Depuis plusieurs mois, la communauté internationale est au chevet du Mali pour trouver une issue favorable à la situation qui prévaut au nord. Le déploiement d’une force internationale pour reconquérir les régions du Nord sous occupation Mali était plus qu'imminent, il y a quelques semaines. Mais depuis quelques jours, nous constatons que la communauté internationale notamment la France et les Usa écartent l’option militaire en faveur du dialogue. Pourquoi ceux qui étaient décidés à user de la force pour aider le Mali à recouvrer son intégrité territoriale se rétractent soudain ?

Le Mali se trouve, depuis plus d’un semestre dans une situation, qui dépasse largement tout entendement. La communauté internationale s’est fortement mobilisée pour tenter de trouver une solution à la crise malienne. Plus d’une dizaine de rencontres de haut niveau se sont tenues de Mars à Novembre 2012 (sommets et réunions extraordinaires de la Cédéao, de l’Union africaine, de l’Union européenne et même des Nations unies). Dernièrement, l’option militaire a été préconisée pour en finir avec ce problème d’envergure internationale, au grand soulagement des Maliens. Les nations unies avaient demandé à la Cédéao de préparer un plan militaire et il était prévu que les hostilités contre les djihadistes et autres commenceraient en mars 2013. Visiblement cette option risque de tomber dans les oubliettes. Car à entendre les différentes récentes déclarations du premier ministre Cheick Modibo Diarra, de la France, des Etats-Unis, de la Cédéao, de Romano Prodi et des pays du Champs, l’option militaire a été bel et bien écartée pour l’instant. La décision commune de primer le dialogue semble mûrement réfléchi. Et on se demande quelles en sont réellement les raisons.
Parce qu'il n’y a pas de pouvoir légitime à Bamako ?
La guerre est coûteuse, ce n’est pas la communauté ouest-africaine encore moins le Mali qui financera. Ceux qui injecteront des fonds pour mener les opérations militaires, les occidentaux, ont été précis lorsqu’ils disent qu'il n’est pas raisonnable, même en situation d’urgence, de débourser des sommes colossales pour un pays qui est dirigé pas un pouvoir qui n’est pas démocratiquement élu. En effet, l’Europe a réitéré sa position, le 19 novembre dernier à Bruxelles, lors de la 3199ème session du Conseil des ministres des affaires étrangères sur le Mali. Lorsqu’elle renouvelle : « son appel aux autorités maliennes pour qu'elles présentent dans les plus brefs délais une feuille de route crédible et consensuelle pour le rétablissement de l'ordre constitutionnel et démocratique, y compris le contrôle civil des forces armées. Dans ce contexte, l'UE rappelle la nécessité d’organiser, dès que possible, des élections libres et transparentes ». Quant aux Etats-Unis, ils rappellent, à chaque occasion, que l’organisation d’élections au Mali doit passer en premier et qu'avec un pouvoir légitime les méthodes seront plus faciles. Sur un autre plan, les atermoiements observés du côté de certaines composantes des autorités de transition, qui sont d’ailleurs profondément divisées et qui n’ont aucun contrôle sur les forces de sécurité et de défense, exigent à ce que le Mali retourne formellement à l’ordre constitutionnel. Et c’est certainement une des raisons pour lesquelles la guerre n’est plus d’actualité.
Parce que la guerre n’est vraiment pas préparée ?
Les Etats-Unis juge inefficace le plan militaire proposé par la Cédéao. Pour Washington, les effectifs prévus par la Cédéao sont insuffisants face aux groupes islamistes armés. L’organisation ouest-africaine compte déployer 3.300 hommes dans la région. Andrew Mc Gregor, spécialiste du Mali à la Fondation Jamestown de Washington, selon RFI, émet des doutes sur l’armée nigériane, qui a pourtant très bonne réputation, étant considérée comme la plus solide au sein de la Cédéao. Il estime aussi, que la mission des soldats de l’organisation ouest-africaine est périlleuse car ils connaissent mal le désert. Le général Carter Ham, commandant des forces Africom, quant à lui, affirme que : « les militaires maliens ne sont pas à la hauteur. Mais l’idée de demander à cette armée malienne, un ensemble très hétérogène d’un point de vue ethnique, d’être en première ligne au nord du Mali, c’est aller droit dans le mur », rapporte RFI. Ces propos sous entendent que la communauté internationale ne prendra pas le risque de s’engager dans une guerre qui concerne un pays qui n’a pas d’armée. Et Romano Prodi a expliqué, de la manière la plus diplomatique, qu'il ne faut plus compter sur une intervention militaire pour recouvrer les deux tiers du territoire malien. Lorsqu’il avance que : « il ne faut pas compter sur une opération militaire dans le Nord-Mali avant septembre 2013 ». Sur le plan financier, rien n’est prêt. Effectivement le devis de 500 millions de dollars, soit plus de 257 milliards de francs Cfa, pour une opération militaire de six mois a été jugé trop élevé par les occidentaux. Ces derniers estiment qu'ils ont eu à financer des guerres « plus grandes » à des coûts plus maigres.
Maintenant que la guerre de reconquête du Nord-Mali n’aura pas lieu et que c’est au Mali de résoudre la crise qui est la sienne, on avancera simplement que l’espoir n’est pas encore perdu et les négociations vont bon train. D’ailleurs les concertations nationales à venir mettront immédiatement en place une commission nationale de dialogue. Et maintenant que nos frères égarés du Mnla et d’Ansar Dine ont fait des concessions significatives pour persuader de leur disponibilité à dialoguer, les Maliens ne doivent en aucun cas bloquer les voies du dialogue. Ces voies du dialogue qui pourraient être les seules alternatives.
Rokia Diabaté