Affaire achats d’aéronef et de matériels militaires : La dynamique de sauver la crédibilité du Mali

0

Achat d’avion et marché du ministère de la Défense : « Aucune entorse aux lois et règlements budgétaires »Soulagement, dénouement heureux ou différemment de la situation en attendant la sanction des présumés auteurs de détournement des deniers publics sous le manteau de la « surfacturation » ? le suspens est resté intact,  vendredi dernier à l’Hôtel Salam, lors de la conférence de presse qu’animait la ministre de l’Economie et des finances, Boiré Fily Sissoko, au milieu d’Hellène Ngarnim Nganga, de la Banque africaine de développement (BAD) et son homologue de l’Emploi et de la formation professionnelle, Mahamane Baby, à sa droite et de Paul Numba, de la Banque mondiale, chef de file des PTF, à sa gauche.

 

C’était donc l’apothéose ce soir là, où Boiré Fily Sissoko est apparue très ragaillardie et auréolée de sa victoire sur des adversaires déterminés à ne lui concéder aucun cadeau durant la mandature du président de la République, Ibrahim Boubacar Kéïta. Et, de mémoire de Malien, jamais un dossier n’a autant cristallisé l’attention de l’opinion nationale comme celui touchant à l’acquisition du fameux aéronef de commandement du Président de la Republication et des équipements militaires destinées à nos Forces armées et de sécurité. Durant près d’une heure d’horloge, Boiré Fily Sissoko et ses co-conférenciers ont donné des éclaircissements sur ce dossier sulfureux qui aura fait couler au tant de salive que d’encre. Où l’honneur des proches des ministres et des conseillers techniques a été à tord ou à raison jeté en pâture.

L’amour parfait entre le Mali et ses Partenaires !

Pour les deux représentants des PTF à la conférence, cette affaire est à mettre dans le cadre d’un simple malentendu, dont le mérite aura été le dévoilement sur la capacité de résistance des ressorts de notre démocratie et de nos institutions d’audit. Toute chose qu’il faut saluer, s’est réjouit le directeur des Opérations de la Banque mondiale, Paul Numba. Selon lui, les règles de fonctionnement des PTF sont assez claires. Elles attribuent au Fonds monétaire international (FMI) le rôle de régulateur. C’est-à-dire qu’il donne à la Communauté des Bailleurs, le signal d’assurance  afin d’établir que le cadre macroéconomique du pays est probant et permet de s’engager durablement dans un effort d’appui budgétaire. Il s’agissait donc pour le gouvernement du Mali de donner des réponses à des appréhensions du Fonds. Sinon que les partenaires financiers n’ont ni rompu ni interrompu leur relation avec le Mali durant cette période. Compte tenu des questions posées par le FMI, les appuis budgétaires ont été retardés jusqu’à ce que des clarifications soient apportées par le gouvernement.

Parlant du cas spécifique de la Banque mondiale qu’il représente, il dira que durant la période qui a précédé la levée de la suspension, la banque mondiale n’a jamais interrompu sa collaboration avec le Mali, ce qui s’est passé est malheureux, mais le retard ne concerne que le dossier relatif aux appuis budgétaires. Il avait été suspendu jusqu’à ce que l’accord intervienne entre le gouvernement et le Fonds. Sinon avec la banque mondiale le Mali a signé un accord de financement de 63 millions de dollars, environ 34,650 milliards de Fcfa, dans lequel, il y a un don de 17 millions, environ 9,350 milliards de Fcfa, qui vont être immédiatement décaissés. Le reste qui est constitué par un prêt à des taux concessionnels va devoir attendre la ratification de l’AN, ce qui doit intervenir avant la fin de l’année ou au plus tard janvier 2015. Dans tous les cas, tout est fait pour que ces ressources soient mises à la disposition du gouvernement dans un bref délai pour appuyer la mise en œuvre des réformes qui ont déjà été engagées et qui continuent à être mise en œuvre. Le même constat est partagé par la représentante de la BAD.

Ecart, surfacturation ou clarification de la destination ?

Parlant du paiement des 40 milliards Fcfa sur les 69 initialement annoncés dans le dossier, Fily Sissoko dira qu’il est prévu de prelever ce montant dans le budget 2014, avant de donner des éclaircissements sur les 29 milliards présentés par le Vérificateur général comme surfacturation. « Je pense que dans le rapport provisoire, il avait parlé d’un écart de 29 milliards qu’il avait qualifié de surfacturation, mais à l’arrivée sur les 29 milliards, il retient plus que 9 milliards. Là également, il ne parle pas de surfacturation mais de clarification de la destination des ressources. Suivant la version du prestataire, cette ressource va dans le financement des munitions qui n’avaient été manifestées dans le protocole… » a-t-elle précisé. Selon elle, sur cette base, il a été convenu avec le FMI de payer la marchandise réceptionnée. Mais, le paiement s’effectuera sur la base des prix fournisseurs.

