Au cœur du projet de la charte pour la paix et la réconciliation nationale
Le Mali, confronté à des défis persistants en matière de sécurité, d'économie et de cohésion sociale, s'est engagé dans une démarche de refondation nationale.

Au cœur de cette initiative se trouve le projet de la "Charte Nationale pour la Paix et la Réconciliation nationale", un document fondamental conçu pour guider le pays vers une stabilité durable et une cohésion sociale renforcée. Ce texte ambitieux, initié par le Président de la transition, le Général d'Armée Assimi Goïta, représente une étape cruciale dans la quête du Mali pour une paix pérenne et un développement harmonieux. Au cœur du projet de la Charte se trouve le respect inaliénable des principes démocratiques et de l'État de droit, assurant un gouvernement juste et respectueux des lois et des droits de chacun.
Le projet de la Charte a été officiellement remis au Président de la transition, le 22 juillet 2025, lors d'une cérémonie solennelle au Centre International de Conférences de Bamako (CICB). Cette réception formelle par le Chef de l'État souligne l'engagement politique de haut niveau et la priorité accordée à ce document. L'acte symbolique et institutionnel que représente cette remise indique que le projet la Charte n'est pas une simple proposition théorique, mais un pilier fondamental de l'agenda du gouvernement actuel pour la stabilité et la gouvernance nationale.
En faisant l'économie, on reconnaît à cette charte une intention sérieuse quant à sa mise en œuvre et son intégration dans les politiques publiques du pays.
Cette économie a pour objectif de décrypter le contenu du projet de la Charte Nationale pour la Paix et la Réconciliation nationale, en la rendant compréhensible et pertinente pour chaque citoyen malien. Elle explique ses objectifs, ses principes clés et la manière dont elle est censée transformer le Mali, offrant ainsi une compréhension claire dudit document, essentiel pour l'avenir de la nation.
Genèse et vision fondamentale de la Charte
Pourquoi une Nouvelle Charte ? Le projet de la Charte Nationale pour la Paix et la Réconciliation nationale est destiné à remplacer et à enterrer définitivement l'Accord pour la Paix et la Réconciliation issu du processus d'Alger, signé en 2015 entre les groupes armés et le gouvernement malien. L'Accord d'Alger, bien qu'ayant marqué une étape importante, a rencontré des difficultés significatives dans sa mise en œuvre. Une des critiques principales portait sur sa perception comme un conflit entre États plutôt qu'un conflit interne entre un État et ses propres citoyens entrés en rébellion. Cette approche a engendré des lourdeurs administratives et la création de multiples structures politiques, sécuritaires et administratives, rendant l'application de l'Accord complexe et peu efficace.
Le remplacement de l'Accord d'Alger par cette nouvelle Charte malienne conçue par des maliens marque un changement profond dans la philosophie de consolidation de la paix au Mali. Le pays s'éloigne d'un cadre négocié sous médiation internationale, qui avait été critiqué pour sa caractérisation erronée du conflit et ses difficultés d'exécution, pour adopter une approche souveraine et menée de l'intérieur. Cette évolution reflète une volonté affirmée d'appropriation nationale et d'autodétermination dans la résolution des conflits internes, dans le but d'élaborer des solutions qui sont plus profondément ancrées dans les réalités maliennes et moins sujettes aux influences extérieures
Une initiative malienne pour une paix durable
Le projet de la Charte est une initiative directe du Président de la Transition, le Général d'Armée Assimi Goïta, qui a clairement exprimé la nécessité pour les Maliens de s'approprier la paix et la réconciliation nationale "sans interférence extérieure aucune". Cette initiative du Président Goïta indique clairement une orientation stratégique vers l'autonomie et la souveraineté dans la gestion des affaires intérieures du pays.
Le processus d'élaboration du projet de la Charte a inclus un "Dialogue inter-Maliens", une démarche visant à restaurer l'unité et la stabilité en s'appuyant sur des valeurs fondamentales telles que le patriotisme, la justice et la bonne gouvernance. L'accent mis sur une initiative malienne et l'absence d'ingérence extérieure pour ce projet de la Charte pour la Paix et de la Réconciliation nationale, parallèlement au discours plus large de "refondation" et au concept de "Mali Kura" (nouveau Mali), révèle un engagement plus profond envers la souveraineté nationale et l'autonomie dans tous les aspects de la gouvernance. Cela suggère une démarche stratégique visant à affirmer l'indépendance du Mali sur la scène internationale et à renforcer sa résilience interne, avec des implications pour sa politique étrangère et ses structures de gouvernance au-delà de la simple consolidation de la paix.
La vision d'un Mali souverain, réconcilié et uni
La nouvelle Charte promeut une vision claire et ambitieuse pour l'avenir du Mali : celle d'une nation souveraine, réconciliée, tolérante et en paix. Elle envisage un État refondé, reposant sur les principes d'une gouvernance démocratique, juste et équitable. Au-delà de la simple résolution des conflits, ce document vise à renforcer la paix, la sécurité, la coexistence pacifique et la cohésion sociale à travers tout le pays. Il encourage également l'engagement actif de la jeunesse, le considérant comme un acteur clé dans la construction de cet avenir unifié.
