Entretien avec El Hadji Amadou Diop dit ok-Pacifico: «Il est impensable de faire un évènement de grande envergure sans y inclure les rappeurs»

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Il est toujours derrière la caméra pour faire de belles images, faire des clips et réaliser des émissions. Mais jamais devant la caméra.  Il aime bien ce qu’il fait, et est très connu dans le monde du Hip Hop au Mali. El Hadji Amadou Diop dit L-Pacifico, puisque c’est de lui qu’il s’agit,  est un génie caché.  Nous sommes allés à la rencontre de ce jeune, qui fait la fierté du hip hop malien avec ses réalisations et sa participation dans l’émission G21 en compagnie de  Abba Samassékou. L-Pacifico nous parle de son parcours, ses projets et sa vision du mouvement Hip Hop au Mali.

Bamako Hebdo : Vous pouvez vous présenter à nos lecteurs?
Ok-Pacifico : Je m’appelle El Hadj Amadou Diop. J’ai 27 ans, natif de Bamako.  Je suis réalisateur et promoteur de spectacles.  Après un bac série Langues et Lettres, j’ai fait des études en journalisme et communication à l’ ESTM. Puis, j’ai suivi pendant 3 ans plusieurs formations en écriture, réalisation et  production de films. Je suis actuellement au Conservatoire des Arts et Métiers Multimédia Balla Fasséké Kouyaté (section multimédia).

Comment est venu le surnom L-Pacifico?
C’est un surnom ironique. Pendant mon enfance et mon adolescence je me bagarrais tout le temps. J’avais le sang chaud. Au début, on m’appelait, Pacific man, ensuite comme j’étais un fan de Oxmo Puccino(je le suis toujours), j’ai pris "L" pour le "El" de mon prénom puis "Pacifico" au lieu de pacifique pour avoir le petit côté latino à l’image de Oxmo Puccino. Et cela a donné L pacifico.

Comment vous êtes venu dans le mouvement  hip-hop?

J’ai toujours été un  fan de cette musique qu’est le rap et de la culture Hip Hop.  Professionnellement, j’ai commencé à jouer du rap dans les émissions radio que j’animais sur la station horizon FM de Bobo Dioulasso (Burkina Faso) depuis 1996. Puis j’ai commencé à rapper à partir de 1999. Dans ma pseudo carrière de rappeur, j’ai eu à participer entre autres: au titre "Sabatirarmix" de l’album NI Allah Sonamade Tata pound, au titre "Botchobaraba" de l’abum Surafin de Amkoullel D’autre part, j’ai été invité par plusieurs autres artistes du Mali et d’ailleurs à poser quelques rimes sur leurs morceaux. C’est le cas notamment de Penzi, des Crazy B de Kayes ou encore Dynamike et M.O.H de la Suisse et du collectif Farrawo etc. Toutefois, cet art pour lequel j’ai beaucoup d’amour et de respect n’a été et n’est toujours qu’un hobby pour moi. Enfin, la fréquentation de Toumani Sangaré (réalisateur du collectif KOURTRAJME) qui produisait des artistes hip hop et réalisait leurs clips, m’a permis de découvrir le hip hop sous un autre angle. Last but not the least, sachez que Amkoullel, une des figures emblématiques du hip hop malien, est mon cousin. Ceci explique donc ma proximité depuis très longtemps avec le mouvement. Et c’est d’ailleurs lui qui m’a présenté ABBA et la plupart des acteurs du hip hop quand j’étais plus jeune.

Qu’est ce que vous faites avec les artistes, les animateurs et autres?
Aujourd’hui j’ai trois types de contacts avec les artistes : la programmation et la réalisation de G21: Je réceptionne et programme leurs clips, m’occupe de leurs actualités à travers des annonces dans G21 et la réalisation de reportages et clips. J’apporte aussi mon concours dans l’organisation d’événements culturels (concerts, rencontres, festivals).

