Celui qui s’inscrit dans le sillage de John Fitzgerald Kennedy à redorer le blason d’une institution ternie par une gestion clanique. Aujourd’hui, le taux d’inscription sur les listes électorales bat tous les records dans l’histoire de cette institution consulaire. A preuve ! Les opérateurs économiques se sont réconciliés avec leur chambre de commerce et d’industrie grâce à Jeamille Bittar dont la position de président sortant n’a rien entamé, comme il le dit lui-même, sa détermination à continuer de faire de la Chambre de Commerce et d’Industrie de la République du Mali un véritable levier des affaires. En tout cas, la déferlante est en train de balayer les caciques véreux qui veulent prendre en otage la CCIM. Sous la houlette de Jeamille Bittar, une nouvelle page d’une belle histoire à conter aux générations futures prend forme. Entretien !
C’est désormais connu de tous que votre mandat est arrivé à terme. Mais, ce que la majorité des Maliens ignore, c’est le processus qui doit conduire à l’élection d’un Président de la Chambre de Commerce et d’Industrie du Mali. Pouvez-vous expliquer à nos lecteurs comment ces choses vont se passer dans les jours à venir ?
Effectivement, dans quelques jours il sera procédé au renouvellement intégral de l’Assemblée consulaire et du Bureau chargé de diriger la CCIM. Il y a beaucoup d’engouements relevés ça et là et le taux d’inscription sur les listes électorales, qui bat tous les records dans l’histoire de l’Institution consulaire, est la preuve que les opérateurs économiques se sont réconciliés avec leur chambre de commerce et d’industrie.
Jusqu’à notre arrivée, les élections à la CCIM se déroulaient presque dans l’anonymat. Des gens ont osé dire haut et fort qu’ils ne faisaient aucun effort pour se retrouver membre consulaire, mais aujourd’hui, il faut se bagarrer durement pour mériter cette représentation du secteur privé. Nous en sommes heureux. Cela prouve bien qu’une étape positive de nos actions, visant à redorer le blason de l’Institution terni auparavant par une gestion clanique et exclusiviste, a été franchie.
Pour en venir au mode de scrutin, les opérateurs économiques doivent répondre à certains critères pour être électeurs ou éligibles. C’est-à-dire que celui qui peut produire les preuves du paiement de ses patentes des années 2003, 2004 et 2005 est autorisé à s’inscrire sur les listes comme électeur. Il choisit l’une des trois sections suivantes : commerce, industrie et services, selon ses activités réellement exercées. S’il y ajoute les patentes de 2002 et 2001, il devient éligible. Dans l’esprit des textes, il faut les trois dernières patentes pour être électeur et les cinq pour être éligible.
Ce corps électoral est convoqué pour élire des listes présentées au niveau de chaque section. Exceptionnellement, pour cette année, on va vivre de vraies élections car deux listes distinctes sont en concurrence au niveau de chaque section. Ce qui donne du crédit et de la légitimité au statut de membre consulaire. Après cela, les membres consulaires élus sont appelés à se réunir pour élire, en leur sein, le Président et tous les membres du Bureau.
J’en profiterai alors pour demander aux électeurs d’être très vigilants quant à leur vote. Il faut éviter de donner quitus à une liste qui abattrait après des cartes différentes de celles souhaitées par les électeurs. En d’autres termes, le choix d’une liste prépare l’élection d’un président. Par conséquent, il faut savoir voter, dès le départ, pour la liste parrainée par son candidat à la présidentielle de l’institution.
Une fin de mandat est toujours sources de dissensions voire de déchirements. Or, le monde des affaires est celui qui a le plus besoin de cohésion et de sérénité. Sous quel signe le président sortant que vous êtes place le renouvellement des instances de la CCIM ?
D’abord, je vous rassure pour une chose. Pour moi, la position de président sortant n’a rien entamé dans ma détermination à faire évoluer la Chambre de Commerce et d’Industrie du Mali pour en faire un véritable levier des affaires de notre pays. Je pense que l’on devrait me féliciter pour l’élan unitaire que j’ai tenté de construire. Le contraire me surprendrait.
En réalité, les voix discordantes qui se sont élevées parmi des gens du bureau sont celles de personnes qui n’étaient pas avec moi lors des élections passées. Ils ont été repêchés après notre victoire pour les intégrer dans le Bureau. Mon objectif était de tourner la page électorale, pour construire un secteur privé fort et unitaire. Malheureusement, comme le dit bien l’adage «les lamantins ont beau s’éloigner, ils reviennent toujours vers la source». Autrement dit, pendant que je les mettais dans les conditions d’épanouissement dans leurs fonctions de membres du bureau, eux, ils se réunissaient à mon insu pendant des mois pour ourdir des complots et chercher à polluer l’atmosphère de fin de mandat. En fait, la plupart de mes adversaires sont ceux de 2002 qui n’ont jamais digéré leur défaite. J’en profite pour dire aux électeurs de la CCIM qu’ils ne devraient pas se laisser divertir par des gens qui ne veulent voir, ni les réalisations ni les acquis. Ceux qui s’obstinent dans la médisance, la désinformation et le complot ne seront jamais mes alliés, car j’aime la loyauté et la transparence.
