Commandement aux fins de saisie immobilière : Encore un nouvel acharnement de la BCS contre son client

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    Après la mise en demeure du 10 février 2016 demandant le paiement de sa prétendue créance sous huitaine, sous peine de réalisation d’hypothèque, la BCS revient cette fois-ci, le 07 Avril 2016, avec un commandement aux fins de saisie immobilière, demandant de payer la même créance au bout de 20 jours, bradant la menace de poursuite par voie d’expropriation forcée, ce, devant le Tribunal de Grande Instance de la Commune IV du District de Bamako, sis à Hamdallaye. Une banque a-t-elle le droit de se convertir en institution de brigandage contre ses clients ?

    En effet, dans une instance en contestation de créances et remboursement initiée par le sieur Issaka TRAORE contre la Banque Commerciale du Sahel SA (BCS-SA), le Tribunal de Commerce de Bamako par son jugement n° 065 /JUGT/14 en date du 22/02/2014 a rendu la décision suivante :” Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en premier ressort ; déclare irrecevable les demandes du sieur Issaka TRAORE ; met les dépens à sa charge “. Contre ce jugement, le sieur Issaka TRAORE a relevé appel dans les forme et délai prévus par la loi.

    Rappel des faits :

    Monsieur Issaka TRAORE est Promoteur d’une Entreprise de droit malien dénommée Entreprise Nouvelle de Bâtiments et de Travaux Publics “ENB- TP”. Il opère dans le secteur du bâtiment et des travaux publics depuis plus d’une décennie. A ce titre, il a noué des rapports de collaboration avec la Banque Commerciale du Sahel SA. A sa demande, cette banque lui apporte son concours financier pour l’exécution de ses marchés.

    Ainsi, depuis 2004, chaque année il bénéficie d’un concours identique plafonné comme suit :

    * Pour les découverts : 10.000.000 FCFA,

    * Pour les cautions : 20.000.000 FCFA,

    * Pour les avances sur marché : 20.000.000 FCFA.

    Tous ces concours de la BCS SA sont accordés pour une durée de 12 mois fermes et garantis par une caution hypothécaire. Jamais dans leur collaboration, Issaka TRAORE n’a pu bénéficier du concours de la BSC SA au-delà de la date d’échéance. Mais curieusement, courant Août 2010, il a constaté des opérations de retrait à hauteur de 11.000.000 FCFA (des découverts) sur son compte n°25 110 400 19 60 ouvert dans les livres de la BCS SA, alors que l’échéance de son concours était expirée. Ces découverts ont été respectivement opérés suivant les chèques n°0954799, 1020257 et 0954800 pour les montants de 3.000.000 FCFA, 4.000.000 FCFA et 4.000.000 FCFA.

    Après vérification, il lui est revenu de constater que le chèque n°0954800 d’un montant de 4.000.000 FCFA émis le 30/08/2010 a été présenté à l’encaissement après l’échéance du concours fixée par la BSC SA. Ce chèque à l’ordre du porteur a été payé par la BCS SA à un individu dénommé Chaka KANE au-delà de l’échéance du concours fixé au 25/08/2010. Et curieusement la BSC SA a fait ce paiement alors qu’elle n’avait jamais accordé au sieur Issaka TRAORE le moindre paiement sur découvert après l’échéance du concours.

    Poursuivant ses vérifications, le sieur Issaka TRAORE s’est rendu compte que sa banque avait payé à la même personne deux autres chèques tous au porteur d’une valeur respective de 3.000.000 FCFA et 4.000.000 FCFA.

    A la suite des investigations, il a été découvert que tous ces chèques payés par la BCS-SA sur le compte du sieur Issaka TRAORE l’ont été frauduleusement par les sieurs Chaka KANE, Abdoulaye DIARRA, Amadou SISSOKO, Souleymane SANOGO et Seydou MAÏGA. Et par jugement n°144 en date du 08/03/2011, les sus nommés ont été reconnus coupables de vol, faux, usage de faux et complicité et condamnés à cet effet.

    Curieusement, par courrier en date du 06/06/2013, la BCS-SA, via son Conseil, a mis en demeure le sieur Issaka TRAORE pour le paiement de la somme de 18 396 523 FCFA, qui serait issue de son compte débiteur “indemnité conventionnelle” compris.

    Pire, outre la réclamation des 18 396 523 dont 5 585 371 CFA sont totalement injustifiée, la BCS-SA a passé en sa faveur un chèque de FCFA 1.750.000 FCFA et un autre de 804 201 FCFA que le partenaire (CREPA-MALI) du sieur Issaka TRAORE avait présenté à l’encaissement à la date du 28/10/2010 et le 09/05/2011, la restitution de 1 686 410 CFA de déposit de caution visible sur l’état de compte qui accompagne la lettre du 06/06/2013, 185 162 CFA également restitution de déposit du 24/01/2011 visible sur le relevé de compte BCS.

    L’on se croirait dans une caverne de brigands et non une institution bancaire du Mali, pardon de la Lybie.

