Entrenous : Discours à la nation du Président ATT Les zones d’ombres d’un plat réchauffé
Cette année, le traditionnel discours à la nation du Président de la République, Amadou Toumani Touré à l’occasion du 22 septembre avait une dimension symbolique.
En effet, s’il est de coutume que le 22 septembre, date de l’accession de notre pays à la souveraineté nationale et internationale, le chef de l’Etat s’adresse à ses compatriotes, ce 22 septembre 2011 était le dernier d’ATT en tant que du président de la République. D’où sa charge symbolique. Mais le contenu de l’adresse à la nation du président n’avait, fondamentalement, rien de vraiment nouveau. Gratuité des soins du Vhi/Sida, du paludisme, de la césarienne, Assurance maladie obligatoire (Amo), Programme spécial pour le développement, sécurité et la paix, nouveau découpage administratif, nouvelle carte judiciaire, école avec un accent particulier sur l’enseignement supérieur, emploi des jeunes, révision constitutionnelle, élections générales de 2012, voilà, entre autres, les sujets qui se sont invités sur le plateau lors de ce discours. Que faut-il retenir de cet exercice présidentiel qui aura duré environ 20 minutes ? Pas grande chose ! Rien que des confirmations. Aux yeux de nombreux observateurs, l’intervention du chef de l’Etat a toute l’allure d’un plat réchauffé avec des zones d’ombres. Pas un seul mot sur le front social avec les grèves en vue, ni sur l’insécurité qui trouble la quiétude des paisibles !
Mais tous ceux qui se doutaient de la volonté du président de la République à mener à terme la révision de la Constitution en ont eu pour leur compte. ATT persiste et signe. Car le commando parachutiste, de surcroît général, ne compte pas reculer. En bon militaire, il sait que l’intelligence et la ruse sont souvent plus efficaces que la force. Au moment où les pro et les anti-révision constitutionnelle s’affrontent à travers des meetings et autres manifestations, ATT tranche. ‘’Le peuple souverain’’ sera appelé à se prononcer sur la révision constitutionnelle.
Si le locataire de Koulouba s’est montré très bavard sur cette révision, il n’apporte aucune précision sur une éventuelle date de la tenue des opérations référendaires. C’est là où la stratégie gouvernementale, voire présidentielle pèche beaucoup. Car là-dessus, les spéculations les plus folles circulent sur une possibilité de coupler les élections aux opérations de référendum. Quelle stratégie retiendra-t-on ? Le premier tour de l’élection présidentielle avec le référendum ? Le référendum avec le premier tour des législatives ? Le premier tour des élections présidentielle et législative avec le référendum ? L’Assemblée nationale sera-t-elle dissoute après la session d’octobre ou session budgétaire ? Difficile d’y répondre. Une chose est sûre : le fait que le président ATT n’a consacré qu’un seul paragraphe aux élections générales dans son discours est suffisamment révélateur. Le président reste muet comme une carpe sur l’état d’avancement des préparatifs, les dispositions prises par l’administration, la question du fichier électorale, les dates du scrutin.
Mais il ne faut pas certainement pas se méprendre sur la finesse d’esprit de l’homme. Le soldat de la démocratie, héros du 26 mars, sait que 2012 est une année charnière, une période extrêmement sensible pour notre pays.
Compte tenu des retards accusés dans la préparation des élections (notre pays ne dispose pas encore d’un fichier électoral fiable, consensuel, base des élections crédibles et transparentes), à défaut d’abandonner la révision constitutionnelle, le chef de l’Etat devrait avoir le courage de ne pas mettre en application ce que certains appellent son ‘’plan diabolique’’ qui consisterait à coupler les élections présidentielles et législatives. De l’avis de nombreux observateurs, le couplage des élections est inopportun. Une telle initiative, au-delà du risque de faire ‘’dérailler’’ le processus démocratique, pourrait se révéler grave de conséquences pour l’équilibre de la nation. En d’autres termes, cela pourrait conduire notre pays vers une instabilité qui débouche sur toute sorte de dérives, pour ne pas dire une remise en cause de la démocratie. Comme ce fut le cas pour les réformes, le président ATT et son gouvernement doivent éviter de faire du couplage des élections, une question d’orgueil.
Dans le contexte sociopolitique actuel, marqué par un sentiment de mécontentement généralisé, il y a de décisions, voire des risques inutiles, que l’on doit éviter de prendre. Si l’on aime son pays. Et si l’on ne veut pas manquer un autre rendez-vous avec l’histoire.
Par Chiaka Doumbia
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