Déclaration liminaire de la conférence de presse du 31 mars 2021 : Pour la publication d’un Chronogramme clair et précis sur la période dédiée aux réformes et celle dédiée aux élections.

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I – Le Contexte

La période de transition est ouverte pour une période de dix-huit (18) mois au Mali, à partir du 25 septembre 2020 suivant l’article 22 de la Charte de la Transition promulguée suivant le Décret n°2020-0072/PT-RM du 1er octobre, signé du Président de la Transition, Chef de l’État, Bah N’DAW.

L’article 2 consacre les 8 missions de la Transition : le rétablissement et le renforcement de la sécurité sur l’ensemble du territoire national ; le redressement de l’État et la création des conditions de base pour sa refondation ; la promotion de la bonne gouvernance ; la refonte du système éducatif ; l’adoption d’un pacte de stabilité sociale ; le lancement du chantier des réformes politiques, institutionnelles, électorales et administratives ; l’organisation des élections générales et la mise en œuvre de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger.

Le Décret n°2020-0239/PT-RM du 03 décembre 2020 a fixé la liste nominative des membres du Conseil National de la Transition (CNT) qui est l’organe législatif de la Transition avec pour missions de veiller à l’orientation, au contrôle et au suivi-évaluation de la feuille de route de la transition.

La Cour Constitutionnelle, à travers l’Arrêt n°2020-07/CC du 18 décembre 2020 relatif à la requête aux fins de contrôle de conformité à la Constitution du Règlement intérieur du Conseil National de Transition (CNT), a édicté que le Conseil national de Transition est l’organe législatif de la Transition, que  les personnes le composant sont des membres et non des députés, que leur mandat prend fin conformément à l’article 22 de la Charte de la Transition.

II – Les défis non résolus :

La dernière mission de supervision de la CEDEAO au Mali s’est déroulée du 11 au 12 janvier 2021. Elle a concerné les autorités de transition et les forces vives Maliennes (partis politiques, société civile, etc.). Elle a recommandé, entre autres, de renforcer les concertations et le dialogue, d’inclure toutes les forces vives pour une transition inclusive, apaisée et réussie, de respecter le délai des 18 mois contenu dans la Charte et de créer les conditions pour l’organisation des élections de fin de transition.

Elle a aussi rappelé qu’il faille dissoudre le CNSP et cela fut fait conformément aux engagements pris par la junte.

A la suite de cette mission, le Ministère de l’administration territoriale et de la décentralisation (MATD) a organisé des concertations avec la classe politique et les organisations de la société civile, les 25, 26 et 27 janvier 2021. Les conclusions de cette concertation ont, entre autres, trait à la création d’un Organe unique et indépendant de gestion des élections (OGE) avant le 31 mars 2021, la poursuite de la réorganisation territoriale, le changement du mode de scrutin pour l’élection des députés.

Le Premier ministre a présenté le Plan d’Actions du Gouvernement devant le Conseil National de Transition, le 19 février 2021. Il a soutenu, en ces lieux, l’impossibilité de la mise en place de l’OGE unique et indépendant réclamé par la classe politique ; en raison du temps restant à la Transition.

Le 3 mars 2021, le MATD a publié les conclusions de la concertation tenue avec la classe politique et la société civile en janvier. Le MATD a clairement affiché sa position de garder le statu quo dans l’architecture institutionnelle actuelle pour organiser les futures élections (MATD, Délégation générale aux Élections-DGE, Commission Électorale Nationale Indépendante-CENI, Comité National de l’Égal Accès aux Médias d’État-CNEAME et Cour Constitutionnelle).

Ainsi, l’architecture institutionnelle, qui a créé la crise postélectorale des élections législatives de 2020 ayant abouti au coup d’État du 18 août 2020, est remise en avant par les autorités de la transition.

Actuellement, une impasse s’installe entre la volonté des autorités de la transition et celle de la majorité de la classe politique et d’OSC qui continuent à réclamer l’OGE unique.

C’est ainsi que le Primature a décidé au cours de ce mois de mars 2021 (au tiers du parcours de la transition) de la création d’un Comité stratégique ; afin de définir le périmètre des réformes au regard du contexte et de la durée de la transition, formuler des recommandations sur la base des réformes identifiées par le dialogue national inclusif ainsi que les journées de concertations nationales, promouvoir l’esprit des réformes politiques et institutionnelles.

A ce jour, aucun Chronogramme n’existe pour identifier clairement la période dédiée aux réformes et celle dédiée aux élections. La durée restante à la transition est de 12 mois.