Pourtant, malgré les divergences, je respecte tous mes adversaires et les considère comme des frères, des sœurs, des oncles et des tantes. En plus, chacun d’eux est un maillon important de la grande famille des opérateurs économiques du pays.
Cependant, j’ai l’obligation de rappeler que je suis un croyant conscient que les grands hommes et même les prophètes se sont forgés dans l’adversité. Même Dieu, qui nous a créés, ne fait pas l’unanimité. Je suis confiant en l’avenir. Je suis persuadé que les femmes et les hommes d’affaires de ce pays savent distinguer la bonne graine de l’ivraie. Je sais compter sur les opérateurs économiques qui veulent terminer le grand chantier de la construction du changement qualitatif, entamé depuis quatre ans.
Vous êtes candidat à votre propre succession. Quatre ans à la tête de la CCIM, vous vous prévalez certainement d’un bilan comme vous l’avez dit tantôt. Avez-vous vraiment le sentiment d’avoir été utile au monde des affaires ?
Je vous renvoie à ma déclaration liminaire à l’occasion de déclaration de ma candidature lors de la dernière campagne. Je m’inscrivais dans le sillage de John Kennedy qui enseignait de fort belle manière qu’«il ne faut pas demander ce que ton pays peut faire pour toi, mais ce que tu peux faire pour ton pays». Dès le départ donc, j’ai annoncé la couleur, celle d’être uniquement au service du développement et de l’épanouissement du secteur privé de mon pays. C’est d’ailleurs la raison du choix du titre de mon livret bilan : «Quatre ans au service de la CCIM».
Vous aurez remarqué en passant que rien ne se fait par hasard dans ma démarche. Je déroule une certaine logique fondée sur un programme et des stratégies mûrement élaborées. Si maintenant, je dois citer les réalisations et les acquis qui constituent mon bilan d’activités, je pense que toutes les pages du journal ne suffiraient pas pour cela. Je vous renvoie à cet effet au document édité par mes soins. Je défie quiconque de nous apporter la contradiction.
Par conséquent, je suis à l’aise en évoquant les grands axes de ce bilan. Je préciserai tout d’abord que par rapport au programme d’activités adopté par l’assemblée consulaire, nous avons atteint aujourd’hui 80 % de réalisations et nous restons convaincus de faire mieux pour les quatre années à venir. En effet, après avoir donné à la Chambre de Commerce et d’Industrie du Mali tout son rayonnement, nous sommes en train d’élargir les missions de l’institution par une relecture des textes afin de lui assigner une stature et un rôle conforme à l’exigence de l’environnement actuel des affaires. En plus, dans le cadre de la promotion du secteur privé, nous avons attaqué la question du surendettement des opérateurs économiques, la problématique du financement des activités. Une concertation fiscale et douanière nous a permis de faire face à l’administration pour disséquer les goulots d’étranglement et, par la même occasion, proposer les réaménagements nécessaires.
Seulement, nous avons compris que nos ambitions, si nobles soient-elles, doivent être accompagnées de moyens pour leur réalisation. Pour ce faire, nous devions commencer par soigner notre propre image en dotant nos régions de sièges respectables et fonctionnels. C’est ainsi que nous avions mis en place un programme national de réalisation d’infrastructures à travers lequel nous avons construit un siège à Sikasso et à Mopti. Les chantiers des autres régions vont démarrer incessamment et concomitamment car les terrains sont acquis, les études bouclées et le principe de préfinancement accepté par les partenaires chargés de la réalisation. A ce niveau nous avons opté pour une préférence régionale, afin de participer à la promotion des entreprises locales.
En plus, nous sommes en train de construire des entrepôts au Port de Tema (au Ghana). Des études ont été réalisées pour le réaménagement ou la construction d’entrepôts dans les autres ports d’approvisionnement du Mali. Il y a eu aussi d’autres initiatives telles que la professionnalisation de la FEBAK, l’organisation de la Foire Internationale de Kayes, la création de la Foire de l’Indépendance dont la première édition est prévue du 22 au 30 septembre 2006. Parlant de FEBAK, l’on ne pourrait passer sous silence la construction du premier lot du Parc des expositions de Bamako, appelé site FEBAK.
