Lutte contre la corruption / déclaration des biens : Complaisance envers certains ministres ?
Les autorités de la transition affirment mener une lutte implacable contre la corruption, un silence pesant entoure toujours une exigence de transparence fondamentale : la déclaration publique des biens des responsables de l’Etat.

Plus d’une année après la formation du gouvernement dirigé par le Général Abdoulaye Maiga, plusieurs ministres n’ont toujours pas rendu publics leurs patrimoines, contrairement aux promesses de rupture martelées au début de la transition.
La législation malienne prévoit pourtant, depuis la loi N°2014-015 du 27 mai 2014 relative à la prévention et à la répression de l’enrichissement illicite, l’obligation pour certaines catégories de responsables y compris les ministres de déclarer leurs biens à la Cour Suprême, dès leur prise de fonction et à la fin de leur mandat. Cette déclaration n’est pas nécessairement publique, mais elle est bel et bien exigée par la loi.
En théorie, le défaut de déclaration dans les délais constitue une infraction. En pratique, les sanctions sont rares, voire inexistantes, et les mécanismes de contrôle demeurent faibles. Le décret d’application de cette loi, longtemps attendu, tarde à produire ses effets de manière concrète. Quant à la publication volontaire de la déclaration de patrimoine geste symbolique fort en faveur de la transparence elle reste l’exception.
Des autorités qui peinent à montrer l'exemple
Selon nos informations de nombreux membres du gouvernement actuel n’ont toujours pas satisfait à cette exigence légale, du moins pas de manière visible ou vérifiable. Une opacité qui interroge, d’autant plus que la transition s’était engagée à moraliser la gestion publique.
« Comment prétendre instaurer une gouvernance vertueuse si ceux qui sont censés incarner le changement refusent de se plier à une règle aussi élémentaire ? », s’indigne Hamidou Gassama, juriste. « La déclaration des biens n’est pas un luxe, c’est un acte de redevabilité », poursuit-il.
Jusqu’ici, le chef du gouvernement, ne semble pas faire de cette question une priorité politique. Aucune déclaration officielle n’a été faite sur le sujet, et aucun calendrier n’a été fixé pour rappeler à l’ordre les ministres défaillants. Ce silence interpelle : faut-il y voir une complaisance envers certains membres de l’équipe gouvernementale ? Ou un malaise plus profond au sein du pouvoir quant à la transparence du patrimoine personnel ?
Le paradoxe est flagrant : pendant que des campagnes de moralisation ciblent des fonctionnaires et autres agents du public, les plus hauts responsables échappent à l’obligation de redevabilité financière. Une dissonance qui alimente le scepticisme de la population face à la sincérité de la lutte anticorruption.
« Déclarer ses biens, c’est accepter d’être jugé à l’aune de ses revenus déclarés. Ceux qui refusent de le faire ont sans doute des choses à cacher », commente M. Gassama.
Face à ces manquements et pour être cohérent, il revient aux autorités en charge d’exiger la publication systématique des déclarations de patrimoine des dirigeants, à commencer par les membres du gouvernement et les présidents des organes de transition.
Il faut tout simplement dire que la transparence ne peut pas être à géométrie variable.
Billal Diall
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