EPILOGUE : Les épouses indésirables

Des femmes délaissées, en disgrâce totale auprès de leurs maris, cela ne se voit pas sous tous les cieux, quel que soit le régime matrimonial dominant. Plusieurs causes peuvent conduire à cette situation d’abandon : le caractère exécrable de l’épouse...

3 Sep 2006 - 16:59
3 Sep 2006 - 16:59
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Des femmes délaissées, en disgrâce totale auprès de leurs maris, cela ne se voit pas sous tous les cieux, quel que soit le régime matrimonial dominant. Plusieurs causes peuvent conduire à cette situation d’abandon : le caractère exécrable de l’épouse, son infécondité, l’infidélité, le vieillissement, l’arrivée d’une coépouse plus jeune, etc.

Et il ne s’agit pas des épouses mal aimées de tout temps - les fameuses « gwalo muso » de la littérature - dont la situation est bien connue ; sans être tout à fait délaissées et repoussées dans leur petit coin, celles-ci ne participent pas à la fête familiale comme il faut, mais peuvent bénéficier de temps à autre, comme à titre exceptionnel, des bontés du mari.

De façon générale, la femme boudée par son mari est plus présente dans les centres urbains que dans les villages, c’est dire que ce phénomène est plus visible dans les villes qu’à la campagne où il ne vient presque jamais gratuitement, comme par hasard.

En brousse, les paysans déploient de gros efforts matériels et financiers pour trouver femme et, l’ayant acquise dans ces conditions difficiles, elle est jalousement gardée et bien encadrée. Ceci explique que dans le monde rural, est considéré comme crime le fait de s’attaquer à la femme d’un paysan dans le but de la détourner de son mari.

Il y a aussi le fait bien souligné par les démographes que le milieu rural est moins riche en femmes à marier que les villes qui en regorgent si bien qu’il y a comme déséquilibre à ce niveau qui fait qu’une femme, même quelque peu âgée, n’est jamais laissée à elle seule au village.

De plus, les unions matrimoniales y sont plus sérieuses et plus solides que dans les villes où dans certains quartiers populaires, c’est l’union libre et le concubinage qui sont la règle générale. Le mariage en milieu rural obéit à des conditionnalités qui excluent toute idée d’abandon ou de délaissement de la femme sauf dans les cas de divorce et de mort.

Dans les villes où les mariages se font plus facilement et sont moins contraignants, les femmes délaissées sont plus légion qu’il n’y paraît. Beaucoup de grandes dames richement habillées et allant de cérémonie en cérémonie vivent secrètement ce cauchemar et, cela depuis des années, mais s’efforcent de le cacher comme la plaie entre les fesses.

Au bout d’un certain nombre d’années de mariage, si la femme ne fait pas d’enfant, elle court le risque d’être délaissée par son mari auquel tout le monde donnera raison parce que chez nous l’une des raisons principales du mariage est la procréation. La femme qui s’en montre incapable est soupçonnée de légèreté et est progressivement délaissée au profit d’une autre plus jeune et plus féconde.

Quant à la femme infidèle, elle est constamment menacée de délaissement, après quelques avertissements, lorsqu’elle a déjà fait des enfants, le mari trompé se résigne, non pas à la divorcer, mais à la laisser traîner dans la famille parce qu’étant la mère des enfants, il est difficile de la renvoyer brutalement. Dans beaucoup de milieux, dès que les épouses deviennent nombreuses et que certaines vieillissent et montrent des signes de lassitude et de saturation, le mari les néglige au profit de leurs coépouses nettement plus jeunes et plus fraîches.

Dans certains cas aussi la ménopause est cause d’abandon pour la raison pure et simple que la femme est fatiguée et que sa fonction de reproduction est arrêtée. L’on remarque que les femmes épousées au village acceptent beaucoup plus facilement ce passage difficile que leurs sœurs de la ville parce qu’en venant, on leur dit que cela aussi faisait partie des fatigues du mariage.

Dans les premières années qui virent l’application du PAS (Programme d’ajustement structurel), beaucoup de fonctionnaires qui prirent la retraite volontaire et qui par ce moyen devinrent subitement riches à millions pour quelques saisons, s’empressèrent d’épouser en secondes noces des filles qui les avaient rejetés lorsqu’ils étaient en activité.

Ces remariages eurent comme conséquence le délaissement brutal de la première épouse, pourtant mère des enfants de la famille. Nombre de militaires, candidats eux aussi à la retraite par anticipation, déménagèrent carrément chez des femmes nouvellement épousées dans l’opulence alors que la ou les premières pleuraient dans la solitude et moisissaient dans la gêne. Bien évidemment ces femmes, qui n’ont accepté ces épousailles que parce que la conjoncture était favorable, ont attendu sagement le moment de l’appauvrissement des nouveaux millionnaires pour foutre le camp comme elles étaient venues.

Facoh Donki Diarra

 

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