Retrait de la CEDEAO : « Le peuple de l’AES n’a peur d’aucune menace, parce qu’il a déjà vécu toutes les violences possibles » (Lucien Zié du mouvement Le Faso, Ma Patrie)

Oui, ce qui nous a le plus marqué, c’est la vision même du président, qui s’est traduite par plusieurs initiatives, dont l’offensive agropastorale, les reformes au niveau minier pour en faire un domaine pourvoyeur d’emplois et pour que les bénéfices profitent vraiment à la nation. Il y a aussi les travaux relatifs aux services sociaux de base, comme les aménagements des voies, l’équipement des centres de santé et la baisse du coût de certaines prestations médicales, etc. Avec toute cette vision, nous nous sommes dit qu’il fallait passer à une autre étape, en faisant en sorte que nous qui sommes les soutiens de la Transition, puissions inscrire des actions pour accompagner le président du Faso à réussir cette mission. Sinon, effectivement, avant, la coordination était simplement appelée la Coordination des organisations de la société civile du Burkina Faso, mais avec cette vision que le président a dévoilée (le président a rencontré les Forces vives de la nation, le 11 juillet, pour présenter la feuille de route de son mandat : ndlr), nous nous sommes dit qu’il était nécessaire de changer de format, au lieu de rester uniquement dans la lutte avant-gardiste et la lutte contre l’impérialisme. On peut faire tout cela, tout en participant aux actions de développement de notre pays. Et c’est ce qui a d’ailleurs fait que beaucoup de “Wayiyans”, comme on nous appelle, ont aujourd’hui des champs collectifs et certains ont à ce jour récolté ; ce qu’il faut vraiment saluer. Il y a eu donc plusieurs initiatives de notre part, suite au dévoilement de la vision du président du Faso. Aussi, quand l’impérialisme avait multiplié ses attaques, à travers notamment la CEDEAO par ses menaces, nous avons été poussés à encore faire le maillage du territoire en termes de structures de veille. Cet aspect nous a beaucoup marqués ; ces attaques multiples et répétitives de l’impérialisme. La mobilisation générale et le maintien du peuple en veille seront maintenus et poursuivis. Quelle sera l’action prioritaire (ou les actions prioritaires) en 2025 ? 2025 est également une année de défis, car la lutte contre le terrorisme n’a que trop duré. Donc, il faut en finir, pour que les populations puissent retrouver la quiétude, la paix et que toutes les personnes déplacées internes puissent retourner chez elles, vivre dans la tranquillité et participer à la construction de notre pays. L’année 2025 sera donc, pour nous, l’opportunité véritable de pouvoir finir avec la guerre et construire la nation, avoir un Burkina de paix. Il s’agira de nous mobiliser davantage, surtout dans le contexte de velléités de la CEDEAO, qui donne un délai de six mois aux pays de l’AES pour revoir leur position. Ce délai est un grand défi qui nécessite que nous nous mobilisions, parce que derrière cela, il y a un complot ; celui de déstabiliser l’un des pays, voire la Confédération AES. Et comme nous n’avons jamais infléchi, nous n’allons jamais infléchir, nous allons continuer à nous mobiliser. La mobilisation sera donc inscrite comme l’une des actions phares à continuellement dérouler. Il y a également les activités de production agricole, au regard des résultats qu’on a eus (nous enregistrons une hausse de plus de 18% de production par rapport à l’an passé). Nous allons nous investir plus dans ce volet également. Il y a aussi les champs d’expérimentation qui ont permis de convaincre les Burkinabè qu’il y a des cultures qui peuvent réussir au Burkina Faso ; le cas de l’ananas (le président a même visité un champ dans le camp Naaba-Koom). Tout cela va nous permettre de diversifier nos cultures et nous, soutiens de la Transition, aurons d’autres champs, tout en continuant à soutenir de façon inlassable les FDS et VDP, en contribuant au Fonds de soutien patriotique qui a permis de renforcer les équipements et de prendre en charge les VDP. Toutes ces mobilisations ont permis d’avoir des résultats, de restaurer une très grande partie du territoire national et nous allons continuer dans ces actions. Vous avez ouvert la parenthèse sur la CEDEAO, dont le délai réglementaire pour le retrait cours en fin janvier. Ne faut-il pas s’inquiéter de cette question de retrait de la CEDEAO, en termes d’implications pour le Burkina, les pays de l’AES en général ? Quand nous avons pu cerner la vocation et l’ambition malveillante de cette organisation manipulée par l’impérialisme français, nos autorités ont pris l’engagement et ont appelé le peuple burkinabè à une vigilance accrue. Et dans une période révolutionnaire comme la nôtre, je pense que les autorités ont activé tous les leviers et même les institutions pour qu’elles soient en alerte maximale. Le cas CEDEAO ne nous inquiète donc pas, parce que nous avons eu une capacité d’anticipation ; c’était l’effet de surprise