Que sont-ils devenus : Emile Fofana dit Zito : Passionné de basket et collectionneur de titres

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La passion d’Emile Fofana dit Zito pour le basket-ball rappelle celle de l’ex entraineur des Aigles, Molobaly Sissoko, pour le football. En sa qualité d’entraineur, il aura consacré sa vie à la balle au panier. Seize ans à l’As Réal de Bamako, douze ans au Stade et trois ans au Djoliba, plus ses passages dans les différentes équipes nationales. Autant nous avons été émerveillés par son parcours, autant il garde les pieds sur terre, tout en reconnaissant qu’il doit tout à son mentor, feu Amadou Daouda Sall. C’est à la Maison des jeunes que nous l’avons rencontré dans le cadre de la rubrique ” Que sont-ils devenus ? “, où il assistait à un tournoi de basket-ball réservé aux cadets des différents centres de formation. Malgré sa retraite et son âge, Emile Fofana dit Zito reste attaché à la discipline. D’emblée, il s’est excusé en nous demandant de différer l’entretien, parce qu’il ne peut pas quitter un match de basket, surtout un tournoi de jeunes. Rendez-vous a été pris à son domicile au quartier populaire de Médina Coura, pour le lendemain. Nous avons retrouvé sur place un homme très détendu, qui a bien voulu nous parler de son riche palmarès. L’opportunité d’avoir le technicien Zito est comme une balle au rebond que nous avons saisie, pour comprendre l’histoire du basket-ball malien. Parce qu’il n’a connu que cette discipline, qui continue d’ailleurs de le passionner. Enormément !

L’homme maîtrise parfaitement l’histoire du basket-ball malien. Ce qui justifie son argumentation, selon laquelle, la discipline est malade. Un mal qu’il situe à plusieurs niveaux : la caducité des textes, le niveau très bas du championnat, la mauvaise politique des jeunes, le manque d’équipements adéquats. Pour cela, il conseille une adaptation des textes aux réalités actuelles et à celles de Fiba-Afrique. Pourtant, une ancienne basketteuse, en l’occurrence Adiza Maïga, a fait la même remarque dans cette rubrique. Elle estime qu’une nouvelle orientation de notre basket-ball est liée à la révision de ses textes. Mieux, elle a posé la problématique de l’inconstance des résultats des filles entre les catégories. Parce que, selon elle, il est incompréhensible qu’elles soient les éternelles championnes dans les catégories d’âge et deviennent par la suite “des géantes au pied d’argile” au sommet ? L’actuel président de la Fédération malienne de basketball saura analyser tous les enseignements nécessaires pour tirer une conclusion, par rapport aux remarques.

Pour revenir à notre héros du jour, Emile Fofana dit Zito, il n’a pas été ce basketteur de haut niveau, malgré son courage et sa détermination. Il a quand même joué à l’Union Sportive des Fonctionnaires, jusqu’à la fusion avec Alliance en 1970. Son seul feu d’artifice reste les semaines nationales de la jeunesse au début des années 1960.

Le fait d’avoir retrouvé sur son chemin un certain Amadou Daouda Sall lui a ouvert toutes les portes. Il s’est créé entre les deux hommes une affinité, qui poussera même Emile à renoncer à être joueur de basket. Il s’est accroché à son ainé pour se faire la main et comprendre les coins et recoins de la discipline. Après quelques années de complicité, Sall lui demande de venir dans l’encadrement technique du Stade malien de Bamako. Emile n’est pas tellement chaud pour une telle aventure, compte tenu d’un handicap : le bégaiement. Son mentor le convainc que cela ne saurait être un facteur qui puisse l’empêcher de travailler. Pour cela, Amadou Daouda Sall conseille à Zito de se débarrasser du complexe pour foncer vers l’objectif qu’il s’est fixé. C’est-à-dire devenir comme son maître.