Structure et portée du document
Le projet de la Charte Nationale pour la Paix et la Réconciliation nationale est un document exhaustif et méticuleusement structuré, conçu pour couvrir l'intégralité des aspects du développement national, qu'ils soient économiques, sociaux ou culturels, et pour intégrer toutes les composantes de la société malienne dans cette démarche de refondation. Elle s'articule autour d'un préambule, de 16 titres, de 39 chapitres et de 106 articles.
Le préambule de cette Charte revêt une importance particulière, car il "fixe le projet de société du Mali". Il établit les bases idéologiques et les aspirations profondes de la nation, servant de cadre directeur pour l'ensemble des dispositions et des objectifs énoncés dans les articles suivants. Les 16 titres représentent les grandes sections thématiques du document, tandis que les 39 chapitres offrent des subdivisions plus détaillées. Enfin, les 106 articles contiennent les dispositions spécifiques et détaillées couvrant divers aspects de la paix, de la réconciliation et du développement. Cette architecture détaillée indique que le document est bien plus qu'un simple accord de résolution de conflit ; il est positionné comme une feuille de route complète pour l'identité nationale, la gouvernance et les valeurs sociétales, visant à redéfinir le tissu même de la société malienne après la période de crise. Cela en fait un projet de société holistique, et non un simple outil de gestion des conflits
Principes et valeurs clés de la Réconciliation
Le projet de la Charte Nationale pour la Paix et la Réconciliation nationale s'appuie, en outre, sur un ensemble de principes et de valeurs fondamentaux qui doivent guider l'action collective et individuelle pour la co-construction d'un Mali apaisé et uni. Ces principes sont essentiels pour garantir un cadre de vie équitable, stable et juste pour l'ensemble des Maliens, où les droits de chacun sont protégés et respectés.
Au cœur du projet de Charte se trouve le respect inaliénable des principes démocratiques et de l'État de droit, assurant un gouvernement juste et respectueux des lois et des droits de chacun. Elle promeut également la justice sociale et l'égalité, garantissant que tous les citoyens bénéficient des mêmes chances et d'un traitement équitable. La bonne gouvernance et la redevabilité sont activement encouragées, impliquant une gestion transparente et responsable des affaires publiques où les dirigeants sont redevables de leurs actions. Cela s'accompagne d'un engagement ferme dans la lutte contre la corruption, l'impunité et la délinquance économique et financière, des fléaux qui ont historiquement miné le développement et la confiance publique au Mali.
Le projet de la Charte met un accent particulier sur des valeurs humaines fondamentales pour la réconciliation nationale, telles que le dialogue, le pardon, la tolérance et l'écoute mutuelle. L'objectif est de renforcer les liens entre les communautés et de promouvoir l'harmonie et le respect mutuel, en encourageant la discussion ouverte et la capacité à pardonner pour surmonter les divisions passées et favoriser le "vivre-ensemble" harmonieux. Un aspect distinctif de ce projet de Charte est sa promotion des "modes alternatifs et les mécanismes endogènes de prévention, de gestion et de règlement des conflits qui ont montré leur efficacité", valorisant explicitement l'utilisation des méthodes de résolution de conflits héritées de la culture malienne, qui ont fait leurs preuves. L'inclusion et la promotion explicites de ces mécanismes mettent en lumière une reconnaissance stratégique du contexte culturel unique du Mali, visant à intégrer la sagesse locale et les pratiques communautaires établies dans le cadre officiel de la paix. Enfin, le projet de la Charte vise la restauration de la souveraineté nationale, affirmant le contrôle du Mali sur son propre destin et ses ressources, sans interférence extérieure.
Axes majeurs de développement et d'engagement national
Le projet de la Charte Nationale pour la Paix et la Réconciliation nationale ne se limite pas aux aspects de résolution de conflit, mais s'étend à une vision holistique du développement et de l'engagement national.
Le projet de la Charte couvre "tous les aspects de développement économique, social [et] culturel". Elle vise à accélérer le développement, avec une attention particulière pour les régions du nord du Mali, en mettant en place un système approprié. Cela inclut un soutien concret aux producteurs par la fourniture de semences et d'engrais, l'amélioration des services techniques, la promotion de la petite pêche, la distribution alimentaire aux populations vulnérables, et le renforcement global de la sécurité alimentaire du pays.
Renforcement de la sécurité et de la stabilité
Un objectif primordial du projet de Charte est de restaurer la sécurité de manière immédiate et de promouvoir une paix durable et la stabilité sur l'ensemble du territoire national. Le document met en lumière les défis sécuritaires actuels et souligne la nécessité impérieuse de les relever. Pour ce faire, le projet de la Charte préconise le redéploiement de l'armée reconstituée sur l'ensemble du territoire national et la garantie de la libre circulation des personnes et des biens.