qui allait venir dans l’échéance des six mois que le CEDEAO a donnée comme une période pendant laquelle, nous aurions à échanger pour voir un possible retour des États de l’AES. Chose qui n’est pas possible, parce que l’AES est sur une trajectoire de libération, de souveraineté. Ce n’est même pas imaginable que l’AES accepte de perdre sa souveraineté, cette sécurité qu’elle est en train de reconquérir à travers le retrait et la liberté qu’elle a, en étant hors de la CEDEAO. Je crois que le communiqué du collège des chefs d’État de l’AES a été fait dans des dispositions bien en place, pour faire face à toute menace. Deuxième élément qu’il faut voir dans ce communiqué, c’est qu’ils (chefs d’État, ndlr) décident de faire de l’espace AES, un unique champ d’opérations qui vient s’ajouter aux autres champs d’opérations qui existent. Cela implique qu’il n’y a plus de frontières entre les États de l’AES, de sorte que nous puissions maîtriser toutes les menaces terroristes et agir en renfort si un des pays est attaqué. Donc, l’inquiétude doit être pour la CEDEAO, parce que les peuples sont dynamiques et engagés. Nous sommes stoïques sur notre position ; si la CEDEAO veut se ressaisir, qu’elle se ressaisisse. Des dispositions sont en train d’être prises au sommet de l’AES pour faire face à d’éventuelles menaces de déstabilisation, mais la réalité au niveau des populations, ce sont les difficultés de mobilité des citoyens entre les trois pays, du fait des tracasseries. De nombreux soutiens de l’AES déplorent et craignent cette situation (tracasseries) qui n’est pas de nature à faire une “AES des peuples” !
De prime abord, il faut interpeller les autorités des trois pays à revoir, parce que les donnes ont changé. Ce qui avait cours lorsque nous étions dans la CEDEAO ne doit plus exister (les cas de tracasseries, de corruptions sur les routes). Ces pratiques ne sont pas bonnes, elles ne reflètent pas la vision que les plus hautes autorités des trois pays incarnent. Mais comme ce sont des pratiques qui sont entretenues par une minorité, ce ne sont pas toutes les forces sur les routes qui le font, et dès lors, les autorités peuvent trouver des moyens de répression et de dissuasion pour pouvoir éradiquer ces cas de fraude et de corruption dans les frontières. Il faut également sensibiliser les acteurs aux questions de fraude au niveau des marchandises, il faut arriver à contenir rapidement ce phénomène également, pour éviter que des commerçants véreux n’arrivent à transporter leurs marchandises dans les pays sans payer les taxes. Cela a un impact négatif sur nos économies. C’est vraiment un message d’interpellation à l’autorité que je lance. Mais, et pour revenir à la question de tracasseries, parlant de la libre circulation des personnes et des biens, même avec la CEDEAO, cette équation n’avait pas été résolue. Les citoyens n’ont pas cette facilité d’accéder aux pays membres. Donc, on n’a réellement pas à trop s’inquiéter sur ce plan, d’autant qu’on n’avait même pas cette possibilité de libre circulation des personnes et des biens dans la CEDEAO. Maintenant que nous sommes sortis de la CEDEAO, il faut s’assumer. Et aussi, il faut retenir que l’AES a eu la sagesse, la grande responsabilité, pour dire que les ressortissants de la CEDEAO viennent dans leur espace librement, en respectant simplement les textes. Maintenant, si la CEDEAO refuse la réciprocité, cela voudrait dire qu’est, elle-même, contre ses propres citoyens. Ce qu’ils oublient, c’est que l’AES est le centre névralgique de la CEDEAO ; lorsque les États (AES) s’unissent, avec plus de 70 millions d’habitants, et une grande capacité de consommation et d’échanges commerciaux au niveau international (nos échanges commerciaux au niveau de la CEDEAO ne sont pas importants), la CEDEAO va à un moment donné se fragiliser, parce que toute décision qu’elle prend va jouer sur un de ses membres (on a vu le cas avec le Bénin, lorsque la CEDEAO a voulu sanctionner le Niger). Le peuple de l’AES n’a peur d’aucune menace, parce qu’il a déjà vécu toutes les violences possibles, les barbaries les plus inhumaines de l’histoire. Face à une telle réalité, vous menez un combat de survie, et dans le combat de survie, ce ne sont pas des menaces aux allures de chatouillements qui vont faire peur. Nous sommes stoïques, la trajectoire est intacte et nous allons continuer sereinement à soutenir nos trois leaders pour la vision qu’ils ont. Le président du Faso vient d’ouvrir un autre volet important de la vie de la nation, qui était une demande longtemps exprimée par une partie des Burkinabè et pour plusieurs raisons ; il s’agit de la réconciliation nationale, avec l’adoption de la loi portant amnistie et conditions d’octroi de grâce amnistiante pour les auteurs du coup d’État de septembre 2015 et l’annonce du Premier ministre de faire de cette question, une des priorités de sa gouvernance. Comment votre mouvement accueille-t-il une telle mesure ?
