Coups d’état en Afrique : La promotion d’un clan

Première question: Pourquoi les coups d’État en Afrique sont-ils si nombreux ? Entre 1958 et 2018, il y a eu quatre-vingt-deux (82) coups d’État en Afrique.

16 Juin 2025 - 07:34
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Coups d’état en Afrique : La promotion d’un clan

 «La distinction entre putsch et prise de pouvoir par un militaire et coup d’État qui peut aussi être le fait d’un civil soutenu par l’armée est quasi superflue en Afrique subsaharienne, ces évènements ayant presque toujours profité à un gradé». Les coups d’État sont les conséquences des mauvaises gestions.  L’Afrique des coups d’État et des complots. À partir de 1960, l’année des indépendances sur le continent, il y a eu plus de trente coups d’État en Afrique de l’Ouest. Tous des militaires. Seize (16) officiers présidents et plus de 100 soldats de l’Association des enfants de troupes (AET) se sont succédé au pouvoir en Afrique. Chaque fois qu’il y a un coup d’État, c’est une promotion pour un clan militaire. Et ce sont ces différents clans et leurs familles élargies qui se partagent le pouvoir.

Mais voyons au Mali ce qui s’est passé entre 1968 et 2020. Chaque fois qu’il y a eu un coup d’État militaire au Mali, on entend cette phrase: «Nous sommes venus pour redresser».

En 1968, le Comité militaire de libération nationale (CMLN) l’a dit en ces termes, selon le capitaine Sounkalo Samaké, dans son livre Ma vie de soldat: «Lorsque nous avons fait le coup d’État du 19 novembre 1968, nous avons dit au peuple malien que nous étions venus pour redresser la situation économique et sociale et les dérapages du régime de Modibo Keïta et de son parti, l’Union Soudanaise-Rassemblement démocratique africain (US-RDA). Mais à la tâche, nous fait pire que Modibo».

Selon le capitaine, le CMLN a eu une courte durée. Sur les quatorze (14) officiers du CMLN, il ne restait plus le général président Moussa Traoré et le général Filifing Sissoko. Le pouvoir militaire était alors si fragile qu’il suffisait de le pousser pour le renverser. Ce qui fut fait le 26 mars 1991.

Après la chute du dictateur Moussa Traoré, il y a eu un procès crime de sang et crimes économiques. RFI annonce que le montant de la somme détournée par les «dignitaires» de l’ancien régime: deux (02) milliards de dollars. Dans L’Essor du 19 avril1991, quelques chiffres sont avancés; des noms et les montants des sommes détournés.

En Afrique, l’argent de l’État et l’argent du président sont largement confondus et la plupart de nos présidents ont un comportement de nos premiers «grands commerçants» qui empochent l’argent de leur business sans tenir aucune comptabilité, et le dépensent sans prendre de reçu. La précarité des régimes politiques pousse les dirigeants à accumuler le plus vite possible, et par tous les moyens, une fortune qu’ils s’empressent de mettre en sureté à l’extérieur.

Ensuite, l’absence de tout sentiment patriotique fait que nos dirigeants ferment les yeux, bouchent les oreilles et le nez devant la misère de leurs concitoyens. Pour sa part, le dictateur Moussa Traoré au pouvoir de 1968 à 1991 préférait les caisses métalliques pour expédier son or à l’étranger, comme l’ont constaté des douaniers maliens trop scrupuleux.

Au moins cent soixante-neuf (169) chargements ont été expédiés de cette manière entre février 1985 et août 1987 à bord de la compagnie Sabena vers la Suisse, via Bruxelles. Le précieux métal devait être fondu à Genève et dans l’usine d’affinage Metalor, à Neuchâtel.

Fin juillet 1990, deux cent soixante-sept (267) kilos d’or sont encore exportés. Comment un des pays les plus pauvres du monde est-il capable d’expédier en Suisse de telles quantités d’or ? Après son renversement en mars 1991, le nouveau gouvernement malien a mis en place une commission rogatoire internationale et cherchait en Suisse une grosse partie des deux (02) milliards de dollars, l’équivalent de la dette extérieure malienne que le clan du dictateur aurait sortis du pays.

