dispositions d’information doivent être réalisées en amont dans l’ensemble des zones à risques afin de pouvoir contrer les obstacles psychologiques aux mesures nécessaires à l’endiguement de l’épidémie.

 

Finalement, malgré la gravité du sujet de cet article et dans le cadre de mes recherches épidémiologiques dans les pays du Sahel, je tiens à rappeler que la maladie à virus Ebola est loin d’être l’épidémie actuelle la plus répandue. Le paludisme touche aujourd’hui plus de 600 000 personnes (ce qui pose d’ailleurs un réel problème dans la prévention et le diagnostic). D’autre part, les efforts constants pour la lutte contre le sida ne doivent pas non plus se relâcher.

 

 

Patrick SCHWARTZ

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