Fait divers : COFFRÉ

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    C”est l”histoire d”un cambrioleur qui avait vidé un coffre avant de se reconvertir dans la voyance loin de Bamako. Pas assez loin …

    Le mot confiance a tendance à disparaître du vocabulaire de nombre de personnes. Combien d”entre elles ont vécu une expérience amère pour avoir fait confiance à des hommes et femmes apparemment honorables.

    Dans un monde en pleine mutation, certains ont fait le choix de gagner leur vie en trompant les autres. Ils vivent, sans remords particulier, d”escroquerie, de vol, de trahison. Mieux, ces délinquants s”attaquent surtout à des collègues, à des parents, à des amis. Parce qu”ils connaissent leurs habitudes, leurs avoirs, parce que ceux-ci ne se doutent de rien et sont plus faciles à gruger. Le ciel tombe littéralement sur la tête des victimes désormais enclines à ne faire confiance à personne.

    UN PLAN DE CAMBRIOLAGE.

    Le mauvais comportement d”un jeune employé du magasin Orca fournit un exemple frappant de ce type de mésaventure. Le jeune Lamine Diarra était employé par un GIE de nettoyage qui avait comme client les magasins Orca à Hamdallaye ACI 2000. Le jeune homme découvrit un jour l”existence d”un coffre dans la boutique. Pendant longtemps, le technicien de surface ne rêvait plus que du contenu du coffre qu”il imaginait mirifique. Il réfléchissait fiévreusement à la manière de vider le coffre fort, se voyait déjà palpant des milliards d”autant plus agréables à dépenser qu”ils auraient été obtenus sans se fatiguer.

    Plusieurs problèmes se posaient à lui. D”abord mettre la main sur le contenu du coffre. Ensuite le faire sans être soupçonné, à plus forte raison être arrêté. Le 22 septembre 2006, date anniversaire de l”accession de notre pays à l”indépendance, Lamine a décidé de passer à l”acte. La fête de l”indépendance devait être un événement doublement heureux pour lui. Pendant que les uns et les autres se préparaient aux festivités, s”apprêtaient à passer du bon temps, le jeune employé et son frère, Bafing Diarra, montaient un plan de cambriolage. Ce jour là, le voleur arriva plus tôt que d”habitude.

    A 15 heures déjà, il se sépara de son frère Bafing Diarra, gardien à l”immeuble Tomota, non loin de son lieu de travail. Il se dirigea vers le magasin Orca où il croisa à la porte un des responsables qui rentrait à la maison. Il le salua et entra dans la boutique. Il fit un petit tour à l”endroit où trônait le coffre. Sans laisser deviner ses intentions, il commença à mouiller les serpillières pour nettoyer le sol carrelé. Il fit son travail avec le sérieux habituel.

    A un moment, le gérant Ali Raad rassembla ses affaires et s”en alla, laissant Lamine seul dans la boutique. Quand il acheva de nettoyer le magasin, il alla jeter un coup d”oeil à la porte pour s”assurer qu”il était bien seul. Il s”attaqua alors au coffre et parvint à l”ouvrir. Il tira un sac de plastique caché sous ses vêtements dans lequel il vida le contenu du coffre qui s”élevait à 30 millions de Fcfa. Il déposa le paquet dans son seau de travail et empila des serpillières mouillées sur l”argent volé. Il quitta les lieux le plus tranquillement du monde et s”empressa de rejoindre son frère et complice Bafing. Ils abandonnèrent leur domicile et se rendirent à Djélibougou Doumanzana chez le féticheur Balla Kamissoko pour lui demander de les protéger contre les conséquences de leur coup audacieux.

    UN BOUC ET UN COQ ROUGE.

    Le maître des sciences occultes entreprit de réciter des incantations sur les fétiches. Plus tard, Balla et les deux employés immolèrent un bouc et un coq rouge pour chasser les mauvais esprits et le sort funeste. Le charlatan assura aux frères Diarra que rien ne leur arriverait. "Cette affaire est close. Même les "pilons magiques" ne pourront vous retrouver", leur jura-t-il. Les malfrats remirent quelques billets au féticheur, se partagèrent le reste du magot, avant de se séparer.

    L”auteur du casse du coffre, l”audacieux Lamine demanda à un de ses amis, Berthé, résidant en Zone industrielle de recevoir et d”héberger sa femme. Cet ami et l”épouse de Lamine iront finalement loger chez Balla, le féticheur.

    Le bandit, lui, fila se cacher à Nionzombougou, un village du cercle de Kolokani. Peu après son arrivée, il a ouvert un bar dans son village natal. Il avait acheté quelques fétiches pour mieux se mettre à l”abri des porteurs d”uniforme. Son frère Bafing s”éloignera, lui aussi, de Bamako pour se réfugier dans un village, proche de Nionzombougou. Malgré les précautions prises par le voleur et ses complices pour échapper à la justice, ils n”ont pu échapper aux policiers de l”inspecteur Koné du commissariat du 5è arrondissement. Surnommé le "sorcier de Bamako ouest", ce fin limier, après avoir reçu la déclaration de cambriolage de Ali Raad, le gérant de la société Orca, a mis sa brigade de recherche en branle.

    Les investigations lui ont permis de mettre rapidement la main sur l”ami de Lamine, qui avait hébergé la femme du bandit. L”inspecteur interpella Berthé en Zone industrielle puis l”épouse du cambrioleur. Ces deux personnes ont été mises sous mandat de dépôt le 28 septembre dernier. En poursuivant leur enquête, les policiers ont reçu des renseignements sur Lamine Diarra, le voleur converti en tenancier de bar et en voyant à Nionzombougou.

    La brigade de recherche s”est rendue à Nionzombougou le 14 mars dernier. Cette mission comprenait l”inspecteur Koné et les adjudants Sow et Zerbo. Parvenue à Nionzombougou, l”équipe se rendit directement au bar qui lui avait été indiqué. Interrogé par les policiers et abasourdi d”avoir été retrouvé, le voleur reconnut les faits sans difficultés. De son débit de boissons, il fut conduit à son domicile où une fouille en règle fut opérée. A part des fétiches, les agents ne trouvèrent rien du pactole volé. Lamine avoua néanmoins qu”il était l”auteur du cambriolage et dénonça des complices à Bamako.
    De retour dans la capitale, les hommes de l”inspecteur Koné arrêtèrent le féticheur Balla Kamissoko et deux autres complices présumés, Karim Djiré et Amadou Koulou. Ce dernier, présenté par le voleur comme étant son oncle, avait reçu un Sotrama, une Djakarta et un taxi de son neveu.

    En six mois, le voleur et ses complices ont dilapidé les 30 millions. Ils ont été déférés à la Maison centrale d”arrêt de Bamako.

    D. I. DIAWARA

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