Mais est-ce parce que vous avez bénéficiez de moyens spécifiques ?
Bien au contraire, nous avons été terriblement confronté au problème de moyens pour la réalisation du programme. Mais, nous avions inscrit dans notre programme la recherche de voies et moyens pour accroître les ressources financières de l’institution. C’est dans ce cadre que nous avons proposé à l’Assemblée consulaire la cotisation spéciale de 1 % sur la valeur CAF des importations. Cette disposition adoptée a connu des blocages dans l’exécution par le gouvernement. Lors de l’inauguration du siège de Mopti le 27 mai dernier, nous avons été surpris d’entendre que des opérateurs économiques sont allés s’opposer à cette résolution de l’Assemblée consulaire. C’est maintenant que nous comprenons le sens de la démarche de cette fange d’hommes d’affaires qui ont tenté de bloquer nos réalisations par calcul électoral. Mais, le Président de la République a donné les instructions nécessaires à l’application et nous en sommes flattés.
Ce n’est plus un secret pour personne que vous avez en face des adversaires. Certains d’entre eux sont redoutables. Qu’est-ce que vous avez à leur dire à cette phase décisive du processus électoral, étant entendu que d’aucuns d’entre eux n’ont même pas attendu la fin de votre mandat pour se manifester ?
Vous savez, nous vivons dans un pays démocratique où il y a un respect profond de la liberté de penser et d’agir de chacun. Comme je vous le disais plus haut, même Dieu ne fait pas l’unanimité. Donc, je ne prétendrai jamais avoir tout le monde de mon côté. Je suis conscient de l’adversité nourrie par ceux qui sont en face. Mais, je ne pense pas tomber dans un jeu de à-toi-à-moi qui ne grandirait pas le secteur privé au nom de qui nous parlons et nous agissons.
Je respecte tout le monde. J’ai travaillé dans le sens de l’unité des cœurs et des esprits en vue de la construction d’un secteur privé fort et efficace, même si je savais que quelque part des velléités de complot et de déstabilisation étaient entretenues.
La plupart de ceux qui s’opposent à moi sont des grands frères et des oncles à qui je donne toute la considération qui sied. Cela n’entame en rien ma détermination à faire triompher les idéaux que je nourris pour la CCIM. Dieu merci ! De plus en plus, de nombreux opérateurs économiques très représentatifs dans le secteur privé me manifestent leur soutien. Ce qui d’ailleurs m’a permis de jouer la carte de listes du changement dans les trois sections qui composent l’assemblée consulaire. Je vous avoue, franchement, que c’est une déferlante qui est en train de balayer tous les nostalgiques du passé qui veulent faire tourner à rebours la roue de l’histoire et prendre en otage la CCIM au profit d’un groupe qui se dit être en mesure d’acheter les voix et les consciences de tout le monde. En tout cas, la CCIM est en train de tourner une nouvelle page de son histoire. Désormais, rien n’y sera plus comme avant.
Justement, on dit que pour la première fois dans l’histoire de la CCIM on enregistre deux listes concurrentes dans toutes les sections. Comment expliquez-vous ce phénomène ?
C’est dans l’ordre normal des choses. Disons que c’est le résultat d’un processus. Depuis près de trois décennies, les mêmes opérateurs meublent les listes et la fonction de membre consulaire qui en perdait sa valeur. Avec notre arrivée, les gens ont pris conscience que les portes de cette institution n’étaient pas un terrain pour privilégiés. Nous avons emmené les opérateurs économiques à s’intéresser davantage à leur institution. Mais, ce ne sera pas pour en faire un électorat taillable et corvéable comme par le passé. Vous savez, ce qui se passait avant était un manque de respect pour les opérateurs économiques. Car, deux tondus et trois pelés se réunissaient et s’arrogeaient le droit de faire voter n’importe quelle liste. Ceux qui profitaient de cette logique se prenaient pour d’éternels éligibles. Tandis que les autres devaient rester au stade d’électeurs. Il fallait sentir le vent du changement souffler.
Actuellement, au Mali on peut même sortir trois listes par section. Le dynamisme des activités et le sérieux des hommes d’affaires, vis-à-vis du fisc, offre cette opportunité. Il n’y a pas péril en la demeure. L’expression plurielle est toujours bénéfique pour l’évolution des situations.
L’idée des listes concurrentes a été imposée par mes amis et partisans qui ont tenu à manifester leur désir de rejet de listes consensuelles qui ne sont que des refuges pour des gens qui ne peuvent même pas mobiliser trois électeurs.