Qui est Abba Samassekou pour vous ?
Mamani Abba Samassékou est un grand frère, un ami, un formateur et aujourd’hui un associé. Ca fait beaucoup, je sais mais il est très difficile pour moi de qualifier ce qui me lie à ce monsieur. Si on met de coté l’éducation que j’ai reçue de mes parents (Que Dieu les protège et les garde le plus longtemps possible près de moi et mes frères) et ma formation de base à l’école, je lui dois beaucoup. Je profite de cette occasion pour le remercier lui et toute sa famille qui, avec la mienne ne font plus qu’une. Je remercie Dieu d’avoir fait croiser nos chemins et je le prie de continuer à guider nos pas pour nos projets futurs. J’ai appris beaucoup avec lui, je continue toujours d’apprendre à ses cotés. C’est une personne riche humainement et très dense dans son domaine. Le hip hop malien et même le paysage culturel malien peuvent être fiers  de le compter parmi ses acteurs.

 Quel jugement portez-vous sur le mouvement hip hop ?

Je pense que c’est un mouvement qui est en plein essor à tous les niveaux. C’est-à-dire tant sur les qualités techniques de production (clips, musiques et concerts) qu’artistiques. Il y a quelques années, le rappeur ou le groupe de rap qui faisait le plein du palais de la culture s’en glorifiait pendant toute une année. Aujourd’hui Dieu merci, c’est le Stade Omnisports qui reçoit la plupart des artistes hip hop. Ca été le cas de Tata Pound, Mylmo, Penzi, GRR, Ghetto Kafri etc. De nos jours au Mali, il est impensable de faire un évènement de grande envergure sans  inclure les rappeurs. Les campagnes électorales de 2012 nous le prouveront bientôt. En effet, le mouvement a fait un formidable bond en avant, ces deux dernières années, sous la double impulsion de la nouvelle génération et des anciens : le sang neuf insufflé par la nouvelle vague d’une part et la maturité des anciens qui commencent à s’exporter et diversifier leurs activités d’autre part. A cet effet, on peut citer l’engouement et le soutien populaire dont bénéficient les jeunes rappeurs grâce à leur capacité à séduire et captiver, leur tenue vestimentaire, et les messages véhiculés. Dans lesquels la jeunesse d’aujourd’hui se retrouve.  Au titre des anciens, on peut citer Buba qui a aujourd’hui une structure de production (MALIBA PRODUCTION) où il enregistre des jeunes artistes et réalise leurs clips, ou encore Amkoullel, Ramsès et King à travers Baama Saaba, qui ont produit avec l’appui de Blonba, la première comédie musicale du hip hop malien. Je ne saurais fermer cette parenthèse sans parler de Yéli Fuzzo qui organise depuis deux ans, le Mali Hip Hop Awards, les trophées du rap malien. Cérémonie qui m’a déjà gratifié de 2 trophées de meilleur réalisateur ( 2009/2010). J’en profite pour remercier une fois de plus les organisateurs, les artistes qui ont fait appel a moi pour travailler sur leurs clips et surtout le public qui a voté pour moi. En conclusion je pense que le mouvement hip hop se porte bien et évolue avec son temps.

Quels sont vos projets à court, long et moyen termes?
A court terme, il faut  retravailler l’habillage et le contenu de Génération 21, organiser de grands événements avec des artistes de renom.

A moyen et long termes: finir la production d’une série tv que j’ai commencé il y a déjà 3 mois et la faire diffuser , décrocher mon diplôme au CAMM/BFK; puis produire d’autres émissions TV  et faire des longs métrages.

Avez-vous un mot de la fin ?
Je remercie tout d’abord Dieu, mes parents, mes collaborateurs et amis ainsi que la rédaction de Bamako  Hebdo  pour s’être intéressé au hip hop malien à travers ma modeste personne. Je finirai par ceci: le mouvement hip hop est l’un des seuls sinon le seul mouvement au Mali qui reussi à regrouper tous les jeunes du pays.

En plus de participer à l’éveil des consciences, il est aussi créateur d’emplois (producteur de son, organisateur de concert, réalisateur de clips, d’affiches etc.).Il participe donc activement au développement du pays. Aussi, je puis afficher toute ma fierté d’appartenir à ce mouvement.
K TRAORE

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