Il faut noter que la question de l’amnistie est de la prérogative du président du Faso, conférée par les textes du pays. Cela fait une décennie maintenant qu’ils ont pu répondre du forfait, ils ont reconnu leur faute devant le peuple, et le président étant là pour le peuple, s’il estime qu’il y a des actions qui peuvent aider les forces combattantes et le peuple dans la lutte contre le terrorisme, à recouvrer l’intégrité du territoire national, je crois qu’il est de bon ton pour lui de procéder ainsi. Si quelqu’un a eu toutes les formations nécessaires, qu’à un moment il a dévoyé et qu’on lui a appliqué la sanction, s’il y a des dispositions légales qui permettent de le gracier pour qu’il puisse revenir dans la maison commune, je pense que ce n’est pas mauvais ; parce que l’objectif de la sanction, ce n’est pas d’anéantir la personne, mais de lui faire apprendre la leçon, de sorte qu’elle puisse réintégrer la raison. Vous voyez que dans cet esprit, le président du Faso a insufflé des reformes qui permettent aujourd’hui d’avoir dans l’arsenal des sanctions, pour certaines infractions, le travail d’intérêt général au lieu de la peine privative de liberté. Cela permet non seulement de sanctionner, mais également au fautif de pouvoir continuer à travailler ou apprendre un métier et changer de mentalité au profit de la société. Je crois vraiment que c’est une très bonne décision de la part du président du Faso. Un message vous reste-t-il, pour conclure ? J’ai d’abord un message à l’endroit des organisations de la société civile, tous les mouvements et cellules de veille citoyenne, qui est de les encourager à continuer la mobilisation. Je les invite donc à saisir l’opportunité du nouvel an pour se questionner, se poser les bonnes questions et regarder au niveau mondial, les grandes crises ou les crises qui sont souvent transportées sur certains territoires, chercher à comprendre par-là la manifestation de l’impérialisme, comme elle se manifeste à travers la CEDEAO. En ce nouvel an, je les exhorte, une fois de plus, à s’engager davantage à tous les niveaux de la lutte. Je lance ensuite un appel à l’ensemble du peuple burkinabè à se mobiliser à la base, à sensibiliser, afin que nous puissions endiguer toutes les velléités qui viendraient à se présenter et afin de permettre à nos autorités de pouvoir sereinement parvenir à la souveraineté totale et entière de notre pays. Enfin, en ce nouvel an, à l’endroit des peuple et populations burkinabè, je formule le vœu de paix pour tous. Reconquête du territoire, sécurité, stabilité pour tout l’espace AES. Nous voulons vraiment la paix pour le Burkina Faso, la paix pour le Mali, la paix pour le Niger et une union sacrée pour l’espace AES. J’émets également les vœux de santé, d’engagement et de prospérité pour notre pays, pour que les actions fortes qui s’inscrivent dans l’économie de guerre à travers l’APEC (Agence pour la promotion de l’entrepreneuriat communautaire), dans laquelle le président encourage, puissent porter fruits. Que le peuple burkinabè puisse se mobiliser davantage pour la mise en place d’usines pour transformer nos produits et ainsi permettre de développer notre tissu industriel national. Longévité à tout le monde et plein courage à nos autorités ! Que Dieu bénisse le Burkina Faso ! Interview réalisée par O.L.
Lefaso.net
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