III – La contribution de la société civile malienne à la réussite de la transition :

Dès le lendemain du coup d’état du 18 août 2020, la société civile malienne, spécialisée sur les questions électorales et de gouvernance, s’est engagée pour la réussite de la transition.

C’est ainsi que la Synergie des OSC a produit deux déclarations en août et en septembre 2020 sur les réformes majeures à mener. En décembre 2020, de concert avec les OSC évoluant dans le processus électoral, elle a fait une alerte sur la création de la Cellule d’appui au processus électorale de la transition (CAPE), qui vient amenuiser les efforts vers la création d’un Organe unique de gestion des élections.

Les 25, 26 et 27 janvier 2021, elle a participé aux travaux de relecture de certains textes de loi initiés par le Ministère de l’administration territoriale. Les conclusions portent, entre autres, sur la création de l’organe unique et indépendant des élections avant le 31 mars 2021 et la révision du mode de scrutin des députés.

En février 2021, la Synergie a produit un communiqué de presse suivant lequel elle prend acte de la dissolution de la CENI et appelle à l’accélération de la mise en place de l’Organe unique et indépendant de gestion des élections. La Synergie a félicité cet acte de transparence des Autorités de la transition et les a exhortés à accélérer la mise en place de l’Organe unique et indépendant de gestion des élections avant le 31 mars 2021.

C’est dire que du coup d’état à ce jour, la Synergie s’est également investie, de concert avec les médias écrits et audiovisuels, dans l’animation de débats sur la nécessité des réformes politiques institutionnelles et électorales durant cette période propice de la transition au Mali.

Aussi, l’Observatoire pour les élections et la bonne gouvernance aproduit un document de plaidoyer sur les réformes, en février 2021. La Fondation Tuwindi, quant à elle, a organisé du 24 au 26 février 2021, un atelier de Co-construction de la 4ème République qui a vu des propositions de modification de 53 articles sur les 122 de la Constitution du 25 février 1992 ; toute chose qui milite pour l’élaboration d’une nouvelle Constitution au lieu d’une simple révision.

L’Association des Jeunes pour la Citoyenneté Active et la Démocratie (AJCAD Mali) a également organisé, les 23 et 24 mars 2021, le Forum National de la société civile sur les réformes constitutionnelles et électorales au Mali. Il entre dans le cadre de la mise en œuvre des actions de la Synergie des OSC pour des Réformes Profondes au Mali composée de l’Association des Jeunes pour la Citoyenneté Active et la Démocratie (AJCAD Mali), l’Observatoire pour les élections et la Bonne Gouvernance, Tuwindi, Doniblog et le Consortium Ele- Droits Humains Inclusifs. Le Forum National de la société civile a adopté 10 propositions de réformes constitutionnelles et 10 propositions de réformes électorales ; tout en dégageant le niveau de priorité et la motivation des choix opérés.

IV – Les Réformes politiques institutionnelles et électorales prioritaires :

Pour la réussite des élections de fin de transition, il est important de relire en amont :

La Constitution de la République du Mali du 25 février 1992:

  • Consacrer la création d’un organe indépendant et unique de gestion des élections (OGE) dans la Constitution, dans un souci de cohérence et d’efficacité technique et financière ; avec toutes ou parties des prérogatives du Ministère de l’administration territoriale, de la CENI, de la DGE et de la Cour Constitutionnelle. L’OGE dispose d’agents électoraux professionnels, dresse un fichier électoral fiable et proclame les résultats définitifs des élections Présidentielle et Législatives et la Cour Constitutionnelle se charge des Contentieux. Relire les attributions de la Cour constitutionnelle (articles 33 et 86);
  • Revoir le délai de l’entre-deux tours à l’élection présidentielle afin de vider le contentieux électoral d’une part, et permettre aux deux candidats arrivés au second tour de battre une campagne efficace, d’autre part (article 33) ;
  • Changer le mode de scrutin actuel pour l’élection des députés à l’Assemblée nationale (majoritaire uninominal ou plurinominal à deux tours) en un mode de scrutin proportionnel (article 61);
  • Revoir les modalités de désignation des membres de la Cour Constitutionnelle. Le système actuel de désignation permet au Président de la République la désignation directe et indirecte des 9 membres de la Cour Constitutionnelle. Ce qui entache gravement sa neutralité (article 91) ;
  • Mettre les verrous pour l’appréciation des coups d’État ou putschs pour empêcher des problèmes de qualification et empêcher toute amnistie aux putschistes (article 121).
  • La Loi n°97-010 du 11 février 1997, modifiée, portant loi organique déterminant les règles d’organisation et de fonctionnement de la Cour constitutionnelle ainsi que la procédure suivie devant elle:
  • Revoir les modalités de désignation des membres de la Cour Constitutionnelle (article 1er) ;
  • Revoir les attributions de la Cour constitutionnelle, en lui enlevant la proclamation des résultats définitifs des élections présidentielle et législatives (articles 26, 27, 30, 32).