Cette leçon de morale a psychologiquement produit son effet sur le jeune Emile. Seulement, il ne voulait pas rester auprès de Sall. La raison est simple : le temps passé à l’école a créé en lui l’envie de tester son propre niveau. Donc, contre la volonté de son mentor, il débarque au Réal de Bamako en 1977 et prend en main la génération des Barou Diallo, Alassane Fané, Cheick Oumar Sissoko dit Yankee, Sékou Tamboura dit Serge, Mamadou Touré dit VO, Alassane Kanouté. Des jeunes qu’il fallait cadrer sur le plan de la discipline, pour ensuite s’attaquer à l’obstacle, l’équipe du Stade malien de Bamako qui menait seule la cadence au sommet. Cela a consisté, pour lui, à faire un travail de fond pendant trois ans. Les Scorpions accèdent à leur première finale de coupe du Mali en 1980 et battent les Blancs de Bamako, à l’issue d’une rencontre palpitante officiée par deux arbitres sénégalais. Le Réal domine pendant huit ans le basket-ball malien. Zito s’est dit qu’il faut dépasser l’ambition des objectifs standards, pour viser un trophée continental. Echec et mat ! Il rejoint la famille Blanche en 1992.

Quitter le Réal en ces moments était-il logique après un tel travail ? N’a-t-il pas jeté le bébé avec l’eau du bain ? 

Zito pense qu’il ne s’est pas entendu avec les dirigeants des Scorpions (l’As Real). A son avis, ceux-ci n’ont rien entrepris pour stopper la saignée provoquée par le débauchage de ses joueurs par le Stade malien de Bamako et l’As Biao. Il décide de claquer la porte. Avant d’officialiser son départ, il a pris le soin d’informer le président du club, Mamadou Samba Konaté. Lequel donna son accord au terme de pourparlers infructueux. Cela a eu l’avantage d’éviter la rupture entre les deux parties. Cependant, son transfert pour le Stade malien n’a pourtant pas été facile.

Fonctionnaire de son état, c’est par décision du Département des Sports qu’il avait été affecté au Réal. Donc, il fallait aussi un autre acte administratif, pour officialiser son transfert à un autre niveau. Cet aspect n’a pas contribué à faciliter les choses. Zito revient sur ses tractations : “J’étais un cadre du Ministère des Sports et de la Jeunesse. A l’époque, le Département affectait les entraineurs aux clubs. Donc, ils évoluaient à ce niveau et prenaient leur salaire de fonctionnaire. Quand j’ai voulu quitter, on m’a rappelé ce principe. C’est ainsi que j’ai adressé une demande au Département pour transférer au Stade. Cela n’a pas été facile, parce que mon dossier a été transmis à un conseiller technique, qui jouait au Réal. Finalement, au bout d’un entretien, il a émis un avis favorable et j’ai été affecté au Stade, où j’ai créé la sensation avec dix titres de champion consécutifs, quatre doublés avec les Kaba Issa Koné, Mamadou Tamboura, Mamadou Diarra dit John, Sékou Coulibaly, Broulaye Doumbia, Modibo Diarra. Après, j’ai quitté pour des raisons que l’image du club ne permet pas de les divulguer dans la presse. En tout cas, j’ai démissionné parce que ça n’allait pas. Auparavant, en 2005, les dirigeants du Djoliba m’avaient sollicité pour assister l’encadrement technique, à la faveur de la coupe d’Afrique des clubs champions féminins que les Rouges ont remportée à Bamako au mois d’octobre”.

Cette collaboration de circonstance entre Zito et le Djoliba servira par la suite d’arguments pour solliciter une fois de plus l’expérience du technicien. En réalité, c’était la deuxième fois que Zito prêtait main-forte à l’encadrement du Djoliba. En 1982, à l’occasion du tournoi amical africain (devenu par la suite la coupe d’Afrique des clubs champions), il a contribué au sacre des dames du Djoliba, où la gazelle du Stade, Salimata Dembélé (sélectionnée par le Djoliba) a séduit une fois de plus par la qualité de son jeu. Ce qui lui a même valu le trophée de meilleure joueuse.