Inclusion de la jeunesse et de toutes les composantes de la société
Le projet de la Charte insiste sur l'inclusion de "toutes les composantes de la société malienne" et vise spécifiquement à encourager une "jeunesse engagée". Elle met en avant l'importance de l'implication active des citoyens dans sa mise en œuvre. De plus, le document accorde une attention particulière à la protection et à l'assistance des groupes sociaux vulnérables, tels que les orphelins, les femmes chefs de famille, les enfants traumatisés, les veuves et les personnes handicapées.
Restauration de la Souveraineté nationale
Un objectif central du projet de Charte est la restauration de la souveraineté nationale et l'appropriation nationale du processus de paix. Cette démarche s'inscrit dans une initiative plus large de "refondation" de l'État malien. L'étendue du projet de Charte, qui englobe le développement économique, social, culturel, la sécurité et la souveraineté nationale, révèle qu'il ne s'agit pas seulement d'un accord de paix, mais d'un document fondateur pour une "refondation nationale" complète. Cela implique une stratégie holistique visant à reconstruire l'État et la société maliens, en s'attaquant aux causes profondes de l'instabilité par une approche multisectorielle plutôt que de se contenter de gérer les symptômes du conflit. Cette approche suggère une stratégie nationale intégrée et à long terme, où une paix durable est intrinsèquement liée à un développement économique robuste, à la justice sociale et à l'autodétermination nationale
Mise en œuvre et appropriation par le Peuple malien
Le projet de Charte est considéré comme une boussole de la gouvernance. Dans cette voie, elle est appelée à devenir le "socle commun des politiques publiques, des stratégies de paix et de réconciliation, et de l'action collective pour l'avenir du Mali". Elle est conçue pour servir de guide et de référence pour toutes les institutions de l'État, les autorités traditionnelles, la société civile et chaque citoyen dans la quête d'un Mali apaisé et uni.
Le rôle du Conseil National de Transition (CNT) et son adoption en Loi
Le projet de Charte sera soumis à l'appréciation du législateur, le Conseil National de Transition (CNT), qui aura la responsabilité de l'adopter. Une fois adoptée par le CNT, elle acquerra le statut de loi et sera applicable sur toute l'étendue du territoire national. Il est crucial de distinguer ce projet de la "Charte Nationale pour la Paix et la Réconciliation nationale" de la "Charte de la Transition". La "Charte de la Transition" régit la période transitoire, a été révisée pour prolonger le mandat du Président et abroger certaines lois sur les partis politiques, et constitue un instrument juridique distinct du projet de la Charte pour la Paix et de la Réconciliation nationale, qui se concentre spécifiquement sur l'unité nationale et la reconstruction post-conflit.
L'importance de l'engagement citoyen et de la sensibilisation
Le gouvernement malien ambitionne de lancer une vaste campagne de sensibilisation pour impliquer activement les citoyens dans la mise en œuvre de la Charte. Des ateliers de restitution ont déjà été organisés afin que les représentants de toutes les régions du Mali et de la diaspora malienne puissent s'approprier le document, comprendre son contenu et, par la suite, le promouvoir à travers le pays dans les différentes langues nationales, ainsi qu'auprès des compatriotes établis à l'étranger. L'accent répété sur une stratégie de communication et l'"appropriation" publique indique que les autorités maliennes considèrent la compréhension et l'adhésion généralisées du public comme absolument essentielles au succès à long terme de la Charte. Cela révèle une reconnaissance que la seule existence d'un document juridique est insuffisante ; sa véritable force réside dans son adoption en tant que contrat social partagé par la population, la transformant ainsi d'un simple texte en un guide vivant pour l'action nationale.
Un engagement collectif pour l'avenir du Mali
Le projet de la Charte Nationale pour la Paix et la Réconciliation nationale représente une feuille de route ambitieuse et structurée pour le Mali. Elle vise à consolider l'unité, la sécurité et le développement du pays, en s'appuyant sur des principes fondamentaux de bonne gouvernance, de justice sociale et de dialogue endogène. Ce document incarne la volonté malienne de s'approprier son destin et de bâtir une paix durable, en se basant sur ses propres réalités et aspirations.
Cependant, le succès de cette «Charte» dépendra non seulement de son adoption légale par le Conseil National de Transition, mais surtout de son appropriation effective par l'ensemble des citoyens maliens. La capacité du gouvernement à surmonter les défis d'inclusivité, notamment en associant toutes les parties prenantes du conflit, sera également déterminante pour garantir une légitimité et une efficacité maximales.
En fin de compte, le projet de la Charte est un appel à l'action collective. Elle invite chaque Malien, où qu'il se trouve, à contribuer activement à la co-construction d'un Mali apaisé, uni et prospère. Cela passe par un engagement continu dans le dialogue, la pratique du pardon et la promotion des valeurs de cohésion sociale qu'elle défend. Le projet de la Charte est un document vivant, dont l'efficacité sera mesurée par l'engagement et l'unité du peuple malien dans la concrétisation de sa vision pour un avenir meilleur.
Khaly-Moustapha LEYE
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