Immatriculation obligatoire des véhicules au Mali : Les porteurs d’uniforme roulent hors-la-loi
Il y a environ un an, la ministre des Transports, Madina Sissoko, s’est engagée à rétablir l’ordre sur les routes maliennes. Mais un constat s’impose : une catégorie d’usagers défie ouvertement les règles les porteurs d’uniforme.

Véhicules sans plaques, sans papiers, sans contrôle… Une impunité choquante qui sabote l’autorité de l’Etat et fait perdre des millions au Trésor public.
Sur les routes de Bamako comme dans d’autres grandes villes du pays, les véhicules sans plaque d’immatriculation sont légion. Plus troublant encore, bon nombre sont conduits par des porteurs d’uniforme : policiers, gendarmes, gardes nationaux… Certains n’affichent qu’un vague « CH » suivi d’un numéro de châssis ; d’autres ne portent aucune inscription visible, aucun numéro de série, aucun document apparent. Pas de plaque, pas de carte grise, pas de vignette, encore moins de visite technique ou d’assurance. Une véritable « zone grise » échappant à tout contrôle.
Cette situation pose un sérieux problème d’exemplarité. Comment un citoyen lambda peut-il être contraint de respecter la loi, si ceux qui sont censés la faire appliquer la transgressent en toute impunité ? Cette dérive, en plus de ternir l’image des forces de sécurité, représente une perte financière colossale pour l’Etat.
Selon la réglementation malienne, tout véhicule d’occasion mis en circulation doit s’acquitter d’un droit d’enregistrement, communément appelé « frais des affaires économiques », d’un montant d’environ 260 000 F CFA pour un véhicule de dix ans, soit l’âge moyen des voitures importées d’Europe. Or, très peu de porteurs d’uniforme achètent des véhicules neufs. Si 100 véhicules d’occasion échappent à cette redevance, c’est 26 millions de F CFA qui s’envolent. Multipliez ce chiffre par 1 000 véhicules, et la perte grimpe à 26 milliards. Un gouffre, dans un pays où chaque franc compte.
Autre question : pourquoi certaines catégories de citoyens bénéficient-elles d’un régime d’exception ? Le laxisme de certains agents des douanes, combiné à l’arrogance de certains porteurs d’uniforme, alimente une culture d’impunité qui fragilise dangereusement l’État de droit.
Malgré ses injonctions, la ministre des Transports semble pour l’heure impuissante face à l’indiscipline de ces « garants de l’ordre ». Pourtant, des solutions existent : renforcer les contrôles, y compris sur les véhicules des forces de sécurité ; favoriser la coopération entre les ministères de la Défense, de la Sécurité, des Transports et des Finances ; et surtout, faire preuve de volonté politique pour mettre fin aux passe-droits.
Car au fond, l’enjeu dépasse le cadre administratif. Il s’agit de restaurer la confiance des citoyens dans les institutions. Tant que la loi ne s’appliquera pas à tous de manière équitable, l’autorité de l’Etat restera bancale.
Il revient donc au gouvernement, à travers le ministère des Transports, de frapper fort y compris dans les rangs de ceux qui portent l’uniforme.
En matière de civisme routier, comme ailleurs, l’exemplarité ne doit jamais être une option. Elle est un impératif. Une exigence. Un devoir.
Sans elle, c’est l’ensemble du système qui bascule.
Hamidou B. Touré
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