Sourakata Bangoura, chargé de sécurité alimentaire à la Fao / ‘’Si nous n’aidons pas le Mali, ça va être la deuxième catastrophe de l’Afrique subsaharienne’’

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Sourakata Bangoura, chargé de sécurité alimentaire à la Fao

L’Atelier régional de suivi des projets de l’Iesa et Aprao s’est déroulé du 12 au 16 décembre 2011 à l’Hôtel Kempeski. Au cours de l’atelier, nous avons interrogé Sourakata Bangoura, Chargé de sécurité alimentaire au service d’appui intégré à la sécurité alimentaire du siège de la Fao et Point focal des projets fiancés par la Coopération espagnole. Il a notamment tiré la sonnette d’alarme sur la situation qui prévaut au Mali, à cause de l’arrêt prématuré des pluies.

Le Républicain : Quel est l’objet de cet atelier régional ?

C’est un atelier régional conjoint de deux projets.  Le premier est le projet dénommé Initiative eau sécurité alimentaire en Afrique de l’Ouest (Iesa),  financé  par le royaume d’Espagne à travers son  Agence de coopération internationale. Le second, l’Aprao,  est un projet Appui au développement de la riziculture en Afrique de l’Ouest, en  réponse à la flambée du prix des produits  agricoles. L’atelier a pour objectif la présentation des résultats obtenus par les différents projets, les échanges d’expériences entre les pays bénéficiaires de ces projets et les expériences de bonnes pratiques qu’on a pu avoir dans les différents pays. Il a aussi pour but de faire une programmation conjointe des activités des différents  projets pour 2012.

Sourakata Bangoura : Quels sont les résultats atteints à mi-parcours ?

Les résultats à mi-parcours sont très encourageants dans tous les pays. L’un des objectifs principaux du projet Iesa, c’est d’apporter  un appui aux efforts des pays et de la Fao dans l’atteinte de la sécurité alimentaire à travers une meilleure gestion, utilisation des ressources en eau et  des terres. Dans ce cadre, dans les 5 pays où le projet  est intervenu : Mali,  Burkina-Faso, Sénégal, Guinée et Niger, le projet a permis d’introduire  des techniques de maîtrise de l’eau, des technologies à faible coût de mobilisation des ressources en eau, par exemple des pompes adaptées  et des ouvrages de captage de l’eau ont été construits. Cela a permis, non seulement, d’augmenter les superficies cultivables, mais surtout, de sécuriser les productions, notamment dans les pays les plus touchés  du sahel. Le plus souvent, dans ces pays, on constate un arrêt brusque des pluies ou une insuffisance pluviométrique marquée. Sans cette maîtrise de l’eau, il n’y a pas de sécurité pour les agriculteurs. Les projets ont permis,  avec l’introduction de ces techniques de gestion de maitrise de l’eau, d’augmenter les superficies cultivables. Nous avons, en termes de rendements, des résultats très positifs, ce qui permet aujourd’hui à ces populations bénéficiaires, d’avoir des revenus très significatifs. Nous avons fait réaliser une évaluation par les bénéficiaires où les gens se sont prononcés sur l’appui et  les impacts de ces appuis sur leurs vies quotidiennes, donc, sur leur survie.

Malgré les énormes potentialités du Mali en eaux souterraines et de surface, pourquoi y a-t-il toujours des problèmes liés à l’eau ?

C’est vrai, le Mali, par rapport à d’autres pays, a des ressources considérables en eau, malheureusement, quand vous voyez les ressources qui sont effectivement mobilisées pour la satisfaction des besoins de l’agriculture,  par exemple, c’est vraiment faible par rapport au potentiel existant. Donc il ya une sous utilisation  des ressources en eau, les efforts de construction des ouvrages de mobilisation des ressources en eau sont insuffisants. Ça c’est pour les eaux de surface, concernant les eaux souterraines,  le Mali bénéficie aussi  d’énormes quantités de ressources  en eaux souterraines, un potentiel également sous exploité. C’est ce qui fait que l’essentiel des activités agricoles dans ce pays  encore est  dépendant de la pluviométrie, qui,  malheureusement avec les changements que l’on observe partout, sont devenus plus en plus  erratiques, avec tous les effets négatifs que cela  suppose.

