Evolution de la Transition : Le silence pour les voix audibles ?
Les critiques de la gouvernance de Transition devraient aider à améliorer la gestion du pays. Elles vont désormais manquer…

En effet, avec le placement sous mandat de dépôt des anciens Premiers ministres Moussa Mara et Choguel Kokalla Maïga, la page des voix critiques de la Transition semble tournée. Car, ces deux leaders politiques étaient comme les derniers « résistants » décidés à apporter des critiques par rapport à la conduite des affaires du pays. Avec la poursuite judiciaire lancée contre eux, ils sont contraints au silence. Ce qui n’avantage pas les autorités de Transition, qui pouvaient tirer des observations et prises de positions de ces anciens chefs du gouvernement, pour mieux positionner leurs pions, pour relever les défis auxquels le pays fait face.
Il faut signaler que depuis la décision de dissolution des partis et associations politiques, l’opinion publique est sevrée des communiqués, avis et recommandations des états-majors politiques. Ce qui fait que l’ensemble des «forces vives de la Nation » est tombé dans une léthargie préjudiciable au bon fonctionnement de l’Etat. Car, les forces vives constituent un ressort inaliénable de réflexions et de propositions pour un Etat, surtout lorsqu’il est engagé dans un processus de refondation.
C’est dans ce sens que des personnalités politiques engagées et déterminées, comme Me Mountaga Tall, Housseinou Amion Guindo, l’ancien Premier ministre Modibo Sidibé, ont tenté, vaille que vaille, de maintenir la flamme de la participation politique sur les grands sujets de la Nation, avant de finir par se relâcher, tant une sorte d’épée de Damoclès plane sur les voix critiques de la Transition. Car, les cas de dossiers judiciaires pour « atteinte au crédit de l’Etat » se sont multipliés au point que les uns et les autres ont plongé dans un mutisme imposé.
Or, il est de notoriété que l’on ne peut pas danser et s’apprécier. Et Voltaire souligne que même si l’on n’est pas d’accord avec l’observateur, il faut plutôt se battre pour qu’il puisse s’exprimer. Et, c’est de la confrontation des idées que jaillit l‘étincelle de la vérité, susceptible d’aider les gouvernants.
La conséquence de ce climat de peur et d’autocensure est une absence chronique de débats et d’échanges sur la marche du pays. Et ce contexte crée un climat de « la pensée unique », où la position défendue par le gouvernement est le seul angle de perception de la gestion des affaires publiques. Cette méthode de gouvernance n’ouvre-t-elle pas un boulevard de dérives ? De quel garde-fou dispose l’Etat, pour sonner l’alerte contre tout pilotage à vue dans certains domaines de la gouvernance ? Aucun. Il s’agit d’une situation préoccupante, surtout quand on sait que le parlement provisoire, le CNT, est nommé par le chef de l’Etat.
Ce règne de la pensée unique est donc préjudiciable au processus de paix et de réconciliation nationale, récemment engagé, pour renforcer le processus de pacification du pays. Comment aider au retour de la paix et de la réconciliation, quand des pans de la Nation n’ont pas voix au chapitre ? Comment engager des réformes profondes quand les forces hésitent à s’exprimer ?
Les autorités vont donc se contenter des voix souvent laudatrices de quelques activistes (accrochés aux réseaux sociaux), qui voient tout en rose.
Il appartient donc au président de la Transition, d’avoir la juste mesure de la situation, pour rectifier le tir. Car, la sagesse est bien connue selon laquelle « si ton ami n’arrive pas à te dire la vérité, paie ton ennemi pour qu’il te la dise ». Sans oublier d’ajouter que la vérité rougit les yeux, elle ne les crève pas ». Au contraire, elle permettra aux uns et aux autres de mieux apprécier les éventuelles erreurs, pour mieux agir pour sortir le pays de la crise multidimensionnelle.
Boubou SIDIBE/maliweb.net
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