Ecrivain public : Un talent rédactionnel au service du grand public 

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Ils faisaient  l’objet d’une grande convoitise et l’on se rappelle encore des longues  files de tous les jours autour de ces éminents scribes pour se faire écrire une lettre. Autrefois nombreux, ceux qui exercent ce métier se font peu à peu rares, car de nos jours, le métier d’écrivain public ne bénéficie plus de ses prestiges d’antan. Malgré tout, certains au milieu d’un vide s’en donnent toujours. Un tour devant la grande poste de Bamako.

Ce n’est pas en effet tout le monde qui pouvait exercer le métier d’écrivain public, mettre sur papier les propos des analphabètes relevait d’un art. Surtout, dans un pays comme le nôtre, où la transformation d’une moindre expression constitue un péché originel. Ces « artistes » qui mettaient  sur papier les idées des autres avaient un nom: écrivain public.

 Le métier requiert deux atouts principaux : être un excellent calligraphe et disposer d’une attention particulière aux propos du client pour ne pas en déformer le contenu. Et c’est l’habitude qui corrobore le reste. Il faut donc parvenir à être fidèle à tous ce que dirait le client. Sur le plan administratif, il faut avoir une autorisation fiscale délivrée par le Gouvernorat du district pour exercer le métier mais de ce côté, il faut une grande patience compte tenu du temps que cela nécessite. 

Selon Adama Guindo, un ancien administrateur et exerçant le métier depuis 10 ans, c’étaient les anciens administrateurs seuls qui exerçaient ce métier et on y gagnait bien sa vie. Mais actuellement à cause du chômage, de plus en plus de jeunes s’y mettent avant de trouver un boulot convenable et il ajoute : « Nous étions plus nombreux avant. Mais actuellement, nous ne sommes plus que trois vieux en plus des jeunes. Il ya une réelle collaboration entre jeunes et vieux. L’écart est certes considérable mais ils nous demandent des conseils chaque fois qu’ils ont un problème. Souvent des difficultés de compréhension, notamment avec la langue surviennent et nous faisons tout pour satisfaire la personne qui sollicite nos services. S’il ya un client qui souhaite plus de confidentialité, alors nous nous mettons à l’écart ».

 Un métier en voie de disparition !
Les anciens jouissent de la fidélité de leurs différents clients et quant aux jeunes, ils s’efforcent autant qu’ils peuvent à se créer de nouvelles clientèles. Cela ne va bien sûr sans des petites querelles mais les anciens sont toujours là pour veiller à la perpétuité d’une entente et d’une collaboration parfaite. Les rémunérations se discutent mais cela ne vaut pas vraiment grand-chose ; « certains clients vous donnent 100FCFA, 200FCFA ou plus. Mais considérant les conditions actuelles, on ne peut pas fixer un prix », précise Mr. Guindo

Les services proposés par l’écrivain public sont nombreux. Il s’agit au préalable de la transcription  d’une lettre. A cela s’ajoute entre autres les rédactions des plaintes, des demandes d’emploi… ainsi que les emballages de colis. Certains associent à  cela la vente de timbres fiscaux et d’enveloppes.

Par ailleurs, si les nouvelles techniques de l’information et de la communication(NTIC) font objet d’éloge de nos jours, il est important de signaler que cela ne fait pas l’affaire de tous. Certains moyens de communications sont dits dépassés. En effet, l’internet ayant facilité les échanges de messages, nombreuses personnes ont banni de leurs habitudes l’envoi des lettres par la poste. De plus, bon nombre de maliens savent à présent écrire ou peuvent avoir un instruit sous la main, alors ceux qui sollicitent le service de l’écrivain public constituent un nombre restreint. Le métier ne nourrit donc plus son homme et ils ne sont plus qu’une dizaine à chercher leur gagne pain devant la grande poste de Bamako. Parmi eux, Joseph, un congolais qui vit au Mali depuis plus de 10 ans. Il nous explique : «  Je n’ai fait qu’exercer ce métier depuis mon arrivée au Mali et c’est vrai que les choses ont beaucoup changé, la clientèle se fait rare. Mais on ne peut rien y faire car c’est le développement des sociétés qui l’exige. »
Saly KANE

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