La Loi n°02-010/ du 05 mars 2002, portant Loi organique fixant le nombre, les conditions d’éligibilité, le régime des inéligibilités et des incompatibilités, les conditions de remplacement des membres de l’Assemblée Nationale en cas de vacance de siège, leurs indemnités et déterminant les conditions de la délégation de vote:

  • Revoir à la hausse le nombre actuel de 147 députés déterminés suivant le recensement administratif de 1996 qui a donné une population de 9.857.000 habitants. Prendre en compte les chiffres du dernier recensement de la population (article 1er) ;
  • Revoir les conditions de remplacement des députés et Introduire la perte du siège d’éludans les cas de changement de parti politique en cours de mandat (articles 9, 10, 11 et 12).

La Loi n°2016-048 du 17 octobre 2016 modifiée par la Loi n°2018-014 du 23 avril 2018, portant Loi électorale:

  • Introduire la création de l’Organe unique et indépendant de gestion des élections (OGE) (articles 3 à 28) ;
  • Relire les attributions de la Cour constitutionnelle (articles 165 et 169);
  • Créer les circonscriptions électorales des nouvelles régions pour leur permettre de prendre part aux élections de fin de transition (article 158);
  • Relire la composition des membres du bureau de vote en enlevant les mentions faites aux assesseurs de la majorité et de l’opposition(articles 80, 83 et 89) ;
  • Intégrer la publication en ligne des résultats des scrutins par centres et bureaux de vote, au fur et à mesure de la proclamation des résultats. Elle permet entre autres d’éviter les conflits et le tripatouillage des résultats pendant la remontée et la centralisation ;
  • Intégrer les débats entre les candidats aux premiers et deuxièmes tours de l’élection présidentielle, pour permettre aux électeurs de mieux connaître les contenus des projets de société des candidats.

La Loi n°05-047/ du 18 août 2005, portant Charte des Partis Politiques:

  • Supprimer la simple participation (15%) aux élections dans les critères de l’aide publique aux partis politiques pour les inciter à faire face à leurs objectifs de création à savoir la conquête et l’exercice du pouvoir (article 29);
  • Plafonner les dépenses et le dispositif de comptabilité des campagnes avec comme objectif d’instaurer la transparence, mais aussi d’améliorer l’équité entre les candidats lors des différents scrutins. Faire l’audit des dépenses de campagne. Appliquer cette disposition à toutes les élections.

Parallèlement au processus de réformes, une stratégie d’éducation civique devrait se faire tout au long de la phase transitoire. Les autorités de transition, les partis politiques et les organisations de la société civile doivent communiquer, informer et sensibiliser les citoyens sur les réformes à entreprendre et les étapes de la transition démocratique. Ces activités doivent se dérouler en français et dans les langues nationales pour une appropriation véritable de la gouvernance et de la démocratie par les citoyennes et les citoyens du Mali

#MaTransition

Fait à Bamako, le 31 mars 2021

 L’Observatoire pour les élections et la bonne gouvernance au Mali – OBSERVATOIRE, représenté par DrIbrahima Sangho, Président, Tél : +223 76 23 36 00, email:[email protected],

L’Association des jeunes pour la citoyenneté active (AJCAD), représentée par Madame Adam Dicko, Directrice Exécutive, Tél. : +223 20 28 16 56,email : [email protected],

DONIBLOG-la communauté des Bloggeurs du Mali, représentée parAbdoulaye Guindo, Président, Tél : +223 76 01 63 80, email : [email protected] / [email protected].

La Fondation Tuwindi, représentée par Tidiani Togola, Directeur Exécutif, email : [email protected] mobile : +22371919191.

Le CONSORTIUM ELE-Citoyenneté Droits Humains Inclusifs, représenté par Mamadou Lassine Diarra, Directeur Exécutif DHQ, Tél : +223 76 30 01 38, email : droitsdelhommeauquotidien@com,

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