Déjà en 2004, il avait pris sa retraite au niveau de la Fonction publique, donc aucune formalité administrative n’était plus exigée. Emile signe un contrat de deux ans. L’objectif recherché par les dirigeants du Djoliba était très clair : maintenir le cap de la suprématie des filles du Djoliba. Avec les Rouges, il réalise un doublé en 2008 et remporté un titre de champion en 2009. Le 6 avril 2010 consacre la fin de ses engagements avec le Djoliba.

Libre de toutes clauses contractuelles, Zito rejoint la Jeanne d’Arc pour donner un second souffle aux équipes masculines et féminines. Chose qu’il réussira pour avoir accédé à l’élite. A partir de cette équipe, Emile Fofana met un terme à sa carrière.

L’histoire de Zito est riche, amusante, surtout s’il évoque les conditions dans lesquelles il a donné l’âme au basket-ball des Réalistes.

Avec une valeur intrinsèque avérée, qu’est-ce que le basketball a apporté à Emile Fofana ?

Zito surprend par ses réponses : “Dans la vie, on emprunte des chemins par passion, ce qui fait que les difficultés ou les obstacles pèseront moins pour décourager. J’ai eu des relations qui me permettent de résoudre beaucoup de choses dans la vie. Vous saurez par-là que le basketball malien ne m’a pas rapporté ce que je devais avoir par rapport à tout ce que j’ai réalisé comme exploit. Depuis le bas âge, cette discipline m’a passionné et mon ainé, Amadou Daouda Sall, à qui je dois tout, a contribué à cultiver l’amour du basketball dans mon cœur. Et le mérite de ma réussite lui revient. Mais hélas … “

Parallèlement à son parcours au niveau des différents clubs, Emile Fofana a également coaché les équipes nationales. Il a conduit les Aigles dames à la CAN en Egypte en 1976. L’équipe malienne ne dépasse pas le stade des quarts de finale. Une fois de plus, il n’a pas voulu dévoiler les causes de l’échec de son groupe parce que certains qui ont eu à poser des actes négatifs ne sont plus de ce monde. Cependant, il retient qu’à l’époque, l’actuel Premier ministre, Soumeylou Boubeye Maïga, qui ne savait pas du tout ce qui s’est passé à la CAN, n’a pas été tendre avec l’encadrement dans un article paru dans le quotidien national L’Essor. Emile dit avoir compris que Boubeye a fait son travail de journaliste, donc il ne lui a pas tenu rigueur. La preuve est qu’ils sont demeurés des amis quand celui-ci a été nommé Directeur Technique National.

Zito coacha également les juniors en 1981. Par la suite, il participera à trois CAN féminines : Tunis 1989, Egypte 1991, Kenya 1993. Le Sénégal barra la route au Mali, lors des éliminatoires de la CAN de Zimbabwe en 1995. Après cette défaite, Zito rendit sa démission et ce fut la fin de son parcours en équipe nationale.

Comme bons souvenirs, il retient la première coupe du Mali offerte au Réal en 1980, le tournoi amical africain remporté par le Djoliba en 1982, la coupe d’Afrique des clubs champions filles remportée par le Djoliba en 2005.

Troublé par le signe de la prière se trouvant sur son front, alors qu’à notre avis il est chrétien, notre héros du jour nous rassure que cela fait des années qu’il s’est converti à l’islam. Son nom musulman est Ahmed Ibrahima Fofana. Certes, il n’entraine plus, compte tenu de son âge, mais il reste collé au basket-ball en multipliant les initiatives auprès de la Fédération et de ses cadets entraineurs. Ahmed Ibrahim a 73 ans et il est père de trois enfants.

O. Roger Sissoko

 

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