Kidal : Les Ifoghas à la croisée des chemins …

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Longtemps à la tête de Kidal et de l’Adrar, les Ifoghas apparaissent aujourd’hui divisés et affaiblis, notamment en raison du soutien persistant d’une partie d’entre eux au mouvement djihadiste Ansar Dine, allié d’Aqmi. Iyad Ag Ghaly, un temps porteur du message de la cause touareg, est finalement devenu le principal obstacle à l’unité de sa communauté. Alors que la fin de son règne approche, les appétits s’aiguisent pour sa succession. C’est l’heure pour les Ifoghas de s’interroger collectivement sur la place qu’ils souhaitent occuper dans la Kidal nouvelle.

Les Ifoghas dominent les Touaregs au Nord-Mali depuis la période coloniale, marquée par l’affaiblissement des Ioullimidens. Cependant, les crises successives qui secouent le Nord depuis 2012 ont ouvert la voie à un repositionnement de tous les acteurs. L’arrivée de groupes djihadistes étrangers, à l’idéologie radicale, a créé ou accentué les clivages. La majorité des Ifoghas adhère au processus de paix. Elle a compris que la participation aux structures de l’état et l’appui au développement étaient les seules voies possibles pour continuer à peser.

A l’inverse, une minorité Ifoghas s’obstine à suivre Iyad Ag ghaly et refuse de voir que la partie est jouée. Le leader d’Ansar Dine les mène dans une impasse. Apparemment sénile, il continue d’alimenter une lutte stérile. Ses objectifs djihadistes l’ont éloigné de la défense des intérêts des siens. A l’opposé de la logique de réconciliation qui prévaut, Iyad Ag Ghaly continue les règlements de comptes et les enlèvements au sein même des Ifoghas. En décembre dernier à Talhandak, près de trente morts Ifoghas témoignaient de cette folie destructrice.

Si la capacité de nuisance de Iyad Ag Ghaly reste réelle, il est évident qu’elle ne fera que décroître. L’homme est récemment apparu vieilli, faible et fatigué. Pour les Ifoghas, le danger viendrait plutôt de ceux, dans l’entourage du chef d’Ansar Dine, qui pensent pouvoir le remplacer et continuer à exister par les armes. Cheikh Ag Aoussa, chef militaire du HCUA, certainement tout comme quelques uns des proches lieutenants du vieil émir sont à l’affût. Leur entêtement et leurs rivalités pourraient gravement porter préjudice aux Ifoghas, et aux Touareg en général.

Sans une ferme volonté d’aller à la paix, les Ifoghas perdront la place politique (au sens noble) et morale qu’ils occupaient avant la crise. D’ores et déjà, d’autres acteurs émergent, prêts à apprendre des erreurs commises sous leurs yeux. L’Amenokal Mohamed Ag Intallah, chef moral et  représentant de toute la confédération, également député de Tin Essako, saura-t-il rassembler les différentes fractions Ifoghas ? A cet effet, la collaboration entre le MNLA et la frange non compromise du HCUA apparaît tout aussi indispensable que la rupture nette avec Aqmi et la dissolution d’Ansar Dine.

 

Paul-Louis Koné

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