Mais là aussi, des divergences de vue ont apparu. Car, le Fonds est revenu à la charge pour attirer l’attention du Gouvernement sur le fait que l’arrangement n’est pas à trouver avec lui, mais le client. Donc, s’il y a des discussions à faire, il sied donc d’associer le partenaire commercial pour que toutes les parties soient au même niveau d’information. La Banque aussi a écrit sur des soucis qu’elle a, à se faire, au sujet de l’annulation de la garantie, telle que préconisée par la Cour Suprême. « Aujourd’hui dans le budget, on a 40 milliards pour Guo Star pour 2014. Mais, s’il s’est avéré qu’on lui doit plus, on vérifiera les prix avant de prendre toute décision. Car, avec tout ce qui s’est passé autour de ce dossier, au moment de payer on vérifiera les prix. Mais, il est évident qu’on lui concède une marge, il faut que les frais financiers soient en cours, donc aujourd’hui personne n’est en mesure de dire exactement ce qu’on devra payer… » a indiqué la ministre avant d’ajouter que lorsqu’elle a reçu la lettre de l’avocat de Guo Star, elle l’a immédiatement répercuté au chargé de dossier du Mali au FMI. En réponse, celui-ci a répondu en disant que le Fonds n’a pas vocation à intervenir dans les relations du gouvernement avec ses partenaires commerciaux, au-delà de ce qui avait été dit.

L’image de l’Etat voyou à bannir

Mais au niveau de son département, l’on se souci aussi de la crédibilité de l’Etat qu’il faut préserver. Car, sans cela les souffrances des 10 mois allaient être plus dur à supporter. Car durant cette phase, le Gouvernement avait convenu avec le Fonds de procéder aux emprunts sur le marché financier de la sous-région. Il y a donc lieu de ne pas donner l’image d’un Etat voyou quelque soit la situation. Mais, avant toute prise de décision, ils vont demander l’avis de la Cour suprême sur la meilleure façon de gérer le dossier pour avancer. Car, le gouvernement a conscience qu’il faut trouver des moyens à payer les arrangements qu’il aura avec les prestataires. « Mais je ne saurais à ce stade dire quel va être le type d’arrangement à trouver, mais on doit en discuter avec la banque et prendre l’aval de la Cour suprême sur ce qu’on est autorisé à faire », dira t-elle.

Après la réception de la lettre de réclamation de l’avocat de Guo Star, le ministre Sissoko dira que : « maintenant on a décidé d’annuler la garantie, il faut maintenant qu’on s’organise pour payer. Parce qu’il y a une disposition du protocole qui stipule que, s’il y a rupture unilatérale du contrat par une des parties, donc l’ensemble est exigé. Or aujourd’hui, nous n’avons pas tout cet argent dans le budget, on a que 40 milliards dans le budget ».  Et d’ajouter qu’à ce jour, le contrat a été livré par rapport à ce qui est dans le bordereau à 95%. « A ce stade, après l’avis du fonds on va prendre l’avis de la cour suprême comme ce sont eux les juges des comptes pour nous dire ce qu’on doit faire pour éviter d’aller en contentieux et faire en sorte que l’Etat garde sa crédibilité » a-t-elle conclu.

Mais, parlant du gap, le gouvernement a du souci à se faire à en croire aux explications de la Ministre des Finances. Car, s’il doit être payé, ça se fera avec quel argent ? S’interroge- t- elle. Et c’est là où se trouve le piège. Car, le FMI se dégage en laissant la patate chaude entre les mains du gouvernement sans faire des propositions de solutions. Puisque tout le monde était effarouché par rapport aux 29 milliards, exhibés par le vérificateur général comme surfacturation. Sous donc l’effet des émotions, il a été convenu avec le Fonds de s’en tenir aux 40 milliards sur la base des calculs effectués avec le FMI partant des prix fournisseurs.

« C’est pourquoi nous voulons nous en tenir à ce montant en prenant conseil avec le Fonds et la Cour suprême. Mais, dans tous les cas, il faut que quelqu’un paie, même si nous mêmes ne souhaiterions pas prendre le risque d’élargir le déficit, ce qui n’est pas bien pour le gouvernement lui-même. C’est dire que le dossier n’est pas encore clos » a clos la patronne de l’hôtel des Finances.

Mohamed A. Diakité

Commentaires via Facebook :