C’est à partir de 1968 qu’on a assisté à l’institutionnalisation de la corruption au niveau de l’appareil d’État malien. Souvenez-vous des campagnes de moralisation de la vie publique initiées par Moussa Traoré qui affichait ainsi son impuissance face à l’amplitude de la corruption. Un jour le général Moussa Traoré dit avec candeur: «Quand la tête pourrie, le corps s’étiole», il ne pouvait pas mieux qualifier le système dont il était le chef.  «Férékégnamibougou et Wari» (pièces de théâtre) ont mis à nu le système de vol planifié par les dignitaires de l’ancienne Union démocratique du peuple malien (UDPM).

Le 26 mars 1991, il y a eu un transfert de personnels entre l’UDPM et l’Association pour la démocratie au Mali (ADEMA) et souvent les mêmes étaient aux commandes sous les deux régimes. La première législature (1992-1997) était composée de cent seize (116) députés appartenant à onze (11) partis politiques. ADEMA-PASJ (76 députés) dont la quasi-totalité était des anciens secrétaires généraux de l’UDPM. L’ancien parti unique avait: 10 885 comités à travers tout le pays, trois cent soixante-quatorze (374) sous-sections et cinquante-deux (52) sections. L’Alliance pour la démocratie au Mali-Parti africain pour la solidarité et la justice (ADEMA-PASJ) aussi a le même nombre: cinquante-deux (52) sections, trois cent soixante-quatorze (374) sous-sections et 1 1000 comités.

Clin d’œil sur la gestion des démocrates

Après la chute du régime de Moussa Traoré, les démocrates ont promis au peuple malien le changement sur fond de Kokajè. La suite est connue: ouverture du pays aux capitaux étrangers, liquidation des sociétés et entreprises d’État. N’importe qui a été nommé ministre. Des intellectuels de professions libérales furent ministre au nom d’une appartenance politique. Du coup, des malversations financières, des détournements de deniers publics se succèdent et se suivent. Des scandales financiers éclatent et ternissent l’image des gouvernements successifs.

La Cellule d’appui aux structures de contrôle de l’administration (CASCA) est chargée de procéder au contrôle des pratiques administratives et financières des structures de l’État, et à celui des sociétés et entreprises parapubliques et privées qui utilisent l’argent du budget national ou de l’État pour diverses activités de développement.

Dans son rapport 2005-2006, la CASCA a signalé que quarante-huit (48) dossiers sur cent soixante-seize (176) qu’elle a examinés méritaient d’être soumis à la justice du fait des actes graves de corruption et de délinquance financières décelés: détournement de deniers publics, fractionnement illégal de dossiers d’Appel d’offres en violation du Code des marchés publics, argent volatilisé, facturation malhonnêtes.

Ensuite, elle a rendu public son bulletin n°9. Ce document de cent quarante (140) pages est la synthèse de cent trois (103) rapports de vérification analysés par la CASCA au cours de l’année 2004. Sur la centaine de rapports, trente-trois (33) ont été produits par le Contrôle général des services publics, vingt et un (21) par l’Inspection des Finances et dix (10) par l’Inspection des Affaires étrangères.

Le coup d’État du 22 mars 2012 (le capitaine Amadou Haya Sanogo celui qui a renversé Amadou Toumani Touré (ATT), le troisième coup d’État) est la conséquence des erreurs politiques et militaires accumulées par ATT depuis son élection comme président de la République en 2002 ?  Celui du 18 août 2020 (le quatrième coup d’État de l’indépendance du Mali, en 1960) est celui de la rue. Selon les bruits de Bamako, ce fut un transfert de pouvoir entre Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) et les militaires.

Entre la période 2021 et 2023, 80 milliards de Francs CFA ont été détournés des caisses de l’État. Où va le Mali ? Il est dans l’agonie. Il n’y a pas deux (02) façons de diriger un pays. Il faut la vérité et la justice. Vérité et justice sont les deux (02) mamelles du pouvoir.

Safouné KOUMBA

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