Longtemps dans le collimateur de la justice, à propos de la spéculation tant décriée à Bamako, le maire du District, Adama Sangaré, a été finalement interpellé par la Brigade d’investigations judiciaires (BIJ) de la gendarmerie du Camp I. Cela fait suite à la plainte d’un particulier, concernant une affaire qui s’est déroulée à Kalabancoro et pour laquelle le maire de cette localité et d’autres complices ont été appréhendés le vendredi dernier. En dehors de cette plainte, le maire du district risque d’être rattrapé par d’autres accusations concernant ce dossier du foncier devenu une bombe à retardement à Bamako.
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Adama Sangaré, maire du District de Bamako[/caption]
Le voile d’impunité qui couvrait le maire du district de Bamako, a-t-il commencé à être lever ? Tout porte à le croire car le tout-puissant Adama Sangaré a été interpellé par la Brigade d’investigations judiciaires (Bij) de la gendarmerie du Camp I, depuis le vendredi dernier, pour une des nombreuses affaires de spéculation foncière à Bamako. Appréhendé suite à une plainte d’un particulier, le maire du district de Bamako, Adama Sangaré, est toujours retenu dans les locaux de la Brigade d’investigations judiciaires (Bij) de la gendarmerie du Camp I de Bamako, en attendant sa comparution devant le procureur, en principe aujourd’hui. L’interpellation du maire du district de Bamako a été confirmée par une source judiciaire qui s’est toutefois abstenue de nous fournir des détails, au risque de divulguer le contenu de ce dossier frappé du sceau de l’instruction.
De toute façon, Adama Sangaré avait déjà été interpellé une première fois par la justice, au cours de l’année 2010, en ce qui concerne toujours la spéculation foncière à Bamako, par le juge d’instruction du Tribunal de la commune IV, Abdramane Diarra, suite à de nombreuses plaintes déposées contre lui. En effet, le juge d’instruction de la commune IV, après investigations, avait cru bon d’interpeller le maire central et de le mettre sous mandat de dépôt. Mais l’impunité aidant, Adama Sangaré avait été libéré sur instruction de Koulouba.
Mais aujourd’hui, le maire Adama Sangaré est mis en situation de répondre de ses responsabilités devant la Justice car il nous revient d’une autre source judiciaire, que le maire de Bamako a été cité dans plusieurs affaires de morcellements illégaux de terrains, notamment dans de nombreux quartiers de la ville et surtout à l’ACI 2000 et l’Aci Sotuba, où pratiquement les espaces publics laissés par l’Aci, pour recevoir des aménagements publics comme les infrastructures sanitaires, jardins publics, lieux de culte et même des écoles, ont été bradés.
C’est le lieu de rappeler aussi que le maire de la commune IV a gagné une quinzaine de procès contre la mairie du district de Bamako, remettant ainsi dans leurs droits des citoyens expropriés avec la bénédiction de la Mairie centrale que dirige Adama Sangaré. Il nous revient aussi que deux autres plaintes introduites par le Maire Moussa Mara, concernant le même motif, sont en cours de traitement par le Tribunal.
A notre passage à la Bij de la gendarmerie, le samedi dernier dans l’après-midi, nous avons pu apercevoir Adama Sangaré qui était sorti un moment des locaux des enquêteurs pour saluer des camarades politiques de son parti, l’Adema, venus prendre de ses nouvelles. Pendant ce temps, l’affaire étant jugée assez sérieuse, ses avocats s’activaient à obtenir coûte que coûte sa libération. C’est en principe ce matin qu’il faudra savoir si le Maire sera placé sous mandat de dépôt ou si ses avocats parviendront à lui empêcher un séjour à la citadelle du silence de Bamako Coura.
Rappelons que tout comme Adama Sangaré, le maire de Kalabancoro, Issa Bocar Ballo, a été également interpellé en même temps que plusieurs autres personnalités soupçonnées de complicité de spéculation foncière. Espérons tout simplement que cette interpellation ne se transforme pas en eau de boudin, comme ce fut le cas la première fois, en 2010, car la spéculation foncière est une bombe sociale qu’il faut dégoupiller avant son explosion.
D’ailleurs, en dehors des poursuites judiciaires, un grand remue-ménage est noté depuis un certain temps au niveau de plusieurs associations d’habitants de quartiers de Bamako qui fustigent la gestion foncière du Maire Adama Sangaré. C’est le cas des propriétaires de parcelles de Sotuba Aci qui ont fait plusieurs sorties pour dénoncer la vente illicite et anarchique de terrains de l’espace public. Lors de l’une de leurs assemblées générales, ils ont distribué aux journalistes présents des lettres d’attribution écrites à la main, mais portant la signature et le cachet du maire du district, Adama Sangaré. Depuis lors, malgré ces graves accusations, le Maire ne s’est jamais plaint d’une imitation de sa signature ou de son cachet, pour faire croire à du faux et usage de faux de la part de tierces personnes et tenter ainsi de se disculper. Pourtant, les attributaires, qui prétendent avoir payé ces espaces à prix d’or, continuent d’y aménager sans être inquiétés par les services techniques communaux. Il était donc temps que la justice, qui sait laver plus blanc que tout le monde, s’intéresse à ce dossier du foncier qui est en train de gangrener l’atmosphère sociale à Bamako.
L’Association des résidents de l’Aci 2000 (Ar-Aci 2 000) a eu à adresser une lettre au ministre de l’Administration territoriale, de la décentralisation et de l’aménagement du territoire, le 18 février 2013, pour lui demander de suspendre le maire du district de Bamako, pour protester contre la décision N°00081 signée par Adama Sangaré et portant sur le morcellement d’un terrain qui est pourtant réservé comme un espace vert, au vu du plan directeur de la zone et comportant deux lots, notamment le N°1306 et 1307. Pourtant, de nouveaux propriétaires s’étaient déjà présentés et entendaient y démarrer leur construction. En réaction à cette situation d’occupation illicite des lieux, les membres de l’association se sont réunis le samedi 2 Février 2013 afin de convenir d’une position commune de gestion de ce problème.
Récemment, nous annoncions dans les colonnes de ce journal que le gouvernement de transition entendait agir pour mettre fin à la spéculation foncière, suite à la lettre du ministre en charge du domaine de l’Etat et des affaires foncières, qui demandait aux gouverneurs d’être plus rigoureux sur la question foncière. Nous osons espérer qu’avec cette interpellation, le procureur général près la Cour d’appel de Bamako montre un signe de détermination à livrer une guerre sans merci contre les pyromanes fonciers et leurs complices. Dés lors, un sale temps s’annonce pour les spéculateurs fonciers appelés à changer d’activités s’ils ne veulent pas avoir de démêlées avec la Justice.
Nouhoum DICKO