La compétition est ouverte. Nous souhaitons qu’elle soit saine. Que les meilleurs l’emportent pour le bien de tout le monde. Cependant, nous disons à tout le monde que le temps de l’achat des consciences est révolu au niveau des élections consulaires. Seule la volonté de la majorité l’emportera. Nous pensons être du côté de cette majorité qui en a fait une affaire d’honneur et de dignité. Gare à celui qui veut marchander !
En terme de promotion de la destination Mali, comment la CCIM intervient-elle pour harmoniser ses actions avec celles du gouvernement qui œuvre pour attirer l’investissement étranger ?
Comme je le disais tantôt, l’une de nos missions est de participer activement à la promotion des investissements en créant un environnement incitatif et en posant des actes destinés à parfaire l’image de la destination Mali. Vous savez, en dehors de la Chambre de Commerce et d’Industrie du Mali, les opérateurs économiques sont des citoyens à part entière. A ce titre, chacun e ce qui le concerne doit essayer de voir ce qu’il peut faire pour son pays et non ce que son pays doit faire pour lui. Je pense que c’est assez bien compris de la part de mes pairs qui ne ménagent aucun effort pour redorer l’image de l’opérateur économique que de mauvaises langues ont tendance à ternir.
De toute façon, la CCIM est à l’aise dans le domaine de la promotion de la destination Mali et en matière de promotion des investissements. Dans la mesure où les autorités de la République jouent franchement le jeu de la concertation et de la collaboration étroite en vue de trouver les meilleures voies pour rendre l’environnement des affaires très attractif. C’est l’occasion de rappeler qu’à plusieurs reprises les opérateurs économiques ont accompagné le Chef de l’Etat dans ses voyages à l’étranger. C’est le lieu de lui rendre hommage. Car, il nous réserve une place honorable dans ses délégations, pour nous permettre d’activer la coopération économique avec des pays amis.
Il ne faut surtout pas oublier qu’à notre niveau, à la CCIM, nous prenons aussi des initiatives à travers un service essentiellement destiné à la coopération internationale. Dans nos actes de tous les jours, nous restons convaincus, qu’assurer le transfert de technologies vers notre pays, reste une des voies royales pour construire un tissu industriel compétitif.
Qu’on me comprenne bien ! Il ne s’agit pas tout simplement de faire de la mimique. Dans le cadre du donner et du recevoir, il faut s’inspirer des expériences qui sont des modèles indiscutables.
Il se susurre que, autant vous faites de bons résultats à la CCIM, autant vous avez des affaires de plus en plus florissantes. Un constat qui divorce d’avec la situation des affaires des présidents qui vous ont précédé au point de faire dire que la charge de président de la CCIM entraîne la faillite.
Rires ! Vous avez raison de poser cette question. Mais, rendez-vous d’abord compte que pour me rencontrer, vous êtes venu jusque dans mon bureau privé, au siège de mon groupe. Je n’ai jamais voulu être ce Président de la CCIM qui passe tout son temps à animer un grin de privilégiés qui viennent pour des choses vraiment personnelles. Il y a une administration que j’ai responsabilisée et elle fait bien son travail sous l’autorité du Secrétaire Général. Je profite d’ailleurs de l’occasion pour rendre un vibrant hommage aux travailleurs de la CCIM pour leur loyauté et leur abnégation. Ceci étant, je pense que les membres du bureau ne sont pas des chercheurs d’emplois pour accorder trop de temps à la marche de l’institution. Nous sommes sensés être des hommes d’affaires, donc nous ne devons pas disposer suffisamment de temps pour respecter des horaires de travail à la CCIM qui ressemblent au régime des travailleurs salariés. Il suffit tout simplement de faire fonctionner l’ensemble des structures, les coordonner et les superviser. Dès lors que l’on cesse d’être un bon homme d’affaires, on ne pourrait plus prétendre représenter les opérateurs économiques. C’est pourquoi, je m’étonne de voir des gens au bord de la faillite postuler à des postes de responsabilités au niveau de la CCIM. Qui pourrait leur accorder crédit ? Que peuvent-ils faire pour le secteur privé ? Celui qui ne peut gérer sa propre case pourra-t-il tenir le village ?
Je suis et je reste opérateur économique. Je suis en mission à la CCIM où, bénéficiant de la confiance des opérateurs économiques, j’assume cette mission sans altérer le bon fonctionnement de mes entreprises. C’est aussi une façon de rappeler que la Chambre de Commerce et d’Industrie du Mali n’est pas l’appartenance d’un homme ou d’un groupe. C’est l’affaire de tous les opérateurs économiques. J’ai eu la chance d’en être le président, mais ce n’est pas pour y demeurer. J’apporte ma touche constructive tout comme des milliers de Maliens restés dans l’ombre.
Propos recueillis par Belco TAMBOURA et K. YOU