Le Commissariat à la sécurité alimentaire de notre pays vient de tirer la sonnette d’alarme, en prévision des tensions sur les marchés de céréales. Il  a même commencé à faire des distributions gratuites de céréales, le mardi 11 décembre.  Qu’en pensez-vous ?

C’est un constat réel, il y a eu un arrêt brusque de la pluviométrie et les quantités d’eau tombées cette année sont nettement insuffisantes  d’après toutes les données enregistrées dans le pays. Au cours de nos visites sur le terrain, nous avons rencontré des agriculteurs qui ont tout perdu.  Ce qu’entraîne cette carence en pluviométrie, c’est que les rendements seront nettement en deçà des besoins des populations, d’où la nécessité de prendre des dispositions diligentes pour venir en aide à ces populations sinistrées. L’action de développement du Mali est à saluer. La communauté internationale, les différents partenaires comme la Fao, nous devons immédiatement réagir pour apporter un appui aux efforts menés  par le gouvernement malien. Sinon nous risquons de voir  une nouvelle catastrophe avant même la fin de l’année 2012,  ça va être la deuxième catastrophe que l’Afrique subsaharienne risque de vivre si des mesures urgentes ne sont prises.

Quelles sont vos bilans et perspectives ?

Au cours de l’atelier, après avoir fait le bilan des réalisations, nous sommes en train de discuter des perspectives d’une nouvelle vision de l’Initiative eau sécurité alimentaire en Afrique. Donc, en capitalisant les bonnes pratiques et  à partir de ces capitalisations,  nous allons, au cours de l’atelier,   identifier des axes stratégiques prioritaires à développer pour les prochaines années, tout autour de la maîtrise de l’eau en complément avec d’autre actions telles que l’appui à la mise en valeur, le renforcement des capacités des producteurs dans les techniques de maîtrise et de gestion de l’eau et également dans  d’autres techniques agricoles qui concourent à l’augmentation de la production et de la productivité. Les perspectives sont en train d’être élaborées et au sortir de cet atelier,  chaque pays aura un plan de travail  pour l’année 2012, déjà validé,  avec des options stratégiques, des axes d’intervention clairement définis  pour renforcer les acquis des différents projets afin de répondre aux demandes des populations bénéficiaires.

Propos recueillis par Baba Dembélé

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Des programmes contre la faim : L’Afrique de l’Ouest ciblée

L’atelier régional de suivi des projets de l’Iesa et de l’Aprao, qui vient de se tenir dans notre pays du 12 au 16 décembre, entre dans le cadre de la recherche de solutions idoines et de leur mise en œuvre pour assurer la sécurité alimentaire en Afrique. L’Agence espagnole de coopération internationale pour le développement et l’Organisation mondiale pour l’agriculture et l’alimentation (Fao) ont entrepris des programmes parmi lesquels l’Initiative eau et sécurité alimentaire pour l’Afrique (Iesa) et le programme pour l’amélioration de la production de riz en Afrique de l’Ouest en réponse à la flambée des prix des denrées alimentaires (Aprao).

Les projets Iesa visent l’amélioration de la sécurité alimentaire par le recul de la faim, l’augmentation des revenus et la disponibilité alimentaire des producteurs les plus vulnérables des zones rurales et périurbaines en Afrique de l’Ouest via la maîtrise de l’eau et le renforcement des capacités techniques et organisationnelles. Ces projets qui ont été lancés depuis 2007 au Niger concernent 5 pays : Mali, Sénégal, Burkina-Faso, Guinée et Niger.

Le projet Aprao a pour objectif global d’accroître de façon durable la production rizicole nationale dans 5 pays : Mali, Côte d’Ivoire, Niger, Sénégal et Mauritanie. Il a, entre autres, pour objectifs spécifiques : la promotion de l’utilisation de semences de qualité, l’accroissement de la productivité des différents systèmes de production de riz de manière durable et la promotion de la qualité du riz local.

Baba Dembélé

Sources : Fao- Aecid

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