    Attendu donc que ces montants réclamées sont erronés en ce que, le sieur Issaka TRAORE n’a effectué aucune opération de retrait sur son compte ouvert dans les livres de la BCS-SA après l’incident où il disposait par ailleurs d’un crédit de 50 348 CFA au moment des faits; attendu que le requérant est lié à la BCS-SA par une convention de compte courant assortie d’une garantie hypothécaire sur le Titre Foncier n°14623 ; que toutes les opérations susceptibles d’être inscrites dans son débit doivent forcément être les siennes et non du fait de tiers comme dans le cas d’espèce ; Issaka TRAORE a fait un recours tendant à contester ladite créance.

    Incroyable mais vrai

    Il est curieux de constater que le jugement déféré a déclaré la demande du sieur Issaka TRAORE irrecevable en application de l’article 118 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale (CPCCS) dit-il. Il a fondé cette fin de non-recevoir sur le fait que le sieur Issaka TRAORE avait initié une instance en remboursement et réparation de préjudice contre la BCS-SA.

    Or contrairement à l’analyse faite par le premier juge, l’article 118 ne sied pas en l’espèce. En effet, le non-recevoir est fondé sur le défaut de droit, d’agir, tel que le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai fixé et la chose jugée. Dans le cas d’espèce, sans démontrer en quoi le sieur Issaka TRAORE n’a pas qualité à agir, le premier jugement a déclaré sa demande irrecevable au motif peu sérieux qu’une instance en réclamation de sommes est pendante. Et l’existence d’une autre instance ne peut justifier le défaut de qualité d’un justiciable et par conséquent l’irrecevabilité de sa demande en dehors des conditions fixées par la loi.

    Ces conditions n’étant pas réunies en l’espèce, il s’avère que le jugement entrepris procède d’une violation de la loi et doit être infirmé. Dès lors le recours de Issaka est bien fondé. En ce sens qu’il a été suffisamment prouvé que le compte BCS-SA n°01251104001960 du sieur Issaka TRAORE a été débité pour des opérations dont il n’est pas l’auteur. Qu’il ne peut être débiteur de la BCS-SA sur le fondement de ces opérations frauduleuses. Alors il y a lieu de faire droit à la contestation de créance formulée par le sieur Issaka TRAORE.

    Par ailleurs il est indiscutable qu’à la date du 28/10/2010 et du 09/05/2011 deux chèques BDM-SA  de 1.750.000 FCFA et de 804 201 CFA ont été émises en faveur du sieur Issaka TRAORE par son partenaire CREPA-MALI, en plus, des déposits de caution ferme de 165 162 CFA et 1 686 410 CFA ont été inscrits à son crédit (visibles sur son relevé de compte).

    Prétextant des opérations frauduleuses visées plus haut, la BCS-S s’est approprié de ces montants privant ainsi le sieur Issaka TRAORE de son dû. C’est dire qu’il y a plutôt lieu de condamner la BCS-SA au remboursement de ces sommes.

    Enfin aux termes de la convention liant les parties, le sieur Issaka TRAORE avait consenti une hypothèque sur un immeuble objet du Titre Foncier n°14623 pour garantir son éventuelle dette à l’égard de la BCS-SA. Par la mise en demeure en date du 06/06/2013, la BCS SA a affiché sa volonté de rompre le lien contractuel.

    Attendu qu’à la date de cette mise en demeure, le sieur Issaka TRAORE  n’avait effectué aucune opération justifiant le débit que la BCS-SA lui réclame ; et qu’en l’absence de créance juridiquement fondée, à la date de la rupture du lien contractuel, la BCS-SA n’est plus en droit de détenir la copie du Titre Foncier n°14623 ou d’y maintenir son hypothèque ; il n’y a plus qu’à ordonner la radiation de cette hypothèque et la restitution de la copie du Titre Foncier n°14623. Pour ainsi dire, l’appel demande au tribunal d’infirmer le jugement n° 065 /JUGT/14 en date du 22/02/2014 du tribunal de commerce de Bamako dans toutes ses dispositions ; de constater que Issaka n’est pas débiteur de la BCS-SA des sommes de 14.717.219 FCFA en principal et 3.679.304 FCFA à titre d’indemnité conventionnelle ; de condamner la Banque Commerciale de Sahel (BCS SA) à lui restituer les sommes de 1.750.000 FCFA, 804 201 CFA représentant les montants du chèques BDM-SA en date du 28/10/2010 et 09/05/2011 émises par son partenaire CREPA-MALI; 165 162 CFA et 1 686 410 FCFA représentant des déposits de cautions fermes, soit, au total, 4 405 773 CFA ; d’ordonner la mainlevée et la radiation de l’hypothèque inscrite sur le Titre Foncier n°14623 appartenant au concluant. Et de condamner la BCS-SA aux dépens.

    Bref, peut-on donner droit à la requête de la BCS-SA alors que les procédures suivantes sont en cours ? Il s’agit de :

    – Procédure de discontinuation de poursuite suite à la mise en demeure du 10 février 2016

    – Contestation de créance suite à la mise en demeure du 28 Juin 2014

    – Procédure d’annulation d’hypothèque pour non renouvellement dans le délai imparti

    Peut-on déposséder quelqu’un de son bien pour une dette imaginaire alors que la loi dit que pour recouvrer en pareille circonstance, la créance doit être certaine, liquide et exigible ?

    Wait and see !

    